Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Mon avis : Reconquista #2.0 – Georges Chelhod

Publié le par Fanfan Do

Éditions Librinova

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Un gérant de bazar bon marché est assassiné sans mobile apparent à Denia, à l’est de l’Espagne. Les agresseurs auraient fui en mer grâce à une logistique hors normes. Missionnée depuis Valencia, l’inspectrice Pilar Ubago enquête dans une Méditerranée sous tension. Des frégates s'entraînent à la guerre sous-marine à proximité de l’Afrique. Le navire dépollueur d’une secte de Panama affronte des cétacés extrêmement agressifs. Le brise-glace d’un milliardaire de Sébastopol espionne à la limite des eaux territoriales. Après quatre jours de navigation, Pilar Ubago soupçonne une machination qui menace les institutions de la péninsule. Résoudra-t-elle cette énigme qui prend sa source dans plusieurs continents ?

 

 

Mon avis :
Un nombre impressionnant de personnages et d'événements dès les premiers chapitres, des termes techniques sur de l'armement, avec lesquels je ne suis pas en terrain de connaissance… j'ai dû un peu m'accrocher dans les douze premiers chapitres, et surtout prendre des notes, sur les différents protagonistes.

Les personnages essentiels sont très nombreux, on les suit les uns après les autres au fil des chapitres dans une sorte de roulement perpétuel :
1 - Angela
2 - Tanya
3 - Ronnie
4 - Alex
5 - Pilar
6 - Angela
7 - Tanya
8 - Ronnie
9 - Gustavo
10 - Pilar…
Plus les équipiers de chacun…
Ça m'a rendu la lecture quelque peu compliquée, du moins au début, et pourtant je n'ai pas eu envie de m'arrêter.
Une femme commandant de bateaux, deux policières, des trafiquants, des écologistes, des mercenaires, des ex-taulards, une secte, des flics corrompus, des sous-marins, des orques, des cachalots, des meurtres, et un projet de putsch, tout ça dans et sur le pourtour de la méditerranée. Financements occultes, logistique, stratégies, politique, je pense que c'est passionnant pour qui comprend tout ça. Mais pour ma part j'ai plus été intéressée par les étranges comportements des cétacés ainsi que par l'enquête de Pilar et Francesca, les deux policières. Mais bien sûr, tout se rejoint peu à peu car les nombreux éléments de l'histoire convergent inexorablement.

J'ai appris des choses intéressantes au fil de ce roman, sur les cétacés et les ondes sonores qu'ils utilisent pour se déplacer, les bateaux, la navigation, les magouilles, et la perfidie de beaucoup de mes semblables. Et dire que l'homme est un loup pour l'homme n'est vraiment pas sympa pour les loups, tant les hommes sont capables du pire, juste par cupidité.

C'est un roman extrêmement bien documenté et très détaillé. Et je trouve totalement flippant de penser à tout ce qui peut naviguer sur et sous les mers avec parfois des mauvaises intentions et des moyens colossaux grâce, entre autre, à des super paravents juridiques et des états corrompus.

 

Citations :

Page 71 : Mila avait besoin d’idiots pour les tâches dangereuses et masquer ses combines : aujourd’hui un truc humanitaire de migrants sur un bateau dédié à la dépollution ; hier une loterie caritative grande lessiveuse d’argent du trafic d’émeraudes, le bingo-bingo.

 

Page 112 : La mer transmettait la rumeur d’une chorale interlope : mugissement de rorquals, cliquetis de cachalots, roucoulement des poissons-chats, rots d’anguilles, pets de harengs et les jours de chance, le cri d’un phoque moine ou la rumeur d’un glissement de terrain. La variété des sons des océans rivalisait avec n’importe quelle forêt tropicale, mais avec des volumes considérablement plus élevés.

 

Page 161 : Le comble, pour un espion, est de se faire espionner…

 

Page 389 : La cour suprême a annulé les mesures d’atténuation imposées par un tribunal fédéral pour protéger les baleines et les dauphins des effets nocifs des sonars à moyenne fréquence utilisés lors des exercices d’entraînement militaire de la Navy. Cette décision de la haute cour casse l’injonction de la juge fédérale d’Hawaï obligeant la marine à prendre des protections supplémentaires dans l’utilisation des sonars. La marine utilise ces sonars à des volumes extrêmement forts pour détecter les sous-marins. Ces exercices sont étroitement associés à la mort de mammifères marins, et en particulier de baleines à bec. Ces animaux utilisent les ondes sonores pour localiser leur nourriture, détecter les aliments et les prédateurs, et communiquer avec les autres membres de leur espèce. L’exposition à des sonars extrêmement puissants expose les cétacés à une surdité temporaire ou définitive. Elle semble provoquer une remontée trop rapide des baleines plongeant en profondeur. Elle provoque un état similaire à la « maladie des caissons » des plongeurs et peut s’avérer fatale. Pour autant, la Cour suprême a stipulé que la juge fédérale n’avait pas suffisamment étayé sa conclusion selon laquelle le préjudice probable pour les baleines et les dauphins justifiait de plus amples restrictions.

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : Quality Lande 2.0 – Marc-Uwe Kling

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Juliette Aubert-Affholder

 

Éditions Actes Sud

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Chaque mois est le plus chaud depuis le début des enregistrements météo, un billionnaire rêve de devenir président, sans oublier cette histoire de Troisième Guerre mondiale. Peter Chômeur, qui peut enfin travailler comme thérapeute pour machines, tente de résoudre les problèmes sentimentaux d’appareils électroménagers. Kiki Inconnue fouille dans son passé et se prend la tête avec un tueur téléguidé. Last but not least, tous les drones ont un comportement plutôt étrange ces derniers temps… Bienvenue à QualityLand 2.0, la suite de la dystopie la plus drôle du moment.

À propos de Quality Land :

« Marc-Uwe Kling nous régale d’une satire irrésistible sur un futur aseptisé et aliénant dominé par les algorithmes et les robots. […] C’est un peu comme si Orwell avait été revisité par Mel Brooks. »

Livres Hebdo

Marc-Uwe Kling est écrivain, auteur-compositeur et cabarettiste. Quality Land a connu un vif succès international, touchant plus d’un million de lecteurs.

 

 

Mon avis :
 

Après avoir passé un excellent moment avec le premier tome qui a réussi a beaucoup m'amuser tout en mettant l'accent sur la déconfiture de notre (presque) future société hyper connectée, quoi de plus naturel que d'avoir envie de poursuivre avec le Tome 2 !? le fait est que je n'ai pas eu envie de quitter cet univers complètement azimuté tout de suite ! Je m'y suis sentie tellement bien ! Comme quand j'ai lu, il y a longtemps, la trilogie de Douglas Adams, le guide du routard galactique, qui était complètement loufoque aussi et très drôle… aussi.

Hommes-lézards extraterrestres, complotisme en tout genre, l'auteur s'amuse et nous amuse avec toutes les imbécilités qu'on peut croiser, puissance 10 depuis internet.
Dérèglement climatique, conférences bidons à répétition sur le climat, sexisme, surveillance de tout un chacun, droit à l'oubli, hyper profits et grande pauvreté, les sujets traités sont multiples et tellement actuels. Il est même question d'
Elon Musk ! Oui, oui…
Et comme dans le premier tome, c'est bourré de références à la mythologie, à la SF, au cinéma, à la littérature, et tout ça bien sûr en mode satire sociale pleine d'humour.

Et qui est Kiki, cette personne étonnante, électron libre, totalement anticonformiste ? Kiki Inconnue, comme son nom l'indique, est un mystère… Elle-même cherche les origines de sa naissance.

