Mon avis : Baise-moi de Virginie Despentes
4ème de couverture :
Cette course folle à bord de bagnoles volées est entrecoupée de phases musicales, paroles crues débitées sur fond de rock ou de rap par un walkman.
Chaque arrêt en ville annonce l'assouvissement d'un désir... de niquer quand on veut, de prendre l'argent où il se trouve, de bouffer du chocolat sans retenue, de vivre à l'hôtel, de flinguer à tout va hommes, femmes, enfants, sans distinction ! Immorales, les filles ?
Premier roman de Virgine Despentes, une touche-à-tout dotée d'instabilité qui aime le vin, la dope et le chocolat.
Mon avis :
Alors ça, c'est sexe, drogue, rock'n'roll et meurtre.
Ce roman écrit en 1994 m'a arraché des grognements de colère étouffés. J'ai beaucoup de mal avec toute cette violence faites aux femmes (acceptée avec fatalisme) , surtout depuis qu'on a pu découvrir avec effroi le comptage mois après mois des victimes mortes en 2019 sous les coups de leurs conjoints ou ex-conjoints.
C'est l'histoire de la misère, des addictions en tout genre, alcool, drogues, sexe, et malheureusement de la résignation : "on est jamais que des filles".
C'est cru, trash, violent, déprimant, dès les premières lignes.
C'est l'histoire de la dérive de deux laissées pour compte, road movie sanglant de deux paumées.
J'avais presque l'impression qu'il s'agissait de deux personnages féminins imaginés par un homme, car addictes aux hommes, au sexe, à la pornographie, sans limite... fantasme d'homme en somme.
Et puis il y a des choses qui semblent impossibles, à dire ou à penser, des situations choquantes qui font penser à un livre tout récent qui évoque le consentement.
Il est question de viol, d'inceste, de pédophilie et c'est très dérangeant, voire insupportable.
J'ai pourtant bien aimé cette histoire même s'il y a certains passages qui pour moi sont inacceptables. Bien des choses qui pouvaient "passer" il y a un peu plus de vingt ans ne sont plus possibles maintenant et c'est tant mieux.
Malgré tout, entre deux meurtres, je leur ai trouvé un côté attachant à ces deux dingues. À force d'être soumises, aux aléas de la vie, à la société, à une certaine catégorie de connards, elles ont fini par prendre le contrôle et le pouvoir avec pertes et fracas, jusqu'à l'inéluctable tragédie de leur fin.
Citations :
Quand j'étais gamine, je m'imaginais volontiers solidement ligotée sur une table de bar, mon cul bien ouvert, et de nombreux messieurs dont je ne pouvais pas voir le visage me faisaient des choses déroutantes. et très dégradantes. Et très agréables.
- On a tous des rêves d'enfants, je respecte ça.
- En fait, c'est un peu tous les coups qu'ont mal tourné. Tous ces trucs que tu tentes de faire et jamais rien ne réussit. Ça me fait penser au conte de la petite sirène. L'impression d'avoir consenti un énorme sacrifice pour avoir des jambes et te mêler aux autres. Et chaque pas est une douleur intolérable. Ce que les autres font avec une facilité déconcertante te demande des efforts incroyables. Arrive un moment où tu lâches l'affaire.
Concupiscent. Il s'essuie la nuque assez souvent car il transpire comme un gros. Il respire fort en leur souriant béatement, découvrant sans remords ses dents jaunes et tachées. Pataud, abruti, grotesque et il pavane bravement. Doit décidément les prendre pour des connes pour oser faire du charme. Ou bien ne se rend pas compte, vraiment.
Mots d'esprit sordides et grimaces adipeuses. Aimable à force d'être lamentable, une question d'adaptation.
