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fantastique

Mon avis : La cabane aux confins du monde – Paul Tremblay

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’américain par Laure Manceau

 

Éditions Gallmeister - Totem

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Wen, sept ans, est en vacances avec ses parents Eric et Andrew au bord d'un lac isolé. Un après-midi, tandis qu'elle s'amuse à attraper des sauterelles, un jeune homme apparaît dans l'allée. Bien qu'imposant, elle le trouve tout de suite sympathique. Après avoir un peu joué et discuté avec l'enfant, l'étranger déclare brusquement : "Rien de ce qui va se passer n'est de ta faute." Trois inconnus surgissent alors, munis d'armes étranges. Eric et Andrew se barricadent avec Wen, mais les nouveaux venus insistent pour leur proposer un marché : ils ont besoin d'eux pour sauver le monde.

 

 

Mon avis :
Wen, sept ans, passe ses vacances dans les bois au bord d'un lac avec ses deux papas Eric et Andrew. Wenling est une petite fille, née en Chine, qui aime les animaux et qui voudrait les étudier quand elle sera grande afin de pouvoir les aider. Alors que ses pères lui ont toujours dit de ne pas faire confiance aux inconnus, elle sympathise avec Leonard, un homme sorti de la forêt, une espèce de colosse, très doux, qui lui parle gentiment et l'aide à attraper des sauterelles. Tandis qu'ils discutent, une tension s'installe, comme si Leonard cachait ou craignait quelque chose. Quand trois autres personnes se dirigent vers la Cabane, Wen prend peur.

Ces quatre inconnus, deux hommes, deux femmes, prétendent vouloir sauver le monde, pourtant ils semblent dangereux car armés jusqu'aux dents. Et que veulent-ils dire réellement ? Leur but est-il écologique ou humaniste ? Ou sont-ils juste des illuminés ? Voire complètement cinglés !? Car ce qu'ils proposent est totalement glaçant. Eric et Andrew soupçonnent des désirs de nuire animés par l'homophobie. Seuls au milieu de la nature à la merci de ces quatre étrangers au discours hallucinant, Wen et ses deux papas semblent n'avoir aucune échappatoire.

Ce huis clos oppressant nous emporte au bout de la folie. J'ai aimé, cependant j'ai trouvé que le genre d'ambiance qui met au bord du malaise a été longue à venir. Heureusement, on finit par être pris dans un étau de stress, un déluge de démence. Il y a réellement un contraste inquiétant entre la gentillesse de ces inconnus venus pour sauver le monde et leurs actes totalement barbares. Je me suis demandé si je lisais un roman de science-fiction ou un thriller. Si quelque chose qu'on ne s'explique pas était en train de se produire ou bien si ces quatre-là étaient des psychopathes, une espèce de secte de l'apocalypse ? Car si certains sont croyants, d'autres sont agnostiques. Pourtant ils semblent tous mus par une sorte de force spirituelle qui vire par moments au fanatisme le plus débridé car ils prétendent avoir été appelés par quelque chose de supérieur.

Au cœur de cette noirceur il y a la famille unie que forment Andrew l'agnostique, Eric le très pieux, et Wen à qui ils ont décidé de laisser le choix, l'amour et la confiance qu'ils se portent. Pourtant, les trois auront des moments d'incompréhension les uns envers les autres, voire de peur et de doutes.
Et puis cet étrange quatuor de forcenés qui, pour faire le bien, sont près à faire le mal le plus absolu.

J'ai aimé les personnages, le couple de pères qui s'aiment profondément mais surtout la petite Wen qui, quand elle a très peur, ferme ses petits poings avec les pouces à l'intérieur et les tient contre son visage, comme si ça l'aidait à supporter ou peut-être se protéger du mal. J'ai même souvent aimé Leonard, ce titan si doux, mi monstrueux mi bienveillant qui semble mener un terrible combat intérieur.
Les chapitres donnent la paroles aux personnages à tours de rôle, nous partageant leurs pensées et leurs souvenirs ce qui attise la peur des événements à venir. Pourtant, des questions resteront sans réponses, ce qui m'a un peu frustrée. Et si le pourquoi de l'ultimatum était sans réelle importance. Et s'il fallait essentiellement voir dans cette histoire le côté humain avant tout, avec ses failles et ses forces !? Peut-être juste réfléchir sur la tolérance, l'altérité, l'ouverture d'esprit, le don de soi, la préservation de notre habitat dont nous devrions vraiment nous soucier. Peut-être est-ce simplement un hymne à l'amour... l'amour de l'humain, l'amour de la Terre.
En tout cas, ce roman m'a avalée dès le début, je dois bien avouer que je ne l'ai pas lâché.

