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non-fiction

Mon avis : Les femmes sont occupées – Samira El Ayachi

Publié le par Fanfan Do

Éditions de L’Aube

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Découvrant sa nouvelle condition de « maman solo », la narratrice jongle avec sa solitude sociale, sa solitude existentielle, et s'interroge sur les liens invisibles entre batailles intimes et batailles collectives - entre deux machines à faire tourner, une couche à changer, une thèse à finir et une pièce de théâtre à monter.

 

«Puissant, bouleversant… et drôle ! » Nancy Huston

«Furieusement cathartique ! » Zoé Courtois, Le Monde des livres

«Un des romans les plus enthousiasmants de la rentrée ! » Hubert Artus, Causette

«Un livre engagé à l'écriture ciselée.» Marianne Bliman, Les Échos

«Un livre dévoré au prix d'un sommeil raccourci !» La Croix du Nord

 

 

Mon avis :
Tout de suite je me suis dit "Ohlala mais qu'est-ce que c'est beau ! Et tellement ça ! Qu'est-ce qui est beau ? La façon de décrire l'après rupture, juste après. Tous les sentiments qui passent, l'envie de tout balayer, de tout changer, jusqu'à soi-même. Se transformer en nouvelle personne pour repartir vers l'avenir, un autre avenir que celui qu'on s'était fabriqué en quelques années, avec une personne qui n'est plus là.
Car que faire de sa douleur abyssale, noire, gluante ? Qui a quitté l'autre ? Peu importe. le vide est là, absolu. Avec un deuil à faire, celui d'une vie à deux. Sauf que là, c'était pas à deux mais à trois, avec un Petit Chose.

La vie monoparentale et ses déboires... La culpabilité maternelle, l'impression de ne pas être à la hauteur, de ne pas faire ce qu'il faut, comme il faut. Être presque gênée de travailler et d'être mère en même temps. Les rapports homme-femme sont tellement bien décrits que ça en est déprimant. La vie des femmes est déprimante. Si on la décortique... Pourtant, je ne voudrais pas être un homme. Mais quand-même, j'ai eu l'impression de lire une suite de galères liées au statut de femme. Pourtant, je les connais. Mais de les lire, c'est pas pareil, c'est pire.

Les pères qui oublient leur droit de garde des enfants, qui ne les prennent pas un week-end sur deux, ça existe. Certaines préfèrent, d'autres le vivent mal. C'est le cas de l'autrice qui peine à reprendre son souffle, qui n'est plus que mère. Adieu les soirées entre copines, les moments égoïstes à glander, seule.

J'ai trouvé pas mal de points de convergence avec le fond de ma pensée, notamment le plus violent pour moi, pourquoi avoir fait des enfants dans ce monde là...
L'autrice pointe sur tout ce qui ne va pas pour les femmes dans notre société. Il y a de quoi faire. Et alors que j'ai par moments pensé que 
Samira El Ayachi noircissait un peu le tableau, j'ai repensé à la naissance de ma fille. J'avais gardé la surprise, je ne voulais pas savoir avant, et quand on m'a annoncé que c'était une fille, ma première pensée, où bien l'ai-je dit à voix haute je ne sais plus, "La pauvre, elle va en chier toute sa vie". C'est dire le ressenti sur ma propre vie... On entend tellement de conneries dans une vie de femme, de la petite enfance à l'âge adulte, sur nos capacités, notre intelligence, le rôle qu'on doit tenir, ce qu'on doit faire et ne pas faire, dire et surtout ne pas dire, les métiers pour nous et ceux qu'on ne devrait pas exercer, nos comportements, l'alcool, le tabac, notre vocabulaire... Ah mais je m'emporte ! Il est surtout question ici des Mamans solo et du poids que la société fait peser sur leurs épaules, mais jamais sur celles des pères divorcés...
Alors oui, il fallait bien en parler de la difficulté d'être femme dans un monde fait par les hommes et pour les hommes.

Il y a des moments drôle, mais un peu grinçant quand-même. Ben oui, pas le choix !
Il y a aussi du bon, du doux, car comme dit l'autrice, "Avoir un enfant, c'est rentrer dans la ronde." Eh oui ! Je suis bien d'accord !!
Et puis c'est beau. Il y a tant de poésie dans ces mots qui parlent de peine et du chemin de croix, vers la guérison, ou peut-être plutôt vers la révélation à soi-même.

 

Citations :

Page 14 : Cette histoire n’en finissait pas. Elle n’en finissait pas de mourir dans vos bras.Vous n’étiez plus que deux loques qui se croisent dans un appartement aux murs gris et qui ne s’embrassent plus jamais.

 

Page 41 : Impossible de savoir combien de vies tu mènes de front : 1) il y a la femme qui se bat le jour ; 2) celle qui se noie la nuit ; 3) celle qui découvre au pied du mur le métier improbable de maman ; 4) celle qui apprend à nager en se noyant ; 5) celle qui n’est pas encore arrivée, mais qui — tu l’espères — se pointera bientôt pour voler au secours de toutes les autres : la superwoman en toi.

 

Page 61 : Dans ta tête c’est clair. Dans le corps des jours, c’est autre chose. Tu luttes contre toi-même. La tentation est grande de te laisser couler dans le flux du jour. Il y a des costumes tout prêts et des étiquettes prédécoupées. La mère bonne. La mère dévouée. La mère courage. La mère courge. Les autres, c’est entendu. Toutes des égoïstes ou des salopes.

 

Page 139 : « Je-ne-suis-pas-mère-célibataire, je suis une cheffe de famille comme tout le monde. Cheffe à part entière, cheffe comme toi, papa. Alors arrêtez de me regarder comme s’il me manquait une jambe. Je ne suis pas mère célibataire, je suis une mère autonome ! Merde ! »

 

Page 167 : Arrive toujours un moment où une mère attrape son téléphone et prend des nouvelles. Il y a toujours un moment où l'inquiétude arrive comme un gros nuage au-dessus de sa cervelle en surchauffe. C'est ça dont se coupent l'époque et les hommes : le partage des inquiétudes, le soin apporté à l'autre.

 

 

 

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Mon avis : Les mille et une vies de Billy Milligan – Daniel Keyes

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Jean-Pierre Carasso

 

Éditions Calmann-Lévy

 

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Quatrième de couverture :

Quand la police de l'Ohio arrête l'auteur présumé de trois, voire quatre viols de jeunes femmes, elle croit tenir un cas facile : les victimes reconnaissent formellement le coupable, et celui-ci possède chez lui la totalité de ce qui leur a été volé. Pourtant, ce dernier nie farouchement. Ou bien il reconnaît les vols, mais pas les viols. Son étrange comportement amène ses avocats commis d'office à demander une expertise psychiatrique. Et c'est ainsi que tout commence…
On découvre que William Stanley Milligan possède ce que l'on appelle une personnalité multiple, une affection psychologique très rare qui fait de lui un être littéralement « éclaté » en plusieurs personnes différentes qui tour à tour habitent son corps. Il y a là Arthur, un Londonien raffiné, cultivé, plutôt méprisant, et puis Ragen, un Yougoslave brutal d'une force prodigieuse, expert en armes à feu. Et bien d’autres. En tout, vingt-quatre personnalités d'âge, de caractère, et même de sexe différents.
L'affaire Billy Milligan a fait la une des journaux américains, fascinés par ce cas et par la lutte qu’ont menée les psychiatres et Billy lui-même pour essayer de « fusionner » en un seul individu ses 24 personnalités. Quant au livre, construit comme un véritable drame shakespearien, il est le résultat de mois et de mois de rencontres et d'entretiens entre Daniel Keyes et… Ragen, Arthur, Allen et les autres. Une lecture absolument fascinante, bientôt adaptée au cinéma par Joel Schumacher (Chute libre, Phone Game.)
"... un thriller psychologique absolument fascinant" Publishers Weekly


 

 

Mon avis :
Dans les années 70, dans l'Ohio des femmes sont enlevées et violées. Billy Milligan est arrêté mais il nie, contre toute évidence. On finit par découvrir qu'il possède une personnalité multiple. En tout vingt-quatre personnalités d'âges, de nationalités, de caractères, et même de sexes différents habitent cet homme, toutes à l'insu de Billy.
C'est terriblement angoissant et je pense que si c'était un roman ça le serait moins. le fait que cet homme existe, que d'autres comme lui existent, c'est terrifiant. Au tout début du livre je me suis demandé si on pouvait guérir de ça, en espérant que je le saurai à la fin.