J'ai encore beaucoup aimé l'incursion dans ce monde où tout n'est que superficialité et stupidité, où les gens se référent continuellement à internet pour savoir quoi faire et quoi penser.

Même si j'ai préféré le premier tome, je me suis beaucoup amusée avec ce second opus. Peut-être un troisième en préparation ??? La fin laisse supposer que c'est possible. J'espère…

Citations :

Page 35 : Certaines personnes sont persuadées que la Terre est creuse, alors qu’elles seules le sont.

 

Page 37 : Je serais donc une machine juive créée par des hommes-lézards extraterrestres et nommée d’après la mère islamique des croyants ?

 

Page 104 : - Les phénomènes météorologiques exceptionnels sont devenus si fréquents qu’on ne peut plus vraiment les qualifier d’exceptionnels.

- OK, OK, mais, mis à part les inondations, l’avancée des déserts, l’extinction des espèces et les conditions météo extrêmes, dit Tony, quels sont les vrais dégâts causés par le changement climatique ?

 

Page 152 : - Je repose donc ma question : cette Troisième Guerre mondiale était-elle bien nécessaire ?

- Eh bien, nos analystes travaillent encore sur les données pour analyser les répercussions de la décision des algorithmes de la Défense, réplique le général Drag Queen. À l’heure actuelle, nous pensons qu’il s’agit d’une cascade d’évènements provoquée par des facteurs déclenchants autonomes et variés, de notre part et de celle de nos adversaires, déclenchés réciproquement par leurs réactions déclenchées par le déclenchement desdits… facteurs déclenchants.

 

Page 272 : - Et si on luttait contre le travail plutôt que contre le chômage ? Demande Peter. Je ne sais pas ce qui est pire : le fait que tant de gens soient au chômage ou que la plupart des actifs aient un boulot de merde qui n’a aucun sens.

 

Page 321 : - Sauf votre respect, Tony, c’est une idée remarquablement stupide que je ne vais en aucun cas mettre dans votre discours. On ne pourrait même pas la placer sur une échelle allant de Trump à Einstein.

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : Quality Land – Marc-Uwe Kling

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Juliette Aubert-Affholder

 

Éditions Actes Sud

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Bienvenue à Quality Land, le pays de tous les superlatifs !
Tu vibres déjà ? Il y a de quoi ! Dans le futur, tout fonctionne à merveille : les algorithmes se chargent d'optimiser le travail, les loisirs et les relations. Quality Partner sait qui te correspond le mieux. Ton véhicule autonome sait où tu veux aller. Et si tu es inscrit sur The Shop, on t'envoie tous les articles que tu désires sans que tu aies besoin de les commander. Super pratique ! Plus personne n'est obligé de prendre des décisions difficiles - car à Quality Land, il n'y a qu'une seule réponse à toutes les questions : OK !
Pourtant, Peter Chômeur est taraudé par l'impression que quelque chose cloche dans sa vie. Si le système est vraiment si parfait, pourquoi trouve-t-on des drones ayant le mal de l'air ou des robots de combat souffrant de stress post- traumatique ? Pourquoi les machines sont-elles de plus en plus humaines et les humains, de plus en plus mécaniques ?
Dystopie réjouissante dans la veine de Kurt Vonnegut et Philip K. Dick, satire drôlissime - et un tout petit peu inquiétante - sur les promesses et les pièges du numérique, Quality Land a déjà conquis plus d'un million de lecteurs à travers le monde.


 

 

Mon avis :
Avant même le commencement de l'histoire, une petite note loufoque m'a dit que j'allais entrer dans un roman facétieux.
C'est complètement barré, c'est drôle et sarcastique, j'ai tout de suite adoré. Tous les travers de notre société superficielle de consommation sont épinglés avec une ironie mordante et jubilatoire. Et tout le monde en prend pour son grade, du plus petit anonyme jusqu'aux hommes politiques qui m'ont bien fait rire.


Marc-Uwe Kling nous entraîne dans cette société régie par les algorithmes, si proche de la nôtre, où ils pousse les aberrations à l'extrême pour le plus grand bien de nos zygomatiques. Dans ce monde tout est noté, jusqu'à notre valeur intrinsèque, et nous place sur une échelle qui va de l'individu inutile niveau 2 qui ne peut que souhaiter s'améliorer, jusqu'à ceux du niveau maximum, le 100 qui est le but à atteindre. Et bien sûr, nous sommes devenus un produit dans ce monde là. L'amour est devenu un produit. le couple est devenu un produit. L'espérance de vie est devenue un produit. Les bébés sont devenus des produit. TOUT, TOUT, TOUT y passe.

Quelques fortes têtes qui n'ont pas l'impression de correspondre à la place et aux désirs qu'on leur a assigné pourraient bien être les grains de sable qui vont enrayer la société parfaite qu'est 
Quality Land.
Tous les personnages sont savoureux, mais j'ai vraiment eu un faible pour Aïcha Femme-Médecin et son langage "fleuri", Peter Chômeur qui paraît complètement blasé, et John of US l'androïde, mais aussi le vieux et Kiki, l'insoumise… et puis les androïdes déglingués, tellement drôles !

Les clients One Kiss reçoivent régulièrement, via The Shop, des choses dont ils rêvent, avant même d'en avoir conscience. Peter Chômeur est souvent étonné de penser qu'il pouvait avoir envie de telle ou telle chose, jusqu'au jour où il reçoit quelque chose qu'il est sur de ne vouloir à aucun prix. Il décide donc de le retourner. Oui mais, plus facile à dire qu'à faire…

L'histoire est ponctuée de punchlines parfois d'une absurdité totale mais d'une drôlerie à tomber par terre.
Que penser d'une dystopie qui nous parle d'un futur tellement proche qu'on y est déjà jusqu'au cou ? Heureusement que l'auteur met en exergue tous les côtés ridicules et pitoyables de ce que nous sommes en train de devenir, ça offre quelques bons moments à se taper des fous rires salutaires.

Mais ce roman n'est pas qu'une grosse rigolade à nos dépens. Il nous instruit sur beaucoup de choses, qui vont de la position des lettres sur un clavier d'ordinateur au fonctionnement des sociétés nouvelles à travers les algorithmes et les publicités ciblées, jusqu'au fait qu'au départ, l'utilisation commerciale d'Internet était strictement interdite. On a aussi droit à un petit topo sur le cynisme du capitalisme. Bon ça, on sait mais personnellement je ne connaissais pas dans le détail. Et puis ça rappelle, des fois qu'on l'oublierait, à quel point on nous prend pour des cons ! Hélas, ça aussi on le sait bien…

 

Citations :

Page 107 : - Vous vouliez peut-être m’explique, dit Aïcha Femme-Médecin, comment vous en êtes venu à croire qu’un problème quelconque de votre insignifiante vie personnelle est plus important que le prochain président à la con de ce putain de pays !

 

Page 141 : « Chers humains, tout le monde parle d’un marché du travail en crise. Mais ce n’est pas une crise qu’on peut surmonter. Traiter les symptômes ne sert à rien. Vouloir le plein emploi est un mensonge. Cela n’arrivera plus jamais. Au contraire : le numérique, l’automatisation et la rationalisation suppriment de plus en plus d’emplois. Dans un autre système économique, ce serait une bénédiction ! Mais, dans le système actuel, tout le monde est forcé de se battre pour des emplois de plus en plus rares. De ce fait, on rétablit des formes d’exploitation et d’oppression qu’on croyait dépassées depuis longtemps.