 

Citations :

Page 25 : Wen soupire.

J’ai deux pères. (Elle garde les bras croisés.) Je rajoute leur prénom pour qu’ils sachent à qui je m’adresse.

Un de ses copains d’école, Rodney, a deux papas lui aussi, mais il déménage à Brookline à la fin de l’été. Sasha a deux mamans, mais Wen ne l’aime pas trop, elle veut toujours commander. D’autres camarades du quartier ou de l’école ont juste une mère ou un père, certains ont ce qu’ils appellent un beau-père ou une belle-mère, ou alors le compagnon de leur mère ou la compagne de leur père, ou encore quelqu’un à qui ils ne donnent pas de nom spécial. La plupart des enfants qu’elle connaît ont un père et une mère, cela dit.

 

Page 177 : Elle passe un marché avec le dieu-tueur de Leonard, un dieu en lequel elle ne croit pas, mais qui lui fait très peur. L’image qu’elle a de ce dieu c’est tout le néant noir qui existe entre les étoiles quand on regarde le ciel la nuit, et ce dieu du vide infini est assez grand pour avaler la Lune, la Terre, le Soleil, la Voie lactée, si grand qu’il ne peut s’occuper de rien ni personne.

 

Page 197 : Il avait prévu de lui dire la vérité à propos de cette cicatrice quand elle serait plus grande, quand elle aurait l’âge de comprendre. Il entretenait cet espoir irrationnel de sans cesse remettre à plus tard le jour où elle s’apercevrait que la cruauté, l’ignorance et l’injustice étaient les piliers de l’ordre social, aussi inéluctables que le temps qu’il fait.

 

 

 

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Mon avis : The fisherman – John Langan

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’américain par Thibaud Eliroff

 

Éditions J’ai Lu

 

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Quatrième de couverture :

Au nord de l’État de New York, dans les bois de Woodstock, Dutchman’s Creek coule paisiblement. Une rivière poissonneuse mais quasi inaccessible, et bien plus profonde qu’il n’y paraît…
Ce matin-là, Abe et Dan – deux veufs liés par la solitude et l’amour de la pêche – décident de tenter l’aventure. Surpris par une pluie torrentielle, ils se réfugient au Herman’s Diner, dont le patron va leur raconter l’incroyable histoire de Dutchman’s Creek. « Folklore », pensent-ils.
Pourtant, ils appartiendront bientôt corps et âme à cette légende aussi ancienne que ténébreuse…

 


 

Mon avis :
Abraham, il préfère Abe, moins biblique, moins patriarcal, nous raconte une histoire qui tient du domaine de l'étrange mais qui en réalité va nous faire dresser les cheveux sur la tête. Ça commence dans les Catskills et je me suis retrouvée instantanément au cœur de l'Amérique. Donc Abe commence par nous mettre l'eau à la bouche avec une histoire terrifiante qu'il va nous raconter, puis il décide de commencer par le début, le tout début. J'étais ferrée !... dans ce genre d'ambiance que j'aime tant dans la littérature américaine.

Il nous raconte sa rencontre avec Marie, son mariage très bref, son incommensurable douleur, et puis un matin son envie soudaine d'aller à la pêche alors qu'il n'y connaît rien. À travers ses descriptions il nous transmet cette émanation de bien-être avec "ce bruit qui n'en était pas un, celui du calme." Car il nous emmène au bord des cours d'eau, en pleine nature, loin de tout. Chacune des descriptions nous plonge un peu plus dans ces coins d'Amérique où on se dit que tout peut arriver. Car les cours d'eau au milieu des bois sont beaux et terrifiants pour peu qu'on ait trop d'imagination.