Tantôt tremblant et le regard dans le vide, tantôt sûr de lui, d'un moment à l'autre, toujours après une sorte de transe, les enquêteurs se retrouvent devant une personne totalement différente de l'instant d'avant. Dorothy Turner, la psychologue, va soudain se trouver devant ce cas incroyable extrêmement déstabilisant. C'est réellement un choc de découvrir qu'elle parle successivement à David puis à Arthur, Christopher, Tommy, Ragen, Allen, Danny, Christine et tous les autres... car Billy dort mais pas les autres.

En réalité Billy est une victime. Il a subi de la maltraitance et s'est réfugié à l'intérieur de lui-même. Tous les autres habitants de son cerveau ont une fonction précise, tous ont pour but de le protéger. C'est fascinant. Et donc, en plus de nous exposer sous toutes les facettes cet incroyable cas on comprend rapidement qu'il est la conséquence de la violence extrême de certains adultes. Ou plutôt la multiplicité des personnes qui l'habitent résulte des sévices qu'il a subi, bien qu'il y ait eu à l'origine, avant même les agressions, quelque chose d'étrange dans la personnalité de Billy, comme une prédisposition.


Daniel Keyes nous convie à des entretiens entre Billy et les psychiatres puis reprend sa vie depuis le début et nous permet d'assister aux métamorphoses qui s'opèrent entre tous les occupants de sa psyché. J'ai trouvé ça très visuel et on en vient à douter de sa raison en croyant qu'une telle chose est possible. L'instinct de survie prend parfois d'étranges chemins pour éviter le suicide ou l'automutilation.

Le cerveau de Billy m'a fait l'effet d'un microcosme, d'une famille nombreuse où il est indispensable d'établir des règles pour éviter de passer pour fou. le pire c'est que je les visualisais, en plein conseil de famille.
J'ai trouvé qu'il y avait un côté science fiction dans cette histoire folle, où les personnages se succèdent sans toujours comprendre où ils sont.

Alors que, s'il s'agissait d'un roman on se dirait que l'auteur exagère et que ce n'est pas crédible du tout, ce qui est totalement stupéfiant c'est que cette histoire est réelle ! Billy Milligan, éclaté en vingt-quatre personnes très différentes les unes des autres, est un personnage réel. Entre Ragen le yougoslave communiste hargneux et Arthur l'anglais hautain et snob, il y a toute une palette de ce que l'humanité peut présenter de caractères différents. Chaque personne qui l'habite est un trait de caractère, comme la colère, la douceur, le cynisme, l'empathie, la naïveté, l'intelligence, l'immoralité, les différents stades de l'enfance... C'est impressionnant ! Mais surtout, comment ne pas devenir complètement fou tant ça semble terrifiant de vivre ça !?
Ce qui saute aux yeux, entre autre, c'est que le tribunal médiatique ne date pas d'aujourd'hui ni des réseaux sociaux.
Bien que ce soit un témoignage, ce parcours de vie est écrit comme un roman, ce qui rend l'histoire d'autant plus immersive. Hélas, j'y ai trouvé quelques longueurs, je me suis parfois ennuyée. Et pourtant, c'est fascinant.

 

Citations :

Page 48 : — Je peux parler à Billy ? S’enquiert Judy.

Ah non ! On le fait dormir. S’il se trouvait sous le projecteur, il se tuerait.

Pourquoi ?

Il est fou de terreur à l’idée d’avoir mal. Et il ne sait rien sur nous, tous les autres. Tout ce qu’il sait c’est qu’à certains moments, il perd le temps.

Qu’est-ce que ça veut dire « perdre le temps » ? interroge Judy.

C’est la même chose pour nous tous. On est quelque part, en train de faire quelque chose. Puis on est ailleurs et on a la sensation du temps qui a passé, mais sans avoir idée de ce qui est arrivé pendant ce temps.

 

Page 83 : Le docteur Harding se rend compte qu’il ne prend sans doute pas assez d’initiatives avec Milligan. Le docteur Wilbur lui a recommandé de chercher à établir le plus vite possible le nombre de personnalités qui cohabitent en lui et leur identité : il faut encourager chacune d’elles à expliquer les raisons de son existence afin de leur permettre de revivre les circonstances particulières qui ont présidé à leur surgissement.

 

Page 192 : Billy aimait les fleurs et la poésie et il aidait spontanément sa mère à la maison. Mais à force d’être traité de « femmelette » et de « petite pédale » par son beau-père, il renonça aux travaux ménagers et cessa d’écrire des poèmes. « Adalana » prit sa place en secret.

 

Page 249 : — Dieu a été inventé par ceux que l’inconnu effraie, rétorqua Arthur. Les gens adorent des figures mythiques comme Jésus-Christ pour échapper à la terreur de ce qui arrivera après la mort.

 

Page 450 : 410 hommes décrétés fous criminels hantent les couloirs sans fin de cette géhenne oubliée de Dieu. La fureur me prend quand je songe que l’État a le culot d’appeler ça un hôpital. L’hôpital d’État de Lima.

 

 

 

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Mon avis : Récits d’Ellis Island : histoires d’errance et d’espoir – Georges Perec avec Robert Bober

Publié le par Fanfan Do

Éditions P.O.L

 

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Quatrième de couverture :

De 1892 à 1924, près de seize millions d'émigrants en provenance d'Europe sont passés par Ellis Island, un îlot de quelques hectares où avait été aménagé un centre de transit, tout près de la statue de la Liberté, à New York.
Parce qu'ils se sentaient directement concernés, par ce que fut ce gigantesque exil, Georges Pérec et Robert Bober ont, dans un film " Récits d'Ellis Island, histoires d'errance et d'espoir ", INA, 1979, décrit ce qui restait alors de ce lieu unique, et recueilli les traces de plus en plus rares qui demeurent dans la mémoire de ceux qui, au début du siècle, ont accompli ce voyage sans retour.
Notre livre se compose de trois grandes parties principales : La première restitue, à travers une visite à Ellis Island et à l'aide de textes et de documents ce que fut la vie quotidienne sur ce que certains appelèrent " l'île des larmes ".
Dans la deuxième, " Description d'un chemin ", Georges Pérec évoque sa relation personnelle avec les thèmes de la disparition et de l'identité. La troisième, " Mémoires ", reprend les témoignages d'hommes et de femmes qui, enfants, sont passés par Ellis Island et racontent leur attente, leur espoir, leur rêves, leur insertion dans la vie américaine.


 

 

Mon avis :
Il s'agit là du livre d'un film tourné en 1979 et édité en DVD par l'Institut national de l'Audiovisuel. Je croyais emprunter à la médiathèque un autre livre de 
Georges Perec intitulé Ellis Island tout simplement et je me suis retrouvée avec celui-ci. Et c'est tant mieux car ça m'a énormément plu. Il y a des textes pour nous raconter l'histoire de ce lieu où tant de gens sont passés, mais aussi beaucoup de photos d'époque qui ajoutent quelque chose de très émouvant qui nous fait toucher du doigt cette étape de la vie de ceux qui tentèrent leur chance aux États-Unis.

Quelque chose me fait rêver depuis toujours dans l'évocation de cet îlot minuscule car il représente l'arrivée dans le Nouveau Monde et le rêve américain. Pourtant bien des miséreux sont arrivés là pleins d'espoir et finalement ont continué une vie de misère. D'ailleurs, dans toutes les langues 
Ellis Island était surnommée l'île des larmes. C'est passionnant, on apprend l'histoire de l'île et comment elle est devenue le centre d'accueil des émigrants et pourquoi peu à peu les conditions d'entrée dans le pays se durcirent mais aussi de quelle façon nombre d'émigrants changèrent de nom à Ellis Island pour des noms à consonance américaine.

Lieu d'espoirs et de désespoir, où tant de suicides ont eu lieu, où le pourcentage des refoulés est minime mais représente une grande quantité de personnes tant le nombre d'émigrants était important.
Des questionnaires à la chaîne, des individus soupçonnés de maladie donc en attente, seize millions passés par 
Ellis Island en trente ans.

Georges Perec semble être venue chercher là des réponses à sa judéité, lui qui n'a pas connu la terre ni la langue de ses parents, du peuple juif, presque toujours voué à l'exode.

Le livre est divisé en cinq parties. La première, "L'île des larmes", raconte l'histoire d'
Ellis Island.
La deuxième, "Description d'un chemin", le nombre d'immigrants de chaque origine ainsi que les noms des bateaux qui les amenèrent et de quel port, les 
lieux d'arrivée, en fait le long chemin avant, pendant et après, accompagnée de nombreuses photos.
La troisième, "Album", des photos, très belles, très parlantes.
La quatrième, "Repérages", une liste de noms de gens, de 
lieux, de nourritures, que pour ma part j'ai passé rapidement.
La cinquième, "Mémoires", contient les témoignages de onze personnes, arrivées entre 1909 et 1928, la plupart dans l'enfance. Les auteurs ont choisi d'interroger les Italiens et les Juifs Russes ou d'Europe Centrale, parce que ce sont eux qui sont le plus massivement concernés par 
Ellis Island et parce qu'ils s'en sentaient plus proches. Dans ces témoignages on ressent très fort l'espérance que représentait l'Amérique. Pourtant, certains témoignages malmènent un peu le rêve américain. C'est aussi l'histoire intemporelle de l'humanité : s'exiler dans l'espoir d'une vie meilleure.