 

Page 204 : Si le système te vois comme un loser qui passe ses journées à bouffer de la junk food et à regarder des films trash, il te proposera des films trash et t’inondera de publicités pour la junk food. Il te mettra en contact avec une partenaire qu’il classe au même niveau inférieur. Si tu cherches un appartement, il te proposera uniquement les taudis qu’il juge adaptés pour toi et, si tu cherches un emploi, il te cachera les offres pour lesquels il ne te considère pas qualifié.

 

Page 208 : Vivons-nous dans une dictature aux méthodes si subtiles que personne ne remarque que nous vivons dans une dictature ? Il en découle la question suivante : est-ce une dictature si personne ne remarque que c’en est une ?

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : Les douze tribus d’Hattie – Ayana Mathis

Publié le par Fanfan Do

Traduit par François Happe

 

Éditions Gallmeister

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Philadelphie, 1923. La jeune Hattie arrive de Géorgie en compagnie de sa mère et de ses sœurs pour fuir le Sud rural et la ségrégation. Aspirant à une vie nouvelle, forte de l'énergie de ses seize ans, Hattie épouse August. Au fil des années, cinq fils, six filles et une petite-fille naîtront de ce mariage. Douze enfants, douze tribus qui égrèneront leur parcours au fil de l'histoire américaine du XXe siècle. Cette famille se dévoile peu à peu à travers l'existence de ces fils et de ces filles marqués chacun à leur manière par le fort tempérament de leur mère, sa froide combativité et ses secrètes failles. Les Douze Tribus d'Hattie, premier roman éblouissant déjà traduit en seize langues, a bouleversé l'Amérique. Telles les pièces d'un puzzle, ces douze tribus dessinent le portrait en creux d'une mère insaisissable et le parcours d'une nation en devenir.

 

 

Mon avis :
Années 20, le Nord et le Sud des États-Unis, deux endroits totalement différents pour les noirs à cette époque. Hattie, sa mère et ses soeurs quittent le Sud où les noirs doivent raser les murs, pour Philadelphie où leur vie sera plus libre.

À seize ans Hattie épouse August et met au monde des jumeaux, Jubilee et Philadelphia… puis Floyd, puis Six, puis Ruthie, Ella, Alice, Billups, Franklin, Bell, Cassie.
On traverse le siècle au gré de leurs personnalités et de leurs destinées, ainsi que celle de Sala, la fille de Cassie. Et on a là un étonnant panorama de l'Amérique. J'ai eu l'impression d'assister à une énumération des douleurs du monde, comme pour nous rappeler que la vie est une vallée de larmes. L'histoire nous montre que la bonté n'est pas forcément là où elle semble se trouver, que les apparences sont souvent trompeuses.

Hattie est le pilier de sa famille, elle est forte, et même indestructible, mais froide comme la glace. Après le drame vécu dans sa jeunesse il semble que quelque chose en elle se soit brisé, comme prisonnière d'une amertume inextinguible. Je l'ai trouvée absolument pas attachante, sauf peut-être un peu au début. Il y a quelque chose d'effrayant en elle, le cœur rempli de toutes ses déceptions.

Onze enfants dont une paire de jumeaux, une petite-fille, dix chapitres, neuf années différentes. Chaque chapitre sur chaque enfant contient un secret qui se dévoile au fil des pages, des rancœurs, des meurtrissures. On arpente l'Amérique de 1925 à 1980, la ségrégation, le deuil, le patriarcat, l'homosexualité, la misère, la religion, la guerre, l'alcoolisme, les trahisons, et c'est ainsi qu'on découvre peu à peu 
les douze tribus d'Hattie et son long parcours sans joie, celui de ces femmes qui tiennent la famille à bout de bras, elles qui sont la clé de voûte de leur clan.

J'ai dévoré ce roman que j'ai trouvé passionnant mais qui m'a entraînée dans une sombre tristesse, sur le versant sans soleil de la vie.

 

Citations :

Page 49 : Le concert de Floyd commença ponctuellement à 10 heures le lendemain soir, avant que les ivrognes ne deviennent trop bruyants et que toutes les femmes respectables ne soient rentrées chez elles. C’était bien d’avoir des femmes à un concert : plus il y en avait, moins on risquait d’avoir une bagarre.

 

Page 60 : Six n’était pas sûr que la religion fût autre chose qu’un tas de gens pris dans un délire collectif qui se dissipait à l’instant même où ils franchissaient les portes de l’église et se retrouvaient dans la rue.

 

Page 82 : À Philadelphie, il ne voyait des Blancs que très rarement, à l’exception des professeurs de son école. Chez lui, on considérait les Blancs comme une entité vague mais puissante, un peu comme les forces qui contrôlent le temps, des forces qui possèdent un grand pouvoir de destruction, mais demeurent invisibles.

 

Page 224 : Il n’y a pas grand-chose que je pourrais dire que Sissy puisse comprendre – la bière tiède, l’attente, les corvées qu’on accomplit pour occuper le temps, vérifier les mêmes lignes et les mêmes câbles que ceux qu’on a vérifiés la veille et astiquer le bastingage, même s’il n’est pas sale. Autrefois, je pensais qu’il y avait quelque chose de noble dans la discipline, mais maintenant, je me demande si les gradés comprennent qu’il y a des gens qui se font tuer. C’est ridicule, et même indécent, de continuer à laver le même morceau de pont pendant que des hommes sont en train de mourir.

 

Page 265 : elle avait envie de connaître sa mère telle qu’elle la voyait à cet instant, si belle et si heureuse qu’elle faisait pâlir le soleil de l’après-midi en comparaison.

 

Page 291 : Tante Marion a dit que celle qui passait d’un homme à un autre était une femme légère, moi j’ai pensé que c’était une femme libre.

 

Page 310 : Ils ne comprenaient pas que tout l’amour qu’elle avait en elle était accaparé par la nécessité de les nourrir, de les habiller et de les préparer à affronter le monde. Le monde n’aurait pas d’amour à leur offrir ; le monde ne serait pas gentil.

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : Texaco – Patrick Chamoiseau

Publié le par Fanfan Do

Éditions Gallimard - Folio

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

«Une vieille femme câpresse, très grande, très maigre, avec un visage grave, solennel, et des yeux immobiles. Je n'avais jamais perçu autant d'autorité profonde irradier de quelqu'un... Elle mélangeait le créole et le français, le mot vulgaire, le mot précieux, le mot oublié, le mot nouveau...» Et c'est ainsi que Marie-Sophie Laborieux raconte à l'auteur plus de cent cinquante ans d'histoire, d'épopée de la Martinique, depuis les sombres plantations esclavagistes jusqu'au drame contemporain de la conquête des villes.
D'abord, les amours d'Esternome, le «nègre-chien» affranchi, avec la volage Ninon qui périt grillée dans l'explosion de la Montagne Pelée, puis avec Idoménée l'aveugle aux larmes de lumière, qui sera la mère de Marie-Sophie. Dans les temps modernes, Marie-So erre d'un maître à l'autre, au gré de mille et un «djobs» qui l'initient à l'implacable univers urbain. Ses amours sont sans lendemain. Devenue l'âme du quartier Texaco, elle mène la révolte contre les mulâtres de la ville, contre les békés qui veulent s'approprier les terres, contre les programmes de développement qui font le temps-béton.
Patrick Chamoiseau a sans doute écrit, avec Texaco, le grand livre de l'espérance et de l'amertume du peuple antillais, depuis l'horreur des chaînes jusqu'au mensonge de la politique de développement moderne. Il brosse les scènes de la vie quotidienne, les moments historiques, les fables créoles, les poèmes incantatoires, les rêves, les récits satiriques. Monde en ébullition où la souffrance et la joie semblent naître au même instant.