Abe s'est lié d'amitié avec Dan, un jeune veuf inconsolable, et ils vont faire ensemble le tour des différents lieux de pêche de leur région. Lorsqu'un jour, Dan propose d'aller pêcher à Dutchman's Creek, dont Abe n'a jamais entendu parler. Mais Howard, le propriétaire du Herman's Diner où ils aiment prendre le petit-déjeuner avant leur journée de pêche, va leur parler de ce lieu mortifère entouré d'une aura de mystère. Il va leur raconter et Abe va nous le raconter. Et là, j'ai eu hâte de connaître enfin le doux frisson de la peur.
L'histoire, ou la légende, trouve sa source vers les années 1840, époque de Cornelius Dort, homme austère et sans coeur, et de son étrange invité. On va plonger tout doucement au cœur des ténèbres dans quelque chose qui ressemble à de la magie noire. C'est délicieusement terrifiant, répugnant et gluant.
C'est à cette époque que Rainer Schmidt, universitaire allemand polyglotte est obligé de quitter l'Allemagne avec sa femme et ses enfants pour des raisons qu'on ne connaîtra que bien plus tard. Il trouve une place de maçon à la construction d'un barrage aux abords de Dutchman's Creek. Ils vivent dans le village des ouvriers au cœur de la forêt et lui saura quoi faire quand des événements surnaturels et terrifiants se produiront. Mais le prix à payer risque d'être très élevé.

J'ai beaucoup aimé l'écriture de 
John Langan, sa façon de nous raconter l'histoire, de nous embarquer dedans, et surtout la manière dont il parle du deuil, tellement subtile, tellement ressentie, tellement belle que c'est un peu comme s'il me disait "Je sais". Et cependant ce n'est jamais larmoyant. Néanmoins, alors que j'aimais beaucoup l'histoire passée qui nous était racontée, j'ai fini par trouver ça interminable avec un passage d'une cinquantaine de pages, trop long à mon goût dans l'incursion de ce qui ressemble aux ténèbres les plus maléfiques qui soient, scènes extrêmement bien décrites cependant, et totalement apocalyptiques.

Derrière ce récit aux accents lovecraftiens, se pose une question sur l'enfer du deuil, la capacité de chacun à le supporter et le chemin à parcourir quand le manque se fait trop pesant, lorsque les défunts sont tellement omniprésents que leur absence est la pire des tortures. Et si passé et présent pouvaient se percuter ???
C'est un livre qui m'a fait m'interroger. Je me suis demandé "Et si moi je pouvais... est-ce que je le ferais ?"

Je remercie Lecteurs.com grâce à qui j'ai gagné ce livre, mélange de nature writting et d'horreur aux effluves gothiques.

 

Citations :

Page 19 : On pourrait croire que cette conversation est restée gravée dans ma mémoire, mais je suis bien incapable de me rappeler autre chose que le plaisir d’apprendre qu’elle aussi était fan de Hank Williams Sr. En vérité, j’étais bien occupé à essayer de ne pas lorgner trop ostensiblement le haut de bikini, le short moulant et les tennis qu’elle portait ce jour là. Le mufle typique, je sais.

 

Page 179 : Et, outre le plaisir que lui procurait cette activité, Lottie prenait plaisir au simple fait de travailler. Souvenez-vous qu’à cette époque, les filles, surtout les filles de bonne famille, sont censées rester à la maison et apprendre le piano. Si les Schmidt étaient restés en Allemagne, c’est plus ou moins ce qui serait arrivé à Lottie : elle aurait décoré le salon de ses parents, jusqu’au jour où elle serait devenue prête à décorer le bras d’un jeune homme.

 

 

 

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Mon avis : Le téléphone carnivore – Jo Nesbo

Publié le par Fanfan Do

Traduit du norvégien par Céline Romand-Monnier

 

Éditions Gallimard

 

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Quatrième de couverture :

Richard Elauved, quatorze ans et mal dans sa peau, est recueilli, après la mort de ses parents, par son oncle et sa tante dans une petite ville où il s’ennuie ferme, ne fréquentant que Tom, bègue et moqué de tous.
Le jour où ce dernier se volatilise, on accuse Richard de l’avoir poussé dans la rivière. Personne ne le croit quand il raconte que le téléphone de la cabine publique où il avait entraîné son camarade pour faire des blagues a dévoré l’oreille, puis la main, le bras et… le reste du corps de Tom.
Personne sauf l’énigmatique Karen, qui l’encourage à mener une investigation jugée superflue par la police. Envoyé en centre de redressement, Richard réussit à s’enfuir avec la complicité de jumeaux maléfiques et aboutit à un manoir abandonné dans la forêt, où se succèdent des phénomènes paranormaux qui semblent tous dirigés contre lui.