 

Citations :

Page 16 : Par ailleurs, beaucoup d’émigrants souhaitaient avoir des noms qui fasse américains. De là vient que d’innombrables histoires de changement de noms eurent lieu à Ellis Island : un homme venu de Berlin fut nommé Berliner, un autre prénommé Vladimir reçut comme prénom Walter, un autre prénommé Adam eut pour nom Adams, un Skyzertski devint Sanders, un Goldenblum devint Goldberg tandis qu’un Gold devenait Goldstein.

 

Page 36 : […] ce n’est jamais, je crois, par hasard, que l’on va aujourd’hui visiter Ellis Island. Ceux qui y sont passés n’ont guère eu envie d’y revenir. Leurs enfants ou leurs petits-enfants y retournent pour eux, viennent y chercher une trace : ce qui fut pour les uns un lieu d’épreuves et d’incertitudes est devenu pour les autres un lieu de leur mémoire, un des lieux autour duquel s’articule la relation qui les unit à leur mémoire.

 

Page 133 : Nous avions peur de tout et nous étions vraiment affamés. Mon mati avait deux frères en Amérique et il m’a dit : « J’ai leur adresse. Ils m’ont déjà écrit des lettres. Ils travaillent là-bas, ils gagnent leur vie, ils sont libres. Je veux aller en Amérique. Nous sommes jeunes tous les deux, allons-y. »

 

Page 134 : Nous avons mis vingt et un jours pour arriver en Amérique, vous pouvez vous imaginer dans quelles conditions ! Eh bien, quand nous avons débarqué, nous nous attendions à découvrir un monde différent, mais ce que nous avons découvert, c’est Ellis Island, une grande salle avec des barreaux d’acier aux fenêtres, une prison.

 

Page 153 : G.P. : Est-ce que vous pensez que votre vie aurait été différente si vous étiez restée en Italie ?

Mme C. : Non… Je n’aurais pas aimé… L’Italie ne me plait plus. Il y a trop de communistes là-bas, trop de choses qui ne me plaisent pas. Ici c’est un pays libre. God bless America ! C’est tout.

 

 

 

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Mon avis : Marseille, porte du Sud – Albert Londres

Publié le par Fanfan Do

Éditions Payot

 

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Quatrième de couverture :

Marseille, Albert Londres ne faisait qu'y passer lorsqu'il embarquait en reportage. En 1926, il décide de s'y poser pour saisir l'âme d'une ville-monde ouverte sur l'ailleurs. Ode à la gloire du Vieux-Port et de la Canebière, du quartier Noailles où se croisent toutes les immigrations, de la Grande Jetée et du célèbre bassin de la Joliette, des docks et du phare du Planier, son livre est un éloge du cosmopolitisme et de la diversité humaine, de l'énergie, de la fierté des Marseillais - et une formidable invitation au voyage : «Faites votre choix, ici on embarque pour toutes les mers ! »

 

Albert Londres (1884-1932) est le père du grand reportage moderne. Il considérait que la mission du journaliste était de « prêter une voix à ceux qui n’ont pas le droit de parler ».


 

 

Mon avis :
Au premier chapitre 
Albert Londres fait De Marseille la narratrice de sa propre histoire et aussitôt je me suis sentie propulsée à travers le monde, vers toutes les destinations qu'offre le port de cette ville immense et cosmopolite.
Marseille est un voyage en elle-même : "Gravissez les coupées de mes bateaux. Je vous conduirai vers toutes les merveilles des hommes et de la nature. Je mène à Fez, aux Pyramides, au Bosphore, à l'acropole, aux murailles de Jérusalem. Je mène aux temples indous du Sud au Tadj Mahall, à Angkor, à la baie d'Along et même jusqu'à Enoshima." Alger. Tunis. Suez. Djibouti. Zanzibar. La Réunion. Colombo. Java. Sydney. Nouméa. Papeete…
Pour moi ce livre a les senteurs de l'enfance, quand je rêvais de pirates, de voyages au long cours, tel Marius du fond du bar de la Marine sur le vieux port.
Ce livre nous fait sentir que Marseille est une porte ouverte sur le monde. C'est une superbe invitation au voyage, quasi onirique.
Mais moi qui ai vécu à Marseille, ce n'est pas tout à fait ce que je vois. le monde a changé, les voyages lointains en avion ont remplacé les bateaux. Pourtant je viens de faire un beau voyage, dans le passé, en un tout petit chapitre.

Puis on traverse l'Italie, les territoires arabes, la Grèce, le Congo, le Sénégal, juste en changeant de quartier. On peut acheter les journaux de tous les pays.
Marseille, plate-forme d'où toutes les marchandises possibles et imaginables, et même désolantes, partent, ou arrivent de partout dans le monde. Car c'est le Marseille de 1926 qui est décrit ici, époque où on pouvait trouver des éléphants aux pattes entravées sur le port. C'est aussi une époque où il était plus facile de traverser tous les pays, car ils n'étaient pas tous en furie comme aujourd'hui. C'est en tout cas ce qu'on ressent à travers le récit d'
Albert Londres.

En 128 pages on parcours les nombreux quartiers de la cité phocéenne et on fait le tour du monde sans jamais la quitter. 
Albert Londres nous raconte cette ville particulière avec souvent un ton facétieux quand il est question des gens, qu'ils soient d'ici ou de passage. Et puis il nous narre des anecdotes, comme celle du détatoueur, que je n'ai pas très bien comprise, oups ! J'ai cependant été un peu dubitative, voire gênée, par des idées, des termes utilisés dans ce texte, qui ne sont plus du tout acceptés à notre époque car jugés insultants par certaines catégories de personnes, à juste titre à mon avis.

Histoire de Marseille autant que de toutes les ethnies qui la peuplent, leurs origines et leurs destins, ce petit livre est une invitation au voyage. On imagine les différents pays et on perçoit leurs senteurs. Il y a aussi hélas déjà la "guerre" silencieuse de l'opium et tant d'autres maux inhérents aux cités portuaires.
Marseille, carte postale de 1926, belle et sordide à la fois.

À la fin, je me suis demandé, Marseille, ville de voyages, est-elle féminine ou est-il masculin ? Car j'en parle au féminin au début, et au masculin à la fin, sans qu'aucune des deux possibilités ne me choquent.

"Allez à Marseille. Marseille vous répondra. Cette ville est une leçon. L'indifférence coupable des contemporains ne l'a désarme pas. Attentive, elle écoute la voix du vaste monde et, forte de son expérience, elle engage, en notre nom, la conversation avec la terre entière.
Une oriflamme claquant au vent sur l'infini de l'horizon, voilà Marseille."

 

Citations :

Page 12 : Je te ferai sentir la chaleur mortelle ; entendre les vents des déserts ; observer toutes les religions. Peut-être te montrerai-je un typhon. Je suis le port de Marseille. C’est moi qui te parle. Vois mes bateaux qui s’en vont…

 

Page 35 : La circulation à Marseille est régie par une loi unique : « toute voiture doit, par tous les moyens, dépasser la voiture qui la précède. » On se croirait au temps des cochers verts et des cochers bleus de Constantinople. C’est une course de chars. Qui arrivera premier et déclenchera l’enthousiasme populaire ?

 

Page 61 : Il a économisé son passage piastre à piastre. Il était ?…

— … commis boucher d’agneaux.

C’est honorable. Mais quel bourreau ! Combien de bêlants petits agneaux n’a-t-il pas dû décapiter pour gagner de quoi être émigrant. Il vaut mieux ne pas y songer.

 

Page 91 : L’opium n’est pas la coco. Il est vraiment de plusieurs classes au-dessus. La coco est un peu « trottoir ». L’opium est demeuré « salon ». Le trafiquant qui opère dans un vil milieu reste un trafiquant ; s’il sert des hommes qui comptent il devient un fournisseur. Une dignité s’attache à son négoce.

 

Page 124 : Qu’un pays soit à dis jours de nos côtes, aussitôt plus personne ne sait si le pays est en Asie, en Afrique, ou en Amérique. Donnons l’ordre à cent étudiants de partir sans délai pour la Grande Comore, et nous en verrons cinquante prendre le train à la gare Montparnasse !