 

 

Mon avis :
150 ans d'histoire de la Martinique racontée à 
Patrick Chamoiseau par Marie-Sophie Laborieux, descendante d'esclaves, fille d'Idoménée la mulâtresse, et d'Esternome Laborieux, esclave affranchi.

Texaco, quartier insalubre qui tient son nom d'une compagnie pétrolière qui a déserté les lieux depuis longtemps. Patrick Chamoiseau nous entraîne dans ce récit avec ce langage très imagé, plein de termes créoles de la Martinique. le dépaysement est là et il faut s'accrocher : "Un jour (je le suppose car nul n'a milané) il lui fit naître du doigt quinze frissons sur la nuque, puis une charge de douceries au mitan plein du ventre (mieux que celles d'un cul de pipe sucé en fin de soleil à l'écoute des crikettes)." Eh ben ça, je n'avais pas compris de quoi il s'agissait? MDR, tant le vocabulaire m'a échappé.
"Ce que mon Esternome entendait par Mentô, j'eus mauvais coeur à l'admettre. Il m'est toujours difficile d'imaginer la Force esclave sur une bitation ;"
Voilà donc le langage étrange auquel il a fallu que je m'habitue.
La langue est belle, mais le texte est difficile et j'ai rarement lu un livre aussi lentement. Ça a été pour moi comme de découvrir un idiome nouveau. Je l'ai néanmoins trouvé très imagé et incroyablement poétique quand il est question de désir charnel.

Békés, békés rouges, blancs-france, mulatres, nèg-de-terre, nèg-d'En-ville, nègres libres, nègres-marrons, nègres-kongo et tant d'autres encore… tous ceux qui vivent sur cette terre de Martinique appartiennent à des catégories différentes et nombreuses avec une sorte de mépris pour celles auxquelles ils n'appartiennent pas.

Alors j'ai mis environ 150 pages à m'habituer au parler de là-bas, mais même à partir de là, j'ai bien ramé pour ne pas perdre le fil. C'est très intéressant d'un point de vue historique et cette poésie à fleur de lignes, appuyée par le créole, est totalement enchanteresse. C'est beau et douloureux. La vie de douleur des martiniquais est racontée avec énormément de grâce et de gravité.
"Il me raconta tout, plusieurs fois, en créole, en français, en silences."
C'est aussi extrêmement révoltant, mais ça hélas, c'est le destin de l'humanité de devoir faire face à beaucoup trop d'injustices.

Les passages qui parlent des livres et de littérature, je les ai trouvés envoûtants, ils font tant de bien !
Et puis il y a des moments très drôles…


Texaco est un roman qui se mérite. Il faut s'accrocher pendant toute la première partie, en tout cas me concernant, mais ensuite j'ai trouvé que ça en valait la peine.
C'est intéressant et instructif de bout en bout, même si l'intérêt, dans mon cas, a souvent suivi une courbe sinusoïdale.
Ce que j'en retiendrai ? La beauté de ce qui est dit, la façon de le dire, plus tout ce que j'ai appris sur la Martinique et que trop souvent les femmes ont une croix bien lourde à porter.

 

Citations :

Page 32 : Ti-Cirique avait déclaré un jour qu’au vu du Larousse illustré, nous étions – en français – une communauté.

 

Page 112 : Husson disait aussi (et c’était dans les rues de Saint-Pierre, dans les hôtels, dans les cellules de l’orphelinat, les vérandas d’habitation, les bureaux sombres des négociants et les milliers de boutiques, un vent soufflant d’hystérie larmoyante) que la liberté des esclaves était décrétée de manière implicite ; que chacun, universellement, hormis l’engeance des femmes, pourrait toucher aux joies des votes électoraux.

 

Page 115 : Lui n’avait qu’une idée, la tenir, la purger, éplucher son corps, dégrapper ses poils, lui téter la langue et tenter de disparaître en elle comme un pêcheur de l’Anse Azérot dans le loup tourbillonnant d’une passe vers miquelon. Il vécut la nuit avec elle selon les lois de ses envies et le programme de son cœur amarré. Il la quitta bien avant l’appel d’un commandeur qui maniait le lambi comme on touche une trompette.

 

Page 137 : On avait retrouvé ma grand-mère aux côtés de la Dame. Morte mais sans aucune blessure. Son cœur simplement décroché de la vie était tombé plus bas, plus loin que ses paupières, bien au-delà des fonds profonds de nos destins.

 

Page 199 : Il perçut des hurlements que des morts n’avaient pas pu pousser, restés blottis en quelque part, et que sa propre douleur déclenchait brusquement.

 

Page 215 : Vieillesse, Marie-Sophie, est comme une lente surprise.

 

Page 242 : La guerre (dont je n’ai nul souvenir) fut départ-en-fanfare et retour-queue-coupée. On partit en chantant, on revint pieds gelés. On partit en riant, on revint sans poumons, gangrené par les gaz. On partit cœur vaillant, on revint lapidé par des bouts de shrapnel. On partit acclamé, on revint sur des quais désertiques, solitaire à boiter vers le silence de sa maison.

 

Page 249 : Pour l’instant, câpresse de boue, je considérais cette merveille : un nègre noir transfiguré mulâtre, transcendé jusqu’au blanc par l’incroyable pouvoir de la belle langue de France.

 

Page 251 : Il me raconta tout, plusieurs fois, en créole, en français, en silences.

 

Page 282 : Bientôt, il fut impossible de voir le monsieur Albéric, même quand Adélina, Sophélise et Thérésa-Marie-Rose y allèrent en personne et qu’elles pièterent devant les entrepôtd où de gros-nègres, les empêchant d’entrer, supportaient stoïquement mes injuriées sur leur manman.

 

Page 307 : Que de misères de femmes derrière les persiennes closes… et même, jusqu’au jour d’aujourd’hui, que de solitudes rêches autour d’un sang qui coule avec un peu de vie… Ô cette mort affrontée au cœur même de sa chair… que de misères de femmes…

 

Page 344 : Je ne sais pas d’où provenait son goût pour le partir, mais ce ne fut pas le seul bougre de Quartier que je rencontrai élu par cette envie – cette envie, cette envie de tout voir, d’éprouver l’impossible, de se sentir disséminé dans l’infini du monde, dans plusieurs langues, dans plusieurs peaux, dans plusieurs yeux, dans la Terre reliée.

 

Page 386 : La seconde fut Sérénus Léoza, une bonne personne, grosse comme une bombe, porteuse de cinq enfants et d’une viande à moitié inutile qui lui figurait l’homme.

 

Page, 396 : Nous échangeâmes durant un temps sans temps, des millions d’injuriades. Il me criait Bôbô, Kannaille, La-peau-sale, Chienne-dalot, Vagabonne, Coucoune-santi-fré, fourmis-cimetière, Bourrique, Femme-folle, Prêl-zombi, Solsouris, Calamité publique, Manawa, Capital-cochonnerie, Biberon de chaude-pisse, Crasse-dalot-sans-balai (il ignorait l’inaltérable barrière qu’instituait mon nom secret)… Moi, je le criais Mabouya-sans-soleil, Chemise-de-nuit mouillée, Isalope-sans-église, Cocosale, Patate-blême-six-semaines, La-peau-manioc-gragé, Alaba, Sauce-mapian, Ti-bouton-agaçant, Agoulou-grand-fale, Alabébétoum, Enfant-de-la-patrie, La crasse-farine… J’en avais autant sur sa manman, avec des dos-bol, des languettes, des patates, des siguines-siguines, des fils téléphone, des kounias, sur son espèce, sur son engeance et sur sa qualité.