 

Mon avis :
Depuis des années, Jo Nesbø écrit des polars, pas des histoires horrifiques.
Ce roman hors norme, le concernant, m'a plu dès le début. J'ai aimé l'ambiance champêtre au crépuscule, un peu eighties, avec Tom et Richard qui se comportent en bons adolescents crétins, à vouloir se croire drôles en faisant des trucs débiles. Ils ont quatorze ans, sont rejetés par les autres et veulent se rendre intéressants. Or en voulant faire une blague téléphonique à un inconnu depuis une cabine (mais à quelle époque sommes-nous donc ???) Tom se fait dévorer par le téléphone. Évidemment, personne ne va croire Richard. Ni la 
police, ni les habitants. Parce que bien sûr, les téléphones ne mangent pas les gens. Et le nom qu'ils ont utilisé dans l'annuaire de la cabine pour faire leur blague, lui fait une "blague".

Richard Elauved, le narrateur, est une sorte de renégat dans son collège. Garçon de la ville donc méprisé, orphelin, qui aime l'ironie et semble se foutre de tout, il fait partie de la plus basse caste. Oui parce que les élèves ont un système de caste, des plus populaires au plus nuls selon leurs critères. Il fait donc partie de la caste des piranhas. Pourtant, en principe les piranhas ça fait peur ! Et il y a Karen ! Belle, originale avec un look très personnel, et brillante dans toutes les matières. En plus elle est sympa !

Ésotérisme et magie noire imprègnent cette histoire. Car Tom a été la première victime mais pas la dernière. Cependant, alors que l'ambiance m'a vraiment rappelé certains romans de Stepehen King ou de 
Dean Koontz, la terreur a été la grande absente. À vrai dire, ce roman évoque de la littérature jeunesse. Mais quand-même, des personnages intéressants, comme cet aveugle plein de bon sens et clairvoyant, ou d'autres inquiétants tels ces jumeaux barjots. J'en suis venue à me demander si le but de Jo Nesbø n'était pas de s'amuser avec les codes de l'horreur plutôt que de faire peur. Car il y a un côté facétieux, notamment avec Richard notre héros dont l'humour et l'apparent je-m'en-foutisme sont omniprésents.

Il y a une ambiance mi-joyeuse, mi-lugubre. D'un côté les fanfaronnades d'adolescents qui se tirent la bourre pour paraître plus malin et plus courageux que les autres, de l'autre une atmosphère mortifère dans des forêts vaporeuses, à la recherche de ce qui a tué Tom. Et toujours, dans ce genre de récit, une dualité entre le quotidien rassurant et des événements incompréhensibles et terrifiants dans une brume ténébreuse et maléfique.

Et puis TADAM !!! deuxième partie, et là, TWIST ! Je me suis demandé si l'auteur se jouait de nous car quoi de mieux que l'imaginaire et les questionnements de ceux à qui l'on s'adresse !? Puis alors la troisième partie !!!..... Re TWIST !! Il est fort Jo Nesbø !!!

Donc après avoir été dans une sorte d'amusement cauchemardesque, puis une sidération quasi-grandguignolesque, j'ai fini dans une angoisse compassionnelle, comme si ce que je lisais était la pire chose qui puisse arriver. Et oui, j'ai aimé ce roman ! Je l'ai dévoré !! Car Jo Nesbø s'est servi du genre horreur-terreur pour nous embarquer là où ne s'attend pas à arriver. Quoique… quelques indices laissés çà et là allument de petites lumières de suspicions que quelque chose va nous surprendre. Pour moi, une totale réussite !!!

 

Citations :

Page 39 : Je posai le pied sur le premier échelon, inspirai profondément et entamai mon ascension.

J’ai le vertige. J’ai peur du noir. J’ai peur de l’eau. J’ai peur du feu. Et j’ai peur des téléphones. Mais avant tout, j’ai peur d’avoir peur.

 

Page 106 : C’était une femme revêche et drôle, obèse et mastiqueuse de chewing-gum, au caractère ombrageux. Elle prétendait que le seul privilège des femmes dans ce monde dominé par les hommes était de pouvoir en toute impunité distribuer des gifles à des gamins qui n’étaient que des voyous insolents.

 

Page 151 : Un cri retentit à l’étage, derrière une porte de la galerie. Était-ce le cri d’un homme, d’un animal ? Je sais seulement que c’était l’un des cris qui transpercent non seulement les os et la moelle, mais encore le cœur, l’âme. L’un de ces cris qui contiennent tout : le désespoir, la peur, la colère, la solitude. Il résonna longtemps après s’être tu.