Sommes-nous donc une nation enfermée dans ses montagnes ?

La France a une vue magnifique sur tout le reste du monde. Mais nous regardons pousser nos betteraves !

L’Anglais se sent grand et marche comme s’il était l’envoyé spécial de Dieu sur la terre parce qu’il porte son regard au-delà de son île.

Au-delà de nos côtes, nous possédons le deuxième empire de la terre.

On ne s’en douterait pas !

 

 

 

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Mon avis : Dis-moi pourquoi les chats… - Véronique Aïache

Publié le par Fanfan Do

Éditions Trédaniel

 

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Quatrième de couverture :

Dis-moi pourquoi les chats sont-ils les compagnons

préférés des médiums ? Pourquoi adorent-ils s’étaler

sur les claviers d’ordinateur ? Pourquoi étaient-ils

emmurés vivants dans les maisons du Moyen-Âge ?

Pourquoi préfèrent-ils le salé au sucré ?

 

Qu’ils soient de campagne, de gouttière ou de salon, d’hier ou d’aujourd’hui, les chats demeurent pour leurs amis humains la plus énigmatique des petites merveilles animales. Reste à savoir qui de leur Histoire ou de leur génétique explique le plus de mystères ? Qui de leurs ronrons ou de leur désinvolture éveille le plus notre curiosité ? Pour y répondre, ce livre ne se contente pas de visiter un monde fait de tendresse et d’improbables. À destination des ailurophiles actuels ou à venir, il révèle sous forme de questions/réponses les secrets de fabrication de la plus légendaire des espèces félines.


 

 

Mon avis :
J'ai eu la chance de recevoir mon choix préféré lors de la dernière édition Masse Critique organisée par Babelio. Je vis avec quatre chats, ou peut-être que je vis chez eux mais j'aime à penser qu'on est colocs même si c'est moi qui paie tout. En contrepartie ils me font plein de câlins et de ronrons en m'apportant de la zénitude et de l'amour.

Donc, l'idée de découvrir les secrets des matous m'enchantait, car je voue une adoration totale à mes petits poilus. Et j'ai bien raison car après lecture de cet ouvrage, j'ai la confirmation que les félins sont des petites merveilles de la nature.
Ce livre est découpé en quatre parties.
Première partie : du côté de la génétique. Et là on apprend, entre autre, que nos chats sont champions d'équilibrisme grâce à un corps absolument parfait, qu'ils sont gauchers ou droitiers et là je peux dire que je vais les observer de près pour voir ça de mes yeux 👀, que les chats noirs sont en meilleure santé, que les félins font de l'automédication par le ronron...
Deuxième partie : du côté du comportement. Alors bon, qui vit avec eux en connaît un rayon. À cohabiter avec eux on a fini par être de la même famille et forcément on les comprend. D'ailleurs je vais envisager de prendre des cours de "destressage" félin auprès d'eux, il paraît qu'ils excellent dans ce domaine qui consiste à faire retomber leur stress, alors que moi... Néanmoins pour ceux qui adoptent leur premier chat, ce livre pourra les aider à éviter des erreurs. Car les chats sont des petites personnes sensibles, faciles à comprendre pour peu qu'on ait décrypté les messages qu'ils nous font passer, comme par exemple : y'a trop de bruit, je cherche une connerie à faire, je veux des câlins, je suis content, je t'aime, je ne suis pas d'humeur, lâche-moi les baskets j'ai pas envie d'être touché, etc... Après tout, le consentement ça vaut aussi pour les animaux !
Troisième partie : du côté de l'étrange. Des choses insolites nous sont rapportées, comme les cat's eyes sur les bords des routes britanniques, ou la capacité des chats de neutraliser des nœuds de courants électromagnétiques, mais aussi gardiens métaphysiques de l'harmonie spirituelle pour les médiums, et pourquoi ils ont neuf vies, et le feng shui...
Quatrième partie : du côté de l'histoire. Là malheureusement on apprend que les chats n'ont pas toujours été à la fête, même en Égypte. Ils ont servi de remèdes dans beaucoup de pays. En France, au Moyen-âge, on sait à quel point les chats noirs (mais pas que) ont été exterminés à cause de ces arriérés d'ecclésiastiques.
Cette dernière partie évoque essentiellement ce que les humains ont fait subir aux chats de tous temps, et j'ai détesté lire ça. La cruauté liée à la bêtise dont l'humanité est capable est affligeante. Mais merci la nature, la peste à vengé les chats au Moyen-âge.

Ce livre est une mine d'informations, j'adore ! Par contre, sur la nécessité de laver son chat une fois par mois... je ne m'y risquerai pas.

Donc, si comme moi on vit avec des fauves miniatures depuis de nombreuses années, cet ouvrage est intéressant pour l'aspect génétique car on apprend des choses étonnantes. Sur le comportement on apprend le pourquoi de certains aspects sale gosse de nos petites merveilles comme quand ils jettent les objets par terre, mais aussi pourquoi ils aiment le silence, pourquoi ils marchent parfois en crabe... J'ai aussi été détrompée sur des comportements que je croyais avoir compris et en réalité mal interprétés, qui me laissent cependant perplexe sur certains de mes chats. Sur l'étrange, eh bien... les chats sont étranges, mais pas tant que ça pour qui les aime et les comprend, mais ils sont fascinants sans aucun doute. L'histoire est la partie dont je me serais bien passée. Trop cruelle...

Après cette lecture, nos nyctalopes adorés n'auront plus de secrets (ou si peu) pour les ailurophiles dont je fais partie. Ah oui, j'ai découvert un mot !! Oui, je suis une vraie de vraie ailurophile ! En plus de mes quatre chats, j'ai plein de statuettes de chats, et dans la rue je parle aux chats que je ne connais pas.
En tout cas, en rentrant, je vais sûrement m'adresser à mes matous avec déférence tant j'ai le sentiment (confirmé par ce livre) qu'ils sont des petits êtres supérieurs et qu'un jour ils domineront le monde ;D et le monde s'en portera bien mieux XD.

 

Citations :

Page 8 : Pourquoi regarde-t-elle parfois dans le vide avec tant d’insistance ? Pourquoi ses ancêtres étaient-ils déifiés au temps des Égyptiens ? Pourquoi pianote-t-elle sur moi en ronronnant ? Pourquoi les chats sont-ils les compagnons préférés des médiums ? Pourquoi le mien dort-il souvent avec une patte sur les yeux ? Pourquoi la sérénité féline est-elle à ce point contagieuse ? Pourquoi… ? Pourquoi… ?

 

Page 30 : N’oublions-pas que le chat est un éternel enfant, un animal dit « néoténique ». Cela signifie qu’il conserve toute sa vie ses caractéristiques juvéniles comme le jeu, le ronron et le patounage.

 

Page 54 : Qu’il soit de race ou de gouttière, sauvage de son état ou monarque de salon, un chat reste avant tout un chat. Un animal fidèle aux lois de la nature. Un petit compagnon hors du commun qui n’a pas fini de nous surprendre.

 

Page 70 : Notre petit compagnon de vie n’a pas volé sa réputation d’animal « le plus propre de la Création ». Il consacre environ un tiers de son temps d’éveil à faire sa toilette et s’y livre chaque fois comme un homme pieux peut le faire lors de ses rituels de purification.

 

Page 77 : Tous les yeux félins parlent de douceur et de mystères, d’élégance et de profondeur. Ils expriment à la fois la même sagesse et la même vivacité. Ils traduisent la force de leur identité et la noblesse de leur caractère.

 

Page 90 : Petits êtres libres par excellence, les chats ont fait de l’insoumission un véritable art de vivre. Résolument attachants bien qu’impossibles à attacher, tout porte à croire qu’ils portent en eux les gènes de la solitude. Celle qui, au risque de sembler égoïstes et dédaigneux, les monte au pinacle de l’indépendance. Et pourtant, il suffit un tant soit peu de les connaître pour se rendre compte rapidement qu’ils se lient sincèrement à leurs pairs comme aux membres de toute autre espèce. Ils savent mieux que quiconque trouver l’équilibre parfait entre la vie en groupe et les instants de solitude.