 

Page 416 : Comment chercher Michel Eyquiem seigneur de Montaigne dans les halliers du Périgord ? Où rencontrer William Faulkner dans les plantées du sud, madame Marie-Sophie ? Hélas, la France réelle n’est ni Marcel Proust ni Paul Claudel, c’en est la gangue obscure. Et, excusez-moi : Aimé Césaire n’est pas la Martinique… Et pire : lumière et ombre s’entremêlent dans les corps, ainsi Louis-Ferdinand Céline une crapule lumineuse, Hemingway une furie alcoolique, Miller une névrose sexuelle, Pessoa une diffraction psychotique, Rimbaud nègre mais colonialiste dans ses lettres africaines, et… Certains jours, il me parlait des poètes dont la puissance pouvait briser la pierre.

 

Page 419 : De Gaulle lui-même, qui dans notre tête s’était taillé une place de nègre marron.

 

Page 441 : Les juges le voyaient arriver avec inquiétude et disparaissaient dans leur fauteuil qund (ayant épuisé les arcanes juridiques) notre avocatiste invoquait le code suprême des Droits de l’Homme, et les accablait de ses fureurs contre le colonialisme, l’esclavage, l’exploitation de l’homme par l’homme, dénonçait les génocides amérindiens, les complicités bienveillantes dont bénéficiait le Ku Klux Klan, la tuerie de Madagascar, les milliers de morts du chemin de fer du Congo-Océan, les saloperies indochinoises, les tortures algériennes, les tirs de leurs gendarmes dans les grèves agricoles, les frappant à coup de Marx, les effrayant avec Freud, citant Césaire, Damas, Rimbaud, Baudelaire et d’autres poètes que seul Ti-Cirique pouvait identifier.

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : Le Havre Tome 2 – Joyeuses Fêtes - Jean-Blaise Djian- Popopidou - Jay

Publié le par Fanfan Do

Éditions Vagabondages

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Sur le port du havre, il y a un barman de nuit… Il s’appelle Jacques Daniel, et le cent quatre-vingt degrés de son horizon est en train de sombrer comme le mercure dans le thermomètre. Un peu comme la courbe du moral des français face à la crise mondiale… Sa Mimi a disparu et le froid hante les rues. Certains lâcheraient prise et se laisseraient glisser sur la ligne du toboggan des statistiques, mais les fêtes de fin d’année pointent le bout de leur nez…
Et puis il y a ce flic qui a besoin de lui mais qui prend sans jamais rien donner en échange. Jacques Daniel s’en méfie… mais il l‘aime bien aussi. Quelque part, il le considère comme son allié. Mais la vérité de chaque jour n’a désormais plus grand-chose à voir avec celle de la veille, et la parano guette… Notre homme a déjà pas mal trinqué… Cette fois, on est dans le dur : Le béton et la neige, et Jacques fait des rencontres qui vont changer sa perception de l’urbain et de son malheur. D’événements en rencontres, des pièces du puzzle vont apparaître, il faudra juste les mettre en place… Mais que pèse un barman de nuit quand sur l’autre plateau de la balance se trouvent un notable et le plus gros fournisseur d’emploi régional ?


 

 

Mon avis :
L'enquête sur la mort de Juliette Fribourg suit son cours. le lieutenant Grivert mène l'enquête, et met quelqu'un sur la disparition de Mimi, la copine de Jacques. En contrepartie il lui demande d'ouvrir les oreilles quand il est au bar.

Jacques qui a perdu tous ses repères depuis le départ de Mimi apprend à se débrouiller par lui-même, et c'est pas gagné ! Il découvre les joies et les corvées de la vie des femmes.

L'état de déprime de Jacques, les décors et le temps hivernal semblent être en parfaite osmose, le tout très bien rendu par le graphisme très sombre. D'ailleurs quand je pense au Havre, c'est ce que j'ai dans mes souvenirs, la pluie, le froid, la nuit, le rock et le café calva. Et aussi les rencontres impromptues avec des inconnus, avec qui on sympathise et qui créent des liens pendant quelques heures à refaire le monde, comme Jacques qui un soir ouvre sa porte et son esprit…

On en vient à se demander si le départ de Mimi et la mort de Juliette ne sont pas liés…

J'ai aimé cette histoire très sombre, avec quelques éclats de lumière. Mais c'est peut-être aussi parce qu'elle se passe dans cette ville où j'ai tant de souvenirs, et que j'aime pour toujours.

 

Citations :

Page 13 : Ah, qu’elle est loin loin cette époque où Mimi pelait les légumes et cuisait la viande à la poêle ! Bien sûr, c’était un peu le temps des colonies…

 

Page 20 : On le sait, Jacques Daniel traverse une période difficile de sa vie. Il n’est pas à prendre avec des pincettes… Sa façon de l’exprimer culpabiliserait presque un mec qui s’apprête à coucher dehors par une nuit pareille. Un mec qui a conscience d’être devenu un objet de rue pour les êtres humains qui possèdent un compte en banque… Un mec qui reste là, planté comme un nain de jardin dans du 0°…

 

Page 65 : C’est un peu comme si elle ne se rendait même pas compte qu’il est capable de se rendre compte qu’elle le prend pour un con...

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : Le Havre Tome 1 – Au Buveur d’Étoiles – Jean-Blaise Djian – Popopidou - Jay

Publié le par Fanfan Do

Éditions Vagabondages

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Sur le port du Havre, il y a un bar de nuit... "Au buveur d'étoiles" que ça s'appelle. Jacques en est le barman. Fanchon, sa patronne, l'apprécie pour ce qu'il est: un mec fiable et sans problème qui sait se faire respecter tout en convenant à la clientèle.

Et puis il y a ce conte de fées du 20 décembre 2011 au soir. Comme d'habitude, Jacques prend possession des lieux et commence à taffer. Devant des yeux aveugles, tout un film va se dérouler. Un film dont, sur le coup, il ne verra rien. C'est en rentrant chez lui, à l'aube, qu'il va comprendre que toute sa vie vient de basculer… Une jeune femme a été retrouvée morte dans les eaux poisseuses du port… D'évènements en rencontres, il va tenter de comprendre ce qui a pu se passer. Tout s'est pourtant déroulé devant lui, mais dans le désordre, et il n'a rien compris. Tout est trop tard, bien sûr… Mais il va quand-même tenter de reconstituer le puzzle… Un ouragan souffle sur lui et lui, il va tenter de souffler sur l'ouragan.

 

 

Mon avis :
Le Havre, cette ville que j'ai tout d'abord détestée, puis aimée passionnément, puis quittée. Au bout de 12 ans. C'est comme ça les histoires d'amour. Depuis je la cherche à travers les livres, les films parfois…

Le graphisme sombre de Jay sied à merveille à la nuit havraise, aux ombres des noctambules sous la pluie, les bars, l'alcool… pour oublier, se détruire, ou ne pas rester seul.


Jacques Daniel est serveur dans le bar de Fanchon, Au Buveur d'Étoiles. Il travaille la nuit, à l'envers du monde. Il y sert une faune hétéroclite dans une ambiance alcoolisée, enfumée, dépressive, ou violente. Et il écoute. Il écoute les gens qui ont quelque chose à dire, ou pas... c'est son taf, c'est normal.