 

 

 

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Mon avis : Je suis une légende – Richard Matheson

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’américain par Nathalie Serval

 

Éditions Folio SF

 

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Quatrième de couverture :

Chaque jour, il doit organiser son existence solitaire dans une cité à l'abandon, vidée de ses habitants par une étrange épidémie. Un virus incurable qui contraint les hommes à se nourrir de sang et les oblige à fuir les rayons du soleil... Chaque nuit, les vampires le traquent jusqu'aux portes de sa demeure, frêle refuge contre une horde aux visages familiers de ses anciens voisins ou de sa propre femme. Chaque nuit est un cauchemar pour le dernier homme, l'ultime survivant d'une espèce désormais légendaire.


 

 

Mon avis :
L'histoire commence en janvier 1976. Robert Neville semble seul au monde, cloîtré dans sa maison dès la nuit tombée pour échapper aux vampires qui le harcèlent pour qu'il sorte. Sa solitude est terrifiante et il se demande parfois pourquoi lutter. Car le monde a basculé dans le néant, il n'y a plus de futur pour l'humanité. Il n'y a pour ainsi dire plus d'humanité. Il est le dernier d'une civilisation éteinte, barricadé chez lui dans une hideuse claustration désespérée. Il lui reste ses souvenirs, et sa rage de vivre sans bien savoir pourquoi car, à quoi sert de vivre quand on est le dernier de son espèce ? Mais il cherche. Il voudrait comprendre la raison de ce qui est arrivé au monde. Et pourquoi, d'un point de vue cartésien, l'ail et les crucifix éloignent les vampires ?

C'est l'isolement et l'absence totale de perspectives d'avenir qui m'ont parues abominables, bien plus que les prédateurs qui le guettent. Mais bien sûr on espère qu'il trouvera d'autres humains non contaminés. L'espoir est indispensable au désir de vivre. Enfin, je crois... Entre ivrognerie solitaire, expéditions de destruction des monstres, et quête de son Graal, il avance pas à pas.

C'est agréable à lire mais souvent lent. Sauf que des révélations arrivent. D'abord comme des petites lumières de conscience dans l'obscurité, qui ouvrent des portes de compréhension, des petits cailloux sur un chemin ou des pièces d'un puzzle qui se mettent en place. Néanmoins je reste un peu dubitative ! Comment fait-on pour se muer en scientifique doublé d'un laborantin quand on n'a aucune formation dans ce domaine et qu'on est seul au monde, à une époque où le monde s'est arrêté.
Cependant je n'ai pas compris à quel moment on apprend qu'il y a des vampires vivants et des morts.
Et surtout ça n'a rien à voir avec le film avec 
Will Smith.

Écrit en 1954 ce roman parle de choses que certains ne comprendraient pas, comme par exemple une montre arrêtée parce qu'elle n'a pas été remontée. Moi ça m'a fait remonter le temps .

 

Citations :

Page 37 : En des temps reculés — disons, jusqu’à la fin du Moyen Âge — le pouvoir du vampire était aussi grand que la terreur qu’il inspirait. C’est pourquoi on jeta l’anathème sur lui. La société ressent à son endroit une haine irrationnelle.

Pourtant, en quoi ses habitudes sont-elles plus révoltantes que celles des autres hommes et animaux ? Ses crimes sont-ils plus grave que ceux des parents qui étouffent la personnalité de leur enfant ? Son seul nom provoque des réactions d’effroi. Mais est-il plus monstrueux que les parents d’un gosse névrosé, futur homme politique ? Que l’industriel distribuant à des œuvres l’argent qu’il a amassé en fournissant en bombes et en fusils des terroristes kamikazes ?

 

Page 101 : Neville s’immobilisa et explora la salle du regard. Tous ces livres, songea-t-il en secouant la tête. Ces résidus de l’intellect planétaire, raclures de cerveaux frivoles, pots pourris d’artefacts incapables de sauver l’homme de l’anéantissement…

 

Page 220 : Il ferma les yeux et pensa : je vais mourir.

Cela non plus, il ne pouvait l’admettre. Malgré ces trois années vécues en compagnie de la mort, pareil à un funambule avançant au dessus d’un abîme sans fond, il ne comprenait pas. La mort — sa mort — était une notion qui lui échappait totalement.