 

 

 

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Mon avis : Mission Antarctique – Dominique Serafini et Paul Watson

Publié le par Fanfan Do

Publié par Sea Shepherd Conservation Society

 

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Quatrième de couverture :

MISSION ANTARCTIQUE est un reportage dessiné inspiré par les missions réelles menées par le capitaine Paul WATSON et l'équipe des volontaires de l'organisation SEA SHEPHERD. Le récit suit les actions des membres de SEA SHEPHERD et leur combat pour sauver les baleines pourchassées dans le sanctuaire de l'Antarctique par les baleiniers japonais. Le récit commence par la naissance d'un baleineau dans un lagon de l'océan indien et se poursuit au long de sa migration jusque dans les eaux glacées de l'Antarctique.
MISSION ANTARCTIQUE est un récit qui informe les jeunes lecteurs sur la vie des baleines, ces géants, dont l'avenir dépend d'un groupe de volontaires animés du désir de les protéger des harponneurs japonais, qui, loin des yeux du public, continuent à tuer les baleines sous des prétextes pseudo scientifiques.
Le personnage principal est le capitaine PAUL WATSON, l'un des membres fondateurs de GREENPEACE, une organisation qu'il a quitté pour pouvoir mener, avec SEA SHEPHERD, des combats plus radicaux contre les braconniers qui pillent les ressources naturelles de la planète. Ses premières actions se sont déroulées sur la banquise du Canada contre les tueurs de bébés phoques. PAUL WATSON n'est pas un héros de papier ni un écologiste de salon. Il ne dispose pas de pouvoirs surnaturels. Entouré d'un groupe de volontaires internationaux, il ne craint pas d'engager ses équipes et ses bateaux dans un combat très dangereux contre les tueurs de phoques, les baleiniers, les coupeurs d'ailerons de requins et les trafiquants d'ivoire en Afrique.
Pour créer ce récit, DOMINIQUE SERAFINI a quitté son voilier et a repris sa planche à dessin et ses pinceaux. Après avoir navigué à bord de la Calypso avec le commandant Cousteau pour réaliser la fameuse série "L'Aventure de l’Équipe Cousteau", il repart à l'aventure, armé de ses carnets de croquis, avec l'équipe de SEA SHEPHERD.
www.seashepherd.fr

 

 

Mon avis :
Le capitaine 
Paul Watson, un homme que j'admire, a voué sa vie à la sauvegarde de tout ce qui est important pour la survie de l'humanité. Il se bat contre tous ceux qui pillent la nature, au risque de sa vie, jour après jour. Mais son vrai credo est son amour des animaux. Cette bande dessinée nous raconte un pan de son combat, celui où il fait barrage aux baleiniers japonais.

À chaque fois que j'apprends quelque chose d'essentiel sur la marche du monde, comme dans ce livre, je suis partagée entre l'envie de pleurer ou de hurler tant le fric est le grand maître de l'univers. Peu importe que nous courions à la catastrophe par la cupidité d'une poignée d'hommes hauts placés, rien n'est fait pour endiguer le désastre car ces gens doivent croire que l'argent les protégera de tout. Et les gouvernements s'en foutent ou sont carrément partie prenante.

Ce livre ne raconte pas que l'histoire de 
Paul Watson et sa mission en Antarctique contre les bateaux-usines japonais. Ça nous parle des mammifères marins et donne des informations très intéressantes sur ces animaux. C'est paraît-il une BD jeunesse, donc je dois être très jeune car j'ai adoré et j'ai appris des choses, sur la faune, sur les écosystèmes, sur la bêtise humaine (non, ça je le savais déjà), sur la catastrophe annoncée. Ou du moins ça m'a remis tout ça en mémoire. Il faut savoir qu'il n'y a pas que la chasse qui est destructrice pour les mammifères marins. Il y a aussi tous les bruits liés à l'activité humaine qui les perturbent énormément et parfois les tuent. Car le monde du silence comme l'appelait le commandant Cousteau, n'est pas du tout silencieux, bien au contraire.

Paul Watson, grand défenseur de la nature, est considéré par beaucoup comme un pirate. N'avons-nous pas nous-même un ministre qui a inventé le terme d'écoterroristes pour qualifier des gens qui se battent pour sauver ce qui doit l'être ? Alors que les vrais pirates, les vrais terroristes, ce sont les pilleurs de la nature. Les multinationales, les gouvernements, tous ceux qui s'en mettent plein les poches, au détriment de notre avenir.

 

Citations :

Page 24 : Le massacre s’est accéléré avec l’invention du harpon explosif et la motorisation des navires. Les baleines n’ont plus aucune chance d’échapper aux harponneurs, et, en moins d’un siècle, les baleines ont presque disparu.

En 1986, un moratoire a été signé pour stopper la chasse. Mais les Islandais, les Norvégiens et les Japonais refusent de respecter ce pacte international et ils continuent de chasser illégalement.

 

Page 35 : Les équipes de SEA SHEPHERD sont composées de volontaires non armés. Les baleiniers japonais sont équipés de canons à eau glacée à haute pression. SEA SHEPHERD lutte dans le monde entier pour sauver les espèces protégées contre des braconniers lourdement armés et financés par des compagnies internationales et des gouvernements.

 

Page 38 : Les pinnipèdes comme les phoques sont aussi des mammifères marins. Les mammifères sont des êtres assez proches des êtres humains qui pourtant, les massacrent sans scrupules.

 

Page 43 : Il existe de nombreux témoignages d’interactions magiques entre humains, dauphins et baleines. Nous avons beaucoup à apprendre d’eux.

 

 

 

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Mon avis : Les mots immigrés – Erik Orsenna et Bernard Cerquiglini

Publié le par Fanfan Do

Éditions Le Livre de Poche

 

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Quatrième de couverture :

Et si les mots immigrés, c’est-à-dire la quasi-totalité des mots de notre langue, décidaient de se mettre un beau jour en grève ? De prendre la parole, et de nous raconter leur histoire ? Notre histoire, donc. Ce jour-là, les apôtres de la pureté nationale deviendraient muets. Il n’est pas interdit de rêver
Par la voie du conte, ouverte avec La grammaire est une chanson douce, Erik Orsenna rend vivante l’histoire de la langue française. Bernard Cerquiglini lui apporte ses lumières aussi incontestées que malicieuses. Il n’existe aucun mot « de souche », nous rappelle ce récit savoureux et nécessaire.


 

 

Mon avis :
J'ai entendu parler de ce livre sur 
France Inter et j'ai trouvé l'émission passionnante. le français est une langue vivante, donc vouée à évoluer en permanence. Je suis généralement furieuse contre ceux qui refusent la féminisation des noms de métiers, comme autrice, sous prétexte que ce n'est pas beau ou pas français. Ah bon ? Donc ce livre est fait pour tous les coincés dans leurs certitudes, les ayatollahs de la langue, dont je fais parfois partie, sauf que moi c'est sur les pléonasmes que je bloque comme par exemple "au jour d'aujourd'hui" Grrr que c'est laid, mais surtout les andouilles qui pensent qu'il ne faut pas toucher au français (oups pardon Papa)… ceux qui détestent les néologismes.
Un livre qui va nous apprendre qu'il y a peu de mots réellement français dans notre belle langue ? Et voilà que j'étais partie pour une aventure enrichissante et peut-être un petit tour du monde dans ma langue natale.

Partant d'un principe discutable : la France aux français, les deux auteurs nous emmènent sur les traces de notre belle langue afin de nous démontrer qu'il s'agit avant tout de mélanges, d'emprunts et surtout d'échanges.
C'est présenté sous forme de roman, où les mots sont des personnages ainsi que les langues. Des personnages qui râlent, qui se mettent en grève, et surtout qui nous racontent l'origine des mots tout en nous faisant un petit cours d'histoire au passage. Et je dois dire que ça casse un peu ce que l'on croyait savoir de nos réalités erronées.

J'ai beaucoup aimé, bien que parfois j'ai eu quelques difficultés à suivre les raisonnements que j'avais sous les yeux. C'est sans doute le défaut de ceux qui connaissent trop bien leur sujet. Il est tellement évident pour eux qu'il oublient parfois de nous montrer clairement le chemin qu'ils nous tracent, car chaque détail peut être obscur pour les profanes. Naaaaan, en vrai c'est super bien fait, avec humour !!! Il y a trop Longtemps que j'ai quitté l'école et je ne suis plus habituée à suivre… XD

Depuis l'enfance où on m'a dit que nos ancêtres étaient les gaulois, je me suis demandé quelle langue ils parlaient. Puis les francs, d'où nous tirons notre nom sont arrivés, ils ne parlaient pas le gaulois, ni le gallo-romain, ni le latin, mais le francique qui était une langue germanique… Et puis le grec. Et puis l'arabe. Et puis l'italien. Et puis, et puis, et puis… ce livre nous apprend des quantités de choses incroyables sur l'origine de notre langue et de nos connaissances, j'ai adoré !

On voit bien, au passage, que tout n'est que croisement et mélanges, du plus petit détail de nos vies - le vin, les vêtements par exemple - jusqu'aux technologies, et surtout la langue, et cela depuis toujours. On pourrait appeler ça échanges de bons procédés, non ?