On retrouve une fille morte dans l'eau du port. Une blonde. Certains l'ont vue, la nuit, dans les bars.

La copine de Jacques est partie en lui laissant un mot. Et lui se sent perdu. Car, outre qu'il tenait à elle, elle faisait tout : le ménage, la lessive, les courses, la bouffe, et tout ça pour pas un radis ! Et lui s'en sent incapable. Merci de le dire mec !!!

J'ai tellement retrouvé 
Le Havre à travers chaque page de cette BD. J'ai scruté les images, l'architecture, le port, l'esprit, tout est là. J'ai énormément aimé la mise en page, parfois juste un dessin, et ce mélange de bulles et de texte.

Je viens de me faire un petit pèlerinage au Havre, via cette histoire sombre. C'est presque comme si j'avais mis un coquillage à mon oreille pour entendre la mer... j'y ai entendu avec, le cri des goélands et des pochtrons en perdition.

Arrivée à la fin, force est de constater que sans le Tome 2 on reste en plan au milieu de l'enquête. Donc, puisque je l'ai, je vais le lire de ce pas !

 

Citations :

Page 43 : Ils ont des réflexions philosophiques sur ce genre de fille, sur la jeunesse d’aujourd’hui, sur le sens de la vie, sur l’éducation parentale, sur la loterie du destin.

 

Page 63 : Jacques sert des jeunes, des vieux, des maquereaux, des forts en gueule, des timides, des flics, des dealers, des vigiles, enfin tout ce qui fait que la société est ce qu’elle est…

 

Page 74 : Jacques aime bien la BD. Tintin, Astérix, Lucky Luke… Les références absolues qui prouvent qu’on en a déjà lues… Il est quand-même étonné de constater qu’il existe plein d’autres titres, d’autres genres etc. Et oui ! La BD est un art en mouvement ! C’est comme les bagnoles, les constructeurs en sortent de nouvelles chaque année. Sauf que les bagnoles, on les voit passer dans les rues. La culture, il faut aller la chercher pour savoir qu’elle existe ! On ne risque rien à le faire ; il n’y a ni miradors ni fils de fer barbelés électrifiés autour… Le seul risque, c’est de s’ouvrir de nouveaux horizons...

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : Des animaux et des dieux – Essai de théologie animaliste – Christian Dellahaye

Publié le par Fanfan Do

Éditions Empreinte Temps Moderne

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Portée par les avancées scientifiques (biologie, génétique, éthologie, médecine…), la question du statut de l’animal fait débat et suscite une prise de conscience générale qui initie des avancées aussi bien dans le domaine juridique et politique que parmi les anthropologues et les philosophes.
Un droit de l’animal émerge tandis que sont mises sur la sellette la majesté d’homo sapiens et sa domination universelle.
Cependant, les religions sont restées à peu près muettes sur ce sujet. L’enquête originale de Christian Delahaye, tout à la fois journalistique et théologique, apporte enfin une réponse religieuse à la question animale.
Il nous entraîne dans un voyage très documenté, riche en références historiques et théologiques, servies par les meilleurs spécialistes et nous fait découvrir que le suprématisme humain n’était inscrit ni dans les religions premières, ni dans la Bible, pas davantage dans le Coran, qu’il s’agit d’une importation gréco-romaine, portée par la dualité du corps et de l’âme, de la chair et de l’esprit, dépourvue de tout substrat évangélique.
Une lumière nouvelle sur les vivants et sur le Vivant.

 

 

Mon avis :
Il y a tant d'animaux qui souffrent partout dans le monde, dans la quasi-indifférence générale, parce que pour la plupart des gens, ce ne sont "que des animaux". Ah putain d'anthropocentrisme ! Pour moi, ils sont ma famille, je vis avec eux et je les aime. Tellement, qu'un jour j'ai décidé que je ne pouvais plus manger aucun animal. Adieu dissonance cognitive !
C'est pour ça que j'ai eu envie de lire ce livre. J'ai voulu comprendre d'où nous venait cette idée que nous sommes les maîtres et possesseurs.

J'ai adoré redécouvrir comment Copernic et 
Galilée ont fait trembler les fondements de l'Église, pourquoi Darwin a fini par remettre en question les théories religieuses, tout en gardant la foi.
L'auteur nous démontre, preuves scientifiques à l'appui, à quel point nous avons tort de penser que notre destin et celui des animaux ne sont pas liés. de plus, ils ne sont séparés de nous que par peu de choses, notamment la capacité à parler. "Les animaux pensent, des animaux créent des catégories, […] des animaux changent de point de vue, […] les animaux apprennent et transmettent leurs connaissances, […] des animaux manifestent de l'empathie, des animaux éprouvent le deuil, […] des animaux sont capables du meilleur comme du pire."
Et que dire des agents infectieux qui ont passé la barrière des espèces pour nous contaminer ? Alors, nous sommes si différents ???
"Homo sapiens n'est qu'une espèce parmi d'autres, explique le président du Muséum d'histoire naturelle de Paris, 
Bruno David" […]
Nous nous croyons tellement au dessus de tout que nous ne pensons pas que nous pourrions bien faire partie de la sixième extinction. Et pourtant…

L'auteur nous emmène dans un voyage à travers temps, depuis l'Antiquité jusqu'à aujourd'hui, pour nous montrer comment nous avons (mal)traité les animaux alors que nous avons toujours vécu avec eux, auprès d'eux, et que nous avons toujours eu besoin d'eux. Nous les avons traité comme des objets alors qu'ils ressentent et qu'ils souffrent. Mais pourquoi ?
Il a fallu attendre 1850 pour qu'un délit de maltraitance voit le jour. Et encore, uniquement celle perpétrée en public. Pourtant la corrida perdure, tout comme la chasse à courre et tant d'autres abjections, avec la bénédiction de nos dirigeants, insensibles à la souffrance animale et à notre propre dignité.

J'ai appris beaucoup de choses avec cette lecture, comme par exemple que le pythagorisme avait ouvert la voie à la métempsychose, ou bien encore que le catholicisme emprunte, plus que je ne l'aurais cru, au paganisme et que Jésus en personne mettait tous les vivants sur un pied d'égalité.
L'auteur énumère des philosophes comme l'anthropocentré 
Descartes et sa sinistre thèse mécaniste (Grrrrr), SpinozaVoltaire, Rousseau, KantSchopenhauer, qui eux avaient des thèses qui nous reliaient aux animaux, ou cet obscurantiste malfaisant de père Nicolas Malebranche qui prétendait que les animaux mangent sans plaisir et crient sans douleur, et Claude Bernard ce médecin borné qui disséquait des animaux vivant et sans anesthésie.
Une interrogation m'est venue quand j'ai appris que l'Église avait adhéré aux théories de 
Descartes. Comment peut-on être cartésien et croire en Dieu ???
Loin de m'avoir calmée, cette lecture édifiante à confirmé ma rage contre tous ceux qui se cachent derrière la "croyance aussi absurde qu'arrogante en une hiérarchie de la création."
Mais il y a de l'espoir, notamment grâce aux associations de défense des animaux, qui avancent pas à pas et gagnent du terrain pour faire valoir leurs droits, portées par l'opinion publique.

Je pense comme 
Kant : On peut déjà juger du coeur d'un homme au traitement qu'il réserve aux animaux.
Et je crois en ce dicton qui dit que, qui n'aime pas les bêtes n'aime pas les gens. Et je suis convaincue que quelqu'un qui peut faire du mal à un animal est quelqu'un de potentiellement dangereux.