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Mon avis : Les chiens – Allan Stratton

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’américain par Jacqueline Odin

 

Éditions Milan

 

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Quatrième de couverture :

Cameron devait être à l’abri pour de bon, dans cette vieille ferme paumée au milieu de nulle part. Son père ne les dénicherait jamais dans un coin pareil, avait dit sa mère, N’empêche, dès le premier jour, Cameron sent bien que quelqu’un est déjà là. Invisible, mais il le sent. Il l’entend même. Quels secrets va-t-il découvrir dans cette baraque ?


 

 

Mon avis :
Cameron, adolescent qui a un père dangereux voire psychopathe, passe son temps à fuir avec sa mère le danger que cet homme représente dès qu'il se rapproche. C'est ainsi qu'ils vont aller vivre dans un coin perdu, dans une ferme un peu délabrée, et surtout inquiétante. Pour Cameron c'est surtout l'angoisse des changements de collèges qui le taraude avec, au mieux la solitude, au pire le harcèlement. Dans son nouveau collège, Cody et sa bande de suiveurs minables aboient sur son passage.

Tout inquiète Cameron dans ce nouvel environnement, que ce soit Sinclair le sinistre propriétaire ou les ombres qu'il croit distinguer dehors la nuit, jusqu'à ce petit garçon à bonnet de 
Davy Crockett qui semble roder dans la grange, ou encore la trappe du grenier condamnée au plafond d'une des chambres. Avec toujours l'angoisse du père qui pourrait les retrouver.

Étrangement, des bribes du passé semblent errer dans le présent, tel cet étrange petit garçon ou encore ce qui certains soirs ressemble à des aboiements dans le lointain. Cameron décide d'en apprendre plus sur cette maison dans laquelle il se sent constamment observé mais va aussi tenter d'éclaircir la mort étrange autant qu'horrible de l'ancien propriétaire de nombreuses années auparavant, après le soi-disant départ de sa femme et de son fils que personne n'a jamais revus.

On oscille entre paranormal et folie dans cette histoire en se demandant où est la vérité, où est la raison. C'est passionnant, le suspense est distillé savamment, les moments d'angoisse au rendez-vous, c'est une histoire qui se dévore avec une fin ébouriffante. J'ai énormément aimé ce roman jeunesse ! Comme quoi, il ne faut pas s'arrêter à ça. Nombre de romans estampillés jeunesse sont passionnants quel que soit l'âge qu'on a.

 

Citations :

Page 48 : Je commence mes devoirs. Mais je ne tarde pas à lever le nez pour regarder les étoiles et tâcher d’oublier ma vie. Je me demande qui d’autre contemple la lune en ce moment. Est-ce que des gens se posent la même question ?

 

Page 127 : Je n’ai aucune idée des visages ou des voix de mes arrière-grands-parents, ou de mes ancêtres avant eux, dans des temps anciens. C’est étrange de penser qu’ils étaient comme moi, qu’ils plaisantaient avec des amis, qu’ils fulminaient contre leurs parents, qu’ils ressentaient du courage, de la peur, une foule d’émotions. Mais ils ont disparu maintenant, tous les gens et toutes les choses qui comptaient pour eux ont disparu aussi, et personne ne le sait ni ne s’en préoccupe.

 

 

 

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Mon avis : Rosemary’s baby – Ira Levin

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Élisabeth Janvier

 

Éditions Robert Laffont

 

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Quatrième de couverture :

Guy et Rosemary, qui viennent d'emménager dans un immeuble bourgeois de l'Upper West Side new-yorkais, se lient rapidement d'amitié avec leurs voisins. Ces derniers sont charmants, attentifs aux moindres besoins de Rosemary, surtout depuis qu'ils ont appris qu'elle attendait un bébé, et rien ne devrait ternir la douce euphorie des nouveaux arrivants. Pourtant, peu à peu, le trouble gagne le jeune couple : ces regards bizarres et ces rêves malsains qui hantent les nuits de Rosemary sont-ils normaux ? L'atmosphère s'épaissit, le mystère devient angoissant...
Vendu à cinq millions d'exemplaires dans le monde, salué par la critique, adapté au cinéma par Roman Polanski avec le succès que l'on sait, Rosemary's Baby a laissé une empreinte indélébile sur l'histoire de la littérature américaine et sur l'esprit de ses lecteurs. Un chef-d'oeuvre du genre.

" Ira Levin distille la peur avec une maestria gothique. " Transfuge.

 

 

Mon avis :
J'ai été plongée des les premières pages dans une ambiance surannée, et pour cause, l'histoire commence dans la première moitié des années 1960. Rien que le mot "pédéraste