 

Citations :

Page 18 : Belle occasion de réaffirmer ce que tout le monde devrait savoir : ce ne sont pas les mots, les bavards, mais seulement toutes ces bouches qui les moulinent du matin jusqu’au soir et à tort et à travers !

 

Page 35 : Nous n’en pouvons plus de ces caricatures ! Nous, Gaulois, n’étions pas de gros imbéciles vivant dans des huttes et ne pensant qu’à bouffer des sangliers ! Figurez-vous que nous habitions de belles maisons dont la charpente en bois était la plus moderne de l’époque. Nous étions d’habiles commerçants, nous parcourions les chemins sur des chars plus solides et confortables que ceux des romains.

 

Page 67 : L’Académie française est fondée en 1635, et chargée de « donner des règles certaines à notre langue pour la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences ». Pour ce faire, elle va travailler à un dictionnaire du français « correct ». Bientôt fourmillent les grammairiens ! Vaugelas, suivi d’une cohorte d’imitateurs et de commentateurs, établit les règles du bon usage. Mais après quelques décennies de passion pour les règles, l’envie de nouveauté revient. On la sent chez Molière, attentif aux parlers des paysans, des servantes, des Précieuses, d’un pseudo-Grand Turc…

 

Page 75 : Nous avons longuement évoqué l’arabe ; mais impossible de passer sous silence l’apport de l’hébreu (cidre, manne, scandale), de l’espagnol (hâbleur, escamoter, paëlla, matador), avec ce chef-d’œuvre qu’est la cédille, « petit z » (comment, en restant poli, prononcer sans elle « malfaçon »?), ou le portugais (caramel, fétiche, marmelade), et le russe (cosaque, oukase, steppe). Et puis les autres langues slaves, car la meringue est polonaise, le robot tchèque, le vampire serbe…

 

Page 79 : Dans le courrier des internautes, une interrogation revenait, de plus en plus insistante : les mots, à la différence des humains, circulent-ils librement ?

 

 

 

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Mon avis : Des animaux et des dieux – Essai de théologie animaliste – Christian Dellahaye

Publié le par Fanfan Do

Éditions Empreinte Temps Moderne

 

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Quatrième de couverture :

Portée par les avancées scientifiques (biologie, génétique, éthologie, médecine…), la question du statut de l’animal fait débat et suscite une prise de conscience générale qui initie des avancées aussi bien dans le domaine juridique et politique que parmi les anthropologues et les philosophes.
Un droit de l’animal émerge tandis que sont mises sur la sellette la majesté d’homo sapiens et sa domination universelle.
Cependant, les religions sont restées à peu près muettes sur ce sujet. L’enquête originale de Christian Delahaye, tout à la fois journalistique et théologique, apporte enfin une réponse religieuse à la question animale.
Il nous entraîne dans un voyage très documenté, riche en références historiques et théologiques, servies par les meilleurs spécialistes et nous fait découvrir que le suprématisme humain n’était inscrit ni dans les religions premières, ni dans la Bible, pas davantage dans le Coran, qu’il s’agit d’une importation gréco-romaine, portée par la dualité du corps et de l’âme, de la chair et de l’esprit, dépourvue de tout substrat évangélique.
Une lumière nouvelle sur les vivants et sur le Vivant.

 

 

Mon avis :
Il y a tant d'animaux qui souffrent partout dans le monde, dans la quasi-indifférence générale, parce que pour la plupart des gens, ce ne sont "que des animaux". Ah putain d'anthropocentrisme ! Pour moi, ils sont ma famille, je vis avec eux et je les aime. Tellement, qu'un jour j'ai décidé que je ne pouvais plus manger aucun animal. Adieu dissonance cognitive !
C'est pour ça que j'ai eu envie de lire ce livre. J'ai voulu comprendre d'où nous venait cette idée que nous sommes les maîtres et possesseurs.

J'ai adoré redécouvrir comment Copernic et 
Galilée ont fait trembler les fondements de l'Église, pourquoi Darwin a fini par remettre en question les théories religieuses, tout en gardant la foi.
L'auteur nous démontre, preuves scientifiques à l'appui, à quel point nous avons tort de penser que notre destin et celui des animaux ne sont pas liés. de plus, ils ne sont séparés de nous que par peu de choses, notamment la capacité à parler. "Les animaux pensent, des animaux créent des catégories, […] des animaux changent de point de vue, […] les animaux apprennent et transmettent leurs connaissances, […] des animaux manifestent de l'empathie, des animaux éprouvent le deuil, […] des animaux sont capables du meilleur comme du pire."
Et que dire des agents infectieux qui ont passé la barrière des espèces pour nous contaminer ? Alors, nous sommes si différents ???
"Homo sapiens n'est qu'une espèce parmi d'autres, explique le président du Muséum d'histoire naturelle de Paris, 
Bruno David" […]
Nous nous croyons tellement au dessus de tout que nous ne pensons pas que nous pourrions bien faire partie de la sixième extinction. Et pourtant…

L'auteur nous emmène dans un voyage à travers temps, depuis l'Antiquité jusqu'à aujourd'hui, pour nous montrer comment nous avons (mal)traité les animaux alors que nous avons toujours vécu avec eux, auprès d'eux, et que nous avons toujours eu besoin d'eux. Nous les avons traité comme des objets alors qu'ils ressentent et qu'ils souffrent. Mais pourquoi ?
Il a fallu attendre 1850 pour qu'un délit de maltraitance voit le jour. Et encore, uniquement celle perpétrée en public. Pourtant la corrida perdure, tout comme la chasse à courre et tant d'autres abjections, avec la bénédiction de nos dirigeants, insensibles à la souffrance animale et à notre propre dignité.

J'ai appris beaucoup de choses avec cette lecture, comme par exemple que le pythagorisme avait ouvert la voie à la métempsychose, ou bien encore que le catholicisme emprunte, plus que je ne l'aurais cru, au paganisme et que Jésus en personne mettait tous les vivants sur un pied d'égalité.
L'auteur énumère des philosophes comme l'anthropocentré 
Descartes et sa sinistre thèse mécaniste (Grrrrr), SpinozaVoltaire, Rousseau, KantSchopenhauer, qui eux avaient des thèses qui nous reliaient aux animaux, ou cet obscurantiste malfaisant de père Nicolas Malebranche qui prétendait que les animaux mangent sans plaisir et crient sans douleur, et Claude Bernard ce médecin borné qui disséquait des animaux vivant et sans anesthésie.
Une interrogation m'est venue quand j'ai appris que l'Église avait adhéré aux théories de 
Descartes. Comment peut-on être cartésien et croire en Dieu ???
Loin de m'avoir calmée, cette lecture édifiante à confirmé ma rage contre tous ceux qui se cachent derrière la "croyance aussi absurde qu'arrogante en une hiérarchie de la création."
Mais il y a de l'espoir, notamment grâce aux associations de défense des animaux, qui avancent pas à pas et gagnent du terrain pour faire valoir leurs droits, portées par l'opinion publique.

Je pense comme 
Kant : On peut déjà juger du coeur d'un homme au traitement qu'il réserve aux animaux.
Et je crois en ce dicton qui dit que, qui n'aime pas les bêtes n'aime pas les gens. Et je suis convaincue que quelqu'un qui peut faire du mal à un animal est quelqu'un de potentiellement dangereux.

Loué soit Darwin d'avoir permis à l'humanité une nouvelle approche, scientifique, de l'animalité, de l'incohérence que représente la discrimination envers les animaux, et d'avoir ouvert bien des yeux, même si ceux des différentes religions restent fermés. Et pourtant, à l'origine, Dieu avait fait de tous les êtres des végétariens, "clé d'une relation privilégiée entre les vivants"[…] "Dans la Genèse 1 et 2, l'homme ne tuait ni ne mangeait l'animal’’ […]
Pourtant, les hommes haïront le serpent, rendu responsable de leur déchéance, s'adonneront aux sacrifices d'animaux pour plaire à Dieu, en totale contradiction avec les écrits bibliques de la création.
En fait, il semble que dans l'ancien et le nouveau testament, on trouve tout et son contraire… ou pas. Euh… c'est compliqué ! Mais comment les hommes peuvent-ils s'y retrouver et ainsi parvenir à endiguer leur désirs de violence ? En fait, soit Dieu est versatile, soit les gardiens de la foi sont des escrocs.
[…]"chrétien ou musulman, l'homme reste la créature qui entend dominer toutes les autres et les exclut de ses privilèges."
La palme d'or du mépris envers la vie animale revient au christianisme qui est la religion la plus anthropocentrique au monde (et la plus sexiste soit dit en passant), ancrée dans son obscurantisme et faisant usage de la censure jusque dans les années 1900. 
François D'Assise, lui, est resté incompris et tant d'autres après lui, théologiens et ecclésiastiques, qui ont été muselés car l'Église catholique se doit d'être immuable… ou pas. Merci Pie XII d'avoir amorcé le changement !!! Et Paul VI, et surtout Karol Wojtyla qui, sous le nom de Jean-Paul II, a incorporé les animaux parmi "les enfants de Dieu." Hélas, après eux, bof bof et retour en arrière…

Cet ouvrage très documenté est foisonnant d'éclaircissements et passionnant de bout en bout. Ce qu'il raconte est révoltant.