Loué soit Darwin d'avoir permis à l'humanité une nouvelle approche, scientifique, de l'animalité, de l'incohérence que représente la discrimination envers les animaux, et d'avoir ouvert bien des yeux, même si ceux des différentes religions restent fermés. Et pourtant, à l'origine, Dieu avait fait de tous les êtres des végétariens, "clé d'une relation privilégiée entre les vivants"[…] "Dans la Genèse 1 et 2, l'homme ne tuait ni ne mangeait l'animal’’ […]
Pourtant, les hommes haïront le serpent, rendu responsable de leur déchéance, s'adonneront aux sacrifices d'animaux pour plaire à Dieu, en totale contradiction avec les écrits bibliques de la création.
En fait, il semble que dans l'ancien et le nouveau testament, on trouve tout et son contraire… ou pas. Euh… c'est compliqué ! Mais comment les hommes peuvent-ils s'y retrouver et ainsi parvenir à endiguer leur désirs de violence ? En fait, soit Dieu est versatile, soit les gardiens de la foi sont des escrocs.
[…]"chrétien ou musulman, l'homme reste la créature qui entend dominer toutes les autres et les exclut de ses privilèges."
La palme d'or du mépris envers la vie animale revient au christianisme qui est la religion la plus anthropocentrique au monde (et la plus sexiste soit dit en passant), ancrée dans son obscurantisme et faisant usage de la censure jusque dans les années 1900. 
François D'Assise, lui, est resté incompris et tant d'autres après lui, théologiens et ecclésiastiques, qui ont été muselés car l'Église catholique se doit d'être immuable… ou pas. Merci Pie XII d'avoir amorcé le changement !!! Et Paul VI, et surtout Karol Wojtyla qui, sous le nom de Jean-Paul II, a incorporé les animaux parmi "les enfants de Dieu." Hélas, après eux, bof bof et retour en arrière…

Cet ouvrage très documenté est foisonnant d'éclaircissements et passionnant de bout en bout. Ce qu'il raconte est révoltant.

Merci 
Editions Empreinte temps présent et Babelio pour l'envoi de ce livre extrêmement intéressant.

 

Citations :

Page 9 : Avec un temps de retard, les juristes suivent les scientifiques dans ce travail de révision qui chamboule les dogmes. Un longue marche juridique a commencé au XIXe siècle, qui fait émerger peu à peu la reconnaissance des droits animaux. Le statut de l’animal passe d’objet à sujet. S’y inscrit dans la loi un respect des animaux qui n’est pas séparé du respect des hommes : les droits accordés aux premiers ne sont pas retirés aux seconds, car le souci de l’animal ne diminue en rien le souci de l’homme, il crée un nouveau droit en enrichissant l’ancien.

 

Page 10 : Certains ‘hésitent plus à qualifier de génocide, le fait que 60 milliards d’animaux terrestres et 1000 milliards d’animaux marins soient mangés chaque année par les hommes – à tout le moins un zoocide.

 

Page 18 : Darwin se chargea de porter le coup de grâce à l’antique illusion anthropocentrique en théorisant que l’homme, déjà expulsé du centre de l’univers, n’était plus le sommet du vivant, mais qu’il évoluait parmi les autres organismes. Dans son livre De l’origine des espèces, il émit l’idée qu’il n’existe aucune différence de nature entre les humains et les animaux, mais que, tout au contraire, un continuum les relie depuis quelque 250 millions d’années. Grâce à Darwin, résume Régis Debray, l’homme découvre qu’il est partie intégrante et non surplombante de la vie de la nature, il se croyait au-dessus et il se découvre au-dedans.

 

Page 29 : Dans l’histoire biologique, ce n’est certes pas la première fois qu’un agent infectieux effectue un saut entre l’animal et l’homme : la peste, la tuberculose, la grippe espagnole, la brucellose, la rage et, plus récemment, le VIH, l’ESB, EBOLA, le SARS 1, le MERS-CoV, le MERS-like sont autant de zoonoses, c’est à dire de pathologies transmises à l’homme depuis un réservoir animal, via une autre espèce animale. Mais c’est la première fois que les ravages du mal submergent avec une telle magnitude, la médecine, l’économie, la vie sociale, la création artistique sur tous les continents, jusqu’à contraindre à la claustration plus de la moitié de l’humanité.

 

Page 63 : Chez l’animal, nous voyons la volonté de vivre en quelque sorte plus à découvert que chez l’homme. Il faut être aveugle, ajoutera-t-il, pour ne pas s’apercevoir que l’animal est par essence absolument ce que nous sommes et que la différence réside seulement dans l’intellect, non dans la substance, c’est-à-dire la volonté.

 

Page 64 : Derrida dénonce le spécisme inhérent à un humanisme brutal qui donne tous les droits à l’homme et les refuse tous à toutes les autres espèces.

 

Page 103 : Malebranche a rédigé des pages que Descartes, inventeur de l’animal-machine, n’avait pas osé écrire : Dans les animaux, il n’y a ni intelligence ni âme, comme on l’entend ordinairement. Ils mangent sans plaisir, ils crient sans douleur, ils croissent sans le savoir, ils ne désirent rien, ils ne craignent rien, ils ne connaissent rien ; et s’ils agissent d’une manière qui marque l’intelligence, c’est que Dieu les ayant faits pour les conserver, il a formé leur corps de telle façon qu’ils évitent machinalement et sans crainte tout ce qui est capable de les détruire.

 

Page 136 : Dès 1979, Jean-Paul II déclare que la protection animale est une éthique chrétienne ; deux ans plus tard, il félicite une association d’assistante de s’occuper de nos frères les plus petits.

 

Page 143 : En quoi le bien fait à un être non-humain serait-il préjudiciable à l’être humain ? En quoi l’antispécisme serait-il un antihumaniste ?

 

Page 143 : Tant pis pour l’Évangile et l’exhortation christique d’aller prêcher le Royaume à toutes les créatures, selon la finale de l’Évangile de Marc. Cette exhortation, François d’Assise l’avait actée. François de Buenos Aires, tout en empruntant au Poverello son nom, le titre de son encyclique et quelques bonnes paroles, s’assied doctement sur elle, sur le trône de la majesté humaine. L’étau qui s’était desserré autour de l’animal s’est à nouveau serré.

 

Page 147 : Après tout, la reconnaissance de liens fraternels entre l’homme et l’animal représente déjà, en soi, une évolution remarquable. Elle fonde un code moral. Elle invente en quelque sorte un nouveau commandement : on ne tue pas son frère, on ne sacrifie pas son frère pour plaire à Dieu, on ne le mange pas, on ne le dissèque pas vivant, on ne lui fait pas subir des expérimentations pour le bien de son grand frère humain, on ne lui inflige pas des conditions de vie contraires à son bien-être dans le seul but de dégager des bénéfices financiers.

 

 

 

Voir les commentaires

Mon avis : L’été où tout a fondu – Tiffany McDaniel

Publié le par Fanfan Do

Traduit par François Happe

 

Éditions Gallmeister

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Été 1984 à Breathed, Ohio. Hanté par la lutte entre le bien et le mal, le procureur Autopsy Bliss publie une annonce dans le journal local : il invite le diable à venir lui rendre visite. Le lendemain, son fils Fielding découvre un jeune garçon à la peau noire et aux yeux d’un vert intense, planté devant le tribunal, qui se présente comme le diable en personne. Cet enfant à l’âme meurtrie, heureux d’être enfin le bienvenu quelque part, serait-il vraiment l’incarnation du mal ? Dubitatifs, les adultes le croient en fugue d’une des fermes voisines, et le shérif lance son enquête. Se produisent alors des événements étranges qui affectent tous les habitants de Breathed, tandis qu’une vague de chaleur infernale frappe la petite ville.
Porté par une écriture incandescente, L’Été où tout a fondu raconte la quête d’une innocence perdue et vient confirmer le talent exceptionnel d’une romancière à l’imaginaire flamboyant.

