Mon avis : Le grand Santini – Pat Conroy
Traduit de l’américain par Eric Chédaille
Éditions Pocket
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Quatrième de couverture :
Au cœur des années 1960, le jeune Ben étouffe à Ravenel, petite ville de garnison de Caroline du Sud où règnent racisme, violence et sexisme. Dans un an, l'université le délivrera de cet enfer et de la tyrannie de son père, le terrible colonel Bull Meechan. C'est lui, le " Grand Santini ", pilote de chasse et héros de guerre qui rêve d'un fils à son image et traite sa famille comme il commande ses hommes. Mais peut-on élever ses enfants comme une section de Marines? Comme tous les Meechan, Ben se révolte contre les humiliations et le cynisme de cet énergumène. Mais il est trop intelligent et trop sensible pour ne pas deviner, derrière la cuirasse d'autorité, l'impuissance d'un père à exprimer sa tendresse et son amour...
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Pourquoi j’ai voulu lire ce livre :
C’est le deuxième roman de Pat Conroy que je lis après Le prince des marées et j’adore son écriture sublime et poétique, bourrée d’humour même quand l’histoire est très dure.
Mon avis :
Les années 60. La famille Meecham vit au rythme des mutations de Bull, le père, pilote de chasse dans l'armée, héros de guerre. Tout le monde file droit face à cet homme autoritaire, véritable tyran domestique non dénué d'humour. Tous le craignent, pourtant ses deux aînés, Ben et Mary Anne pratiquent l'ironie mordante. Par ailleurs, Lillian, la mère sait mieux que quiconque désamorcer les sautes d'humeur de cet homme habitué à commander. Hélas, elle vit dans le déni, comme si refuser la réalité la faisait disparaître, nier la violence pour la rendre inexistante.
Pat Conroy est un génie. Son écriture est une symphonie pastorale, superbe et émouvante où la nature a une part importante. Il accroche le lecteur avec ses personnages et leur histoire, il parle de gens parfois affligeants et révoltants tout en nous provoquant des éclats de rire. Il nous invite dans cette famille et on vit ce qu'ils vivent. Il me rend attachant Bull, le grand Santini, alors que c'est typiquement le genre d'individus que j'exècre, un être raciste et brut de décoffrage, qui peut être arrogant et qui fait régner la terreur au sein de son foyer pour avoir toujours raison, car il veut être le chef suprême, celui que tout le monde craint et respecte. On se trouve sur une corde raide, oscillant entre colère et amusement, sans doute à cause de sa personnalité complexe. Cet homme est drôle autant qu'il peut être odieux.
Pat Conroy raconte les liens familiaux comme personne. Il nous dessine des personnages passionnants, surprenants, jamais fades ni insignifiants, de ceux qui mènent son romans jusqu'à ceux de moindre importance que l'on ne voit qu'à peine, tous ont leur place dans l'histoire et on est heureux de les avoir rencontrés.
J'ai adoré cette histoire familiale violente mais bourrée d'humour avec des dialogues ciselés et jubilatoires, qui sent les états du sud et l'amour à plein nez, qui nous raconte la difficulté de vivre et nous parle de pudeur des sentiments.
Citations :
Page 130 : Je suis Santini. Le Grand Santini. Le soldat de fortune. La bête de Ravenel. Le ministre de la Mort. Et le meilleur foutu pilote du Marine Corps.
Page 132 : Bull était incapable de se détendre. Il était de ces hommes dont le sang semble circuler trop vite, dont le cerveau semble luire dans la pénombre, dont les yeux sont sans cesse en mouvement, et le corps agité même lorsqu’ils sont assis ou quand ils dorment.
Page 173 : Dorénavant, ça va être une coupe de cheveux toutes les semaines par un coiffeur breveté marine. Si ça ne vous plait pas c’est pareil, parce que je ne vous demande pas votre avis. Je vous mets au courant, un point c’est tout.
Page 310 : Tu es l’aîné de mes enfants, celui que je connais depuis le plus longtemps.
Page 323 : Je veux que les gars deviennent de bons soldats, et les filles de jolis petits culs pour leur mari.
Page 408 : Recevoir l’enseignement d’écoles catholiques était, par certains côtés, comme grandir dans un pays étranger. Prêtres et religieuses y imposaient un absolutisme qui ne souffrait aucune opposition. Ben avait entendu plus de bruit dans le sous-sol d’un établissement de pompes funèbres que lors de certains cours de mathématiques prodigués par des créatures glaciales dont la robe, lorsqu’elles passaient dans les travées, vous envoyait des courants d’air antarctique.
Page 497 : La femme a une seule fonction. Être adorable. Tout le reste n’est que de l’enrobage. Bien s’habiller afin d’attirer le regard de l’homme est une des règles du jeu.