Merci 
Editions Empreinte temps présent et Babelio pour l'envoi de ce livre extrêmement intéressant.

 

Citations :

Page 9 : Avec un temps de retard, les juristes suivent les scientifiques dans ce travail de révision qui chamboule les dogmes. Un longue marche juridique a commencé au XIXe siècle, qui fait émerger peu à peu la reconnaissance des droits animaux. Le statut de l’animal passe d’objet à sujet. S’y inscrit dans la loi un respect des animaux qui n’est pas séparé du respect des hommes : les droits accordés aux premiers ne sont pas retirés aux seconds, car le souci de l’animal ne diminue en rien le souci de l’homme, il crée un nouveau droit en enrichissant l’ancien.

 

Page 10 : Certains ‘hésitent plus à qualifier de génocide, le fait que 60 milliards d’animaux terrestres et 1000 milliards d’animaux marins soient mangés chaque année par les hommes – à tout le moins un zoocide.

 

Page 18 : Darwin se chargea de porter le coup de grâce à l’antique illusion anthropocentrique en théorisant que l’homme, déjà expulsé du centre de l’univers, n’était plus le sommet du vivant, mais qu’il évoluait parmi les autres organismes. Dans son livre De l’origine des espèces, il émit l’idée qu’il n’existe aucune différence de nature entre les humains et les animaux, mais que, tout au contraire, un continuum les relie depuis quelque 250 millions d’années. Grâce à Darwin, résume Régis Debray, l’homme découvre qu’il est partie intégrante et non surplombante de la vie de la nature, il se croyait au-dessus et il se découvre au-dedans.

 

Page 29 : Dans l’histoire biologique, ce n’est certes pas la première fois qu’un agent infectieux effectue un saut entre l’animal et l’homme : la peste, la tuberculose, la grippe espagnole, la brucellose, la rage et, plus récemment, le VIH, l’ESB, EBOLA, le SARS 1, le MERS-CoV, le MERS-like sont autant de zoonoses, c’est à dire de pathologies transmises à l’homme depuis un réservoir animal, via une autre espèce animale. Mais c’est la première fois que les ravages du mal submergent avec une telle magnitude, la médecine, l’économie, la vie sociale, la création artistique sur tous les continents, jusqu’à contraindre à la claustration plus de la moitié de l’humanité.

 

Page 63 : Chez l’animal, nous voyons la volonté de vivre en quelque sorte plus à découvert que chez l’homme. Il faut être aveugle, ajoutera-t-il, pour ne pas s’apercevoir que l’animal est par essence absolument ce que nous sommes et que la différence réside seulement dans l’intellect, non dans la substance, c’est-à-dire la volonté.

 

Page 64 : Derrida dénonce le spécisme inhérent à un humanisme brutal qui donne tous les droits à l’homme et les refuse tous à toutes les autres espèces.

 

Page 103 : Malebranche a rédigé des pages que Descartes, inventeur de l’animal-machine, n’avait pas osé écrire : Dans les animaux, il n’y a ni intelligence ni âme, comme on l’entend ordinairement. Ils mangent sans plaisir, ils crient sans douleur, ils croissent sans le savoir, ils ne désirent rien, ils ne craignent rien, ils ne connaissent rien ; et s’ils agissent d’une manière qui marque l’intelligence, c’est que Dieu les ayant faits pour les conserver, il a formé leur corps de telle façon qu’ils évitent machinalement et sans crainte tout ce qui est capable de les détruire.

 

Page 136 : Dès 1979, Jean-Paul II déclare que la protection animale est une éthique chrétienne ; deux ans plus tard, il félicite une association d’assistante de s’occuper de nos frères les plus petits.

 

Page 143 : En quoi le bien fait à un être non-humain serait-il préjudiciable à l’être humain ? En quoi l’antispécisme serait-il un antihumaniste ?

 

Page 143 : Tant pis pour l’Évangile et l’exhortation christique d’aller prêcher le Royaume à toutes les créatures, selon la finale de l’Évangile de Marc. Cette exhortation, François d’Assise l’avait actée. François de Buenos Aires, tout en empruntant au Poverello son nom, le titre de son encyclique et quelques bonnes paroles, s’assied doctement sur elle, sur le trône de la majesté humaine. L’étau qui s’était desserré autour de l’animal s’est à nouveau serré.

 

Page 147 : Après tout, la reconnaissance de liens fraternels entre l’homme et l’animal représente déjà, en soi, une évolution remarquable. Elle fonde un code moral. Elle invente en quelque sorte un nouveau commandement : on ne tue pas son frère, on ne sacrifie pas son frère pour plaire à Dieu, on ne le mange pas, on ne le dissèque pas vivant, on ne lui fait pas subir des expérimentations pour le bien de son grand frère humain, on ne lui inflige pas des conditions de vie contraires à son bien-être dans le seul but de dégager des bénéfices financiers.

 

 

 

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Mon avis : Rêves arctiques – Barry Lopez

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Dominique Letellier

 

Éditions Gallmeister

 

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Quatrième de couverture :

"C'est l'histoire d'une conversation sans âge, non seulement entre nous, sur ce que nous avons l'intention d'entreprendre ou ce que nous voulons réaliser, mais aussi avec cette terre - notre contemplation et notre admiration devant un orage sur la prairie, devant la crête découpée d'une jeune montagne où devant l'essor soudain des canards au-dessus d'un lac isolé. Nous nous sommes raconté l'histoire de ce que nous représentons sur cette terre depuis 40 000 ans. Je crois qu'au cœur de cette histoire repose une simple et durable certitude : il est possible de vivre avec sagesse sur la Terre, et d'y vivre bien."

Dans ce classique du nature writing, l'aventure et le goût de l'extrême se mêlent à l'approche intime, méditative et sensorielle de la beauté glacée du Grand Nord.

National Book Award 1986


 

 

Mon avis :
Comment parler de tant de beauté décrite dans ces pages sans risquer de l'amoindrir ? Et en même temps c'est douloureux de réaliser à quel point l'humanité s'évertue à détruire tout ça par cupidité. Dès le prologue j'ai oscillé entre émerveillement et chagrin mais aussi écœurement face à l'arrogance des blancs.

Par moments un peu trop didactique à mon goût, voire encyclopédique, ça demande beaucoup de concentration pour que l'esprit ne s'échappe pas. De la course du soleil en arctique à la description très détaillée des forages pétroliers et stations de pompage, en passant par le bœuf musqué, l'ours polaire ce seigneur du grand nord, le narval, la migration des bernaches cravant, des filigules milouinants, des tournepierres à collier, des océanites cul-blanc, des saumons chinook, des baleines du Groenland, des veaux marins, des phoques barbus mais aussi des humains entre 23 000 et 25 000 ans, des icebergs et des naufrages de baleiniers, des couleurs et des luminaristes, ces peintres de l'Arctique, des faux soleils, des aurores boréales avec parfois des envolées métaphysiques, de la sociologie esquimaude et la psychologie humaine, de l'histoire de l'exploration et des hommes qui les menèrent souvent dans des souffrances abominables… C'est passionnant mais parfois un peu long. Et puis c'est triste de voir à quel point l'humanité s'autorise à tuer, saccager, détruire, parfois juste pour le plaisir d'être stupide et cruel. D'ailleurs j'ai appris très récemment que les japonais, qui avaient arrêté la chasse à la baleine, sont en train de construire un navire-usine, en 2023, pour remettre ça, alors que la consommation de viande de baleine a diminué de 99%. Apprend-on jamais de ses erreurs ?

On découvre néanmoins que l'anéantissement des espèces n'est pas quelque chose de nouveau, ce n'est pas le fait que de l'homme blanc. Ça existe depuis très longtemps. C'est juste tristement humain.

Pourtant l'Arctique recèle tant de merveilles ! Qu'un endroit aussi inhospitalier soit peuplé d'êtres qui ont su s'adapter à ce climat d'une rudesse absolue est en soi totalement magique.