 

 

Mon avis :
J'avais adoré Betty et l'écriture sublime de Tiffany McDaniel, alors évidemment j'ai eu envie de découvrir son roman suivant. Et je dois dire que dès la première (demie) page, mon petit cœur s'est senti enveloppé, avec délice, de soyeuses volutes de poésie.

Pourtant, après quelques pages, mon intérêt a eu un peu de mal à décoller.

 

Une bigote qui perd subitement la foi, son fils qui doute de la force du Bien contre le Mal, tel est le point de départ de ce roman. Le narrateur est Fielding, treize ans, le fils de cet homme, Autopsy Bliss, qui a un jour invité le Diable à se présenter. Et il s'est présenté ! C'était un enfant de treize ans, noir, aux yeux verts. Évidemment personne n'a cru qu'il était ce qu'il prétendait être. Pourtant il a semblé parfois doué de prescience. Assez rapidement des événements étranges vont se produire.

 

Alors que l'histoire se passe en 1984, je n'ai pas réussi à voir autre chose que les années 50. De la tenue vestimentaire du père, de la mère, qui ne sort jamais par peur de la pluie et qui donc tient sa maison en parfaite femme au foyer, en passant par la bigoterie et les descriptions de la ville comme des gens, je n'ai absolument pas vu les années 80. Ni même dans le futur avec les années 2050 quand le narrateur, devenu vieux, poursuit dans ses souvenirs.

 

On passe sans cesse et sans transition de 1984 aux années 2050 avec Fielding devenu un vieil homme aigri et bourré de remords, qui n'a plus posé le pied sur le sol de l'Ohio depuis soixante-dix ans, et la question est : pourquoi ? 

La curiosité m'a fait poursuivre ma lecture mais hélas j'ai peiné à m'immerger dans l'histoire. Je suis restée un peu en dehors sans parvenir à m'intéresser à l'intrigue malgré les questions qui m'ont taraudée. Qui est Sal ? Pourquoi Fielding est-il devenu un vieil homme triste et seul ?

Pourtant j'ai aimé tous les membres de la famille Bliss. Généreux, bienveillants, équilibrés à part la mère et son étrange phobie de la pluie même en pleine sécheresse. Mais tous ont ouvert leurs bras à Sal, faisant de lui le cinquième membre de la famille.

 

On se trouve au cœur de cette Amérique bigote, raciste et homophobe. Les bien-pensants prêts à lyncher un enfant noir car tout le monde prétend avoir vu quelque chose que personne n'a vu. C'est fascinant et effrayant. Cette petite ville a son fanatique, le fauteur de troubles Elohim, dont le nom est une des appellations de Dieu et qui harangue les fidèles. Serait-il déterminé par le nom qu'il porte ?

 

En fait, mon intérêt pour ce roman a été en dents de scie. Par moments j'ai été captivée, puis je me suis ennuyée, parce que trop lent à mon goût. Et puis à partir de la moitié du roman j'ai été très émue, parfois attristée, mais conquise. Car c'est une belle histoire d'amours. Amour familial, immense amour fraternel, amour pour son prochain, et aussi de cette forme d'amour qu'est l'amitié, au milieu de l'intolérance, de l'obscurantisme et de la haine aveugle qui cherche quelqu'un à punir pour ses malheurs ou simplement pour ses convictions. Et puis parfois l'amour fait qu'on meurtrit profondément, bêtement, maladroitement, ceux qu'on aime le plus.

 

Avec cette histoire Tiffany McDaniel nous rappelle que la vie est un long chemin semé d'embûches, que trop souvent ce qui est perdu l'est pour toujours, que le mal est partout et, fréquemment, pas où on l'attend.

Ni la quatrième de couverture ni même le début du roman ne m'avaient préparée à ce que j'allais trouver dans ce récit. Au fond, c'est l'histoire de la vie, des familles, des lieux, des gens et leurs tragédies, de la violence du monde et celle cachée derrière les murs, de l'Amérique profonde... et un peu du Moyen-âge qui perdure chez certains. Tiffany McDaniel nous emmène tout doucement vers un dénouement tragique. C'est beau et douloureux, laid parfois et tellement triste.

 

 

Citations :

Page 13 : Autopsy est un prénom des plus étranges pour un homme, mais sa mère était aussi une femme des plus étranges dans sa religiosité, une femme qui utilisait la Bible comme un stéthoscope avec lequel elle écoutait battre le pouls du diable dans le monde qui l’entourait.

 

Page 24 : Ce que je viens de décrire, c’est la ville que j’ai dans le cœur, pas forcément la ville elle-même, dont la face cachée savait composer avec la boue. Comme dans n’importe quelle petite ville ou n’importe quelle grande métropole, des femmes et des hommes savaient crier. Des chiens se faisaient battre, des enfants aussi.

 

Page 55 : Mais si un homme décide de tuer un serpent qui ne représente aucune menace, c’est très révélateur de son état d’esprit.

 

Page 72 : - D’abord on a perdu le mot nè… (Le shérif s’est interrompu avant de finir le mot, son regard passant de Papa à Sal.) On a perdu le mot qui commence par un n, et maintenant v’la qu’on perd le mot nabot. Bientôt on pourra plus dire que les gens sont moches. Faudra dire qu’ils ont un physique imparfait, ou un truc politiquement correct comme ça.

 

Page 123 : Maman avait raison. La chaleur poussait les gens à se comporter en fonction de ce qu’ils avaient de plus mauvais en eux. Peut-être même qu’elle leur donnait la confiance nécessaire pour agir de manière stupide et irréfléchie sans raison valable.

 

Page 134 : Parfois, la seule chose à faire est de fuir cette existence, en espérant qu’après cette fuite on nous épargnera un jugement trop sévère à propos de cette mort.

 

Page 164 : Les gens demandent souvent, pourquoi Dieu permet-Il que la souffrance existe ? Pourquoi permet-Il qu’un enfant soit battu ? Qu’une femme pleure ? Qu’un holocauste soit commis ? Qu’un brave chien meure dans de telles souffrances ? La vérité est toute simple : Il veut voir par Lui-même ce que nous allons faire. Il a planté la chandelle, Il a posté le diable à la mèche et maintenant, Il veut voir si nous l’éteignons en soufflant dessus ou bien si nous la laissons brûler jusqu’au bout. Dieu est le plus grand spectateur de la souffrance qui puisse exister.

 

Page 182 : Parfois je me dis que les frères aînés ne devraient pas être permis. On tombe trop facilement amoureux d’eux. Ils sont tout pour nous et pendant ce temps, ils souffrent dans leur coin pour être à la hauteur de nos attentes.

 

Page 259 : Nous étions tous à haut risque. Cette canicule provoquait des palpitations, des fièvres, des choses dont on n’arrivait pas à se libérer. Elle agissait comme le parfait révélateur de toute douleur, de toute frustration, de toute colère, de toute perte. Elle faisait tout remonter à la surface, elle faisait tout transpirer.

 

Page 272 : Je ne veux pas que tu sois gay. Je ne veux pas que tu sois heureux, et non, ce n’est pas bien que tu aies envie d’être avec un homme. Pédé. N’est-ce pas ce que ce mot est censé vouloir dire ? Pédé ?

 

 

 

Voir les commentaires