À chaque chapitre l'auteur commence par des descriptions sublimes qui donnent l'impression qu'il nous parle d'un Éden glacé inhospitalier, où les différentes espèces vivent dans un écosystème parfait, puis il nous raconte les comportements humains et le rêve s'arrête là car nous vandalisons tout ! À croire que nous n'aimons pas le beau, ni la vie.

605 pages d'extrême beauté puis d'ignominies, à se demander de quel droit une poignée d'hommes commet tant de destructions et de meurtres gratuits. Car oui, il y a pire que la cupidité. Trop souvent de nombreux animaux sont tués pour rien, juste pour le plaisir de faire un carton.

C'est passionnant de découvrir que cet endroit du monde, gelé la majeure partie de l'année, est foisonnant de vie mais malheureusement terriblement convoité et pillé depuis trop longtemps.

D'un bout à l'autre de ces descriptions exhaustives de l'Arctique dans son entièreté, j'ai eu l'impression de voyager à travers l'origine du monde. Pourtant, la vie arctique est très jeune, à peine 10 000 ans. Mais quelle tristesse de penser qu'elle est en train de mourir et que nous en sommes responsables, et plus aberrant encore, que nous allons à notre propre perte et que nous le savons.

Lecture longue mais captivante, mais longue… et qui demande une bonne dose d'opiniâtreté.

 

 

Citations :

Page 17 : Dans son ensemble, l’Arctique présente toutes les caractéristiques d’un paysage désertique, disponible, équilibré, vaste et calme.

 

Page 24 : Je crois qu’au cœur de cette histoire repose une simple et durable certitude : il est possible de vivre avec sagesse sur la Terre, et d’y vivre bien. Il est loisible d’imaginer que, si nous considérons avec respect tout ce que porte la terre, nous nous débarrasserons de l’ignorance qui nous paralyse.

 

Page 73 : Or, quand je marchais dans la toundra, quand je rencontrais le regard d’un lemming ou découvrais les traces d’un glouton, c’était la fragilité de notre sagesse qui m’atterrait. La façon dont nous exploitons l’Arctique, notre utilisation toujours plus grande de ses ressources naturelles, notre simple désir d’en tirer profit sont très clairs. Qu’est-ce qui nous manque, qu’avons-nous d’inachevé en nous, pour que je me sente si mal à l’aise quand je parcours cette région d’oiseaux qui gazouillent, de caribous distants et de farouches lemmings ? Ce qui nous fait défaut, c’est la retenue.

 

Page 120 : Mais le pire arriva quand les zoos commencèrent à s’intéresser aux bœufs musqués. Les pourvoyeurs des zoos trouvèrent que le seul moyen pratique pour s’emparer d’un petit était de tuer tous les adultes de la harde rassemblés en formation défensive. La capture du dernier animal, épuisé, au milieu de ses compagnons morts, devait être une des visions les plus pathétiques jamais inventées par des hommes civilisés.

 

Page 131 : Les très grands ours polaires peuvent peser 900 kilos et, dressés sur leurs pattes arrière, mesurer 3,5 mètres de haut. Les rapports faisant état d’ours de plus de 3,5 mètres et de plus d’une tonne relèvent de mauvaises mesures, de peaux allongées, ou d’exagérations dues à l’imagination, davantage que de la mesure scientifique d’ours réels.

 

Page 170 : À des milliers de kilomètres de tout lieu connu, authentiquement effrayés, sans doute atteints par les effroyables conditions de vie à bord, les Européens se mirent à tuer tous les ours polaires qu’ils voyaient. Ils les abattaient par mesquinerie et par esprit de justice. À force, tuer un ours polaire devint une sorte de divertissement auquel ceux qui voyageaient dans l’Arctique s’attendaient à prendre part. Certains les abattaient depuis le pont du bateau comme au stand de tir.

 

Page 226 : La nuit où je crus entendre la pluie, je me rendormis en écoutant les cris des oies des neiges. Mais j’écoutais également le son de leur vol nocturne, le martèlement de l’air, le bruissement sauvage des ailes, au-dessus de ma tête. Ces sonorités primitives font que le bassin de Klamath ressemble curieusement à un fief inhabité, tombé en déshérence, que ces animaux viendraient réclamer chaque année comme leur terre ancestrale. Pourtant, pendant quelques jours, à la périphérie des troupeaux d’oies, je n’eus pas l’impression d’être un intrus. Je ressentais le calme que les oiseaux apportent aux hommes ; apaisé, je percevais ici les contours des plus anciens mystères de la nature : l’étendue de l’espace, la lumière qui tombe des cieux, le passé coulant dans le présent comme une eau, et s’y accumulant.

 

Page 231 : Sur le terrain, on ne tarde pas à sentir que l’échelle du temps et de la distance, pour la plupart des animaux est différente de la nôtre. Leur taille, leurs méthodes de locomotion, la nature des obstacles auxquels il sont confrontés, les milieux où ils se meuvent, la longueur de leur vie, tout est différent.

 

Page 274 : Peter Schledermann, qui a fouillé des sites préhistoriques dans presque tout l’Arctique canadien, m’a dit un soir à Calgary : « Tout ce que nous sommes est dans notre esprit. Par l’archéologie, nous examinons le long cheminement qui nous a fait ce que nous sommes. »

 

Page 289 : Le but du chasseur, dans ces sociétés fondées sur la chasse, n’était pas de tuer des animaux mais de servir cette myriade de relations avec d’autres existences qui, il le savait, l’unissait au monde qu’il occupait avec elles. Il s’acquittait scrupuleusement de ces devoirs parce qu’il voyait en eux tout ce qu’il comprenait de la survie.

 

Page 344 : Mais en hiver, je réfléchis aussi à l’obscurité, à l’obscurité qui affecte par exemple les caribous de Kaminuriak, massacrés par les Esquimaux modernes. Tout le monde a peur d’en parler de crainte d’être traité de raciste. Il est plus facile de perdre les animaux que de faire front aux zones ténébreuses de notre être. L’obscurité de la politique, pendant les longues heures d’hiver, s’insinue dans l’obscurité de la terre. Dans la colère.

 

Page 432 : Marchant sur la grève, je m’arrêtais de temps à autre pour ramasser sur le sol durci par l’orage des fragments de vertèbres de baleines, des plumes, ou les éternels morceaux de plastique qui possèdent le pouvoir de bannir tout romantisme d’un lieu.

 

Page 437 : Il faut en fin de compte que chaque culture décide – qu’elle en débatte et qu’elle décide – quelle partie de tout ce qui l’entoure, tangible ou intangible, elle va détruire pour la transformer en richesse matérielle, et quelle partie de sa richesse culturelle – depuis la paix traditionnelle régnant sur une colline sauvage jusqu’à la maîtrise du financement d’une fusion entre deux entreprises – elle est résolue à préserver, en luttant pour y parvenir.

 

Page 468 : Entre 1769 et 1878, la Compagnie de la Baie d’Hudson vendit aux enchères à Londres, entre autres fourrures et peaux : 891 091 renards, 1 052 051 lynx, 68 694 gloutons, 288 096 ours, 467 549 loups, 1 507 240 visons, 94 326 cygnes, 275 032 blaireaux, 4 708 702 castors et 1 240 511 martres. À certains moments, dans la même période, deux autres compagnies, la Compagnie du Nord-Ouest et la Compagnie du Canada, pratiquaient également le commerce des fourrures sur une aussi grande échelle.

 

Page 560 : Je suis l’un des derniers à quitter la plage, retournant encore dans ma tête les images de la chasse. Quelle que soit la profondeur des réflexions que vous consacrez à un tel évènement, quelle que soit l’ampleur de votre compréhension anthropologique, quel que soit votre goût pour cette nourriture ou votre désir de participer, vous venez de voir tuer un animal. Dans ces grands moments de sang, de souffle violent, d’eau battue, avec l’odeur âcre de la poudre et l’odeur fétide de corral d’un morse hissé hors de l’eau, vous vous êtes trouvé confronté à des interrogations complexes : Qu’est-ce qu’un animal ? Qu’est-ce que la mort ? Ces moments sont ahurissants, assourdissants, et sereins. La vue des hommes qui laissent retomber des morceaux de viande dans les eaux vert sombre en murmurant des bénédictions est aussi forte dans ma mémoire que celle de l’énorme animal surpris qui écarquille soudain les yeux.

 

Page 563 : Je pense avec compassion aux Esquimaux, comme on pense aux hibakusha - « les personnes affectées par l’explosion », qui continuent à souffrir des effets d’Hiroshima et de Nagasaki. Les Esquimaux sont piégés dans une lente et longue explosion. Tout ce qu’ils savent d’une bonne façon de vivre se désintègre. La voix ironique et sophistiquée de la civilisation affirme que leur perspicacité est triviale, mais elle ne l’est pas.

 

 

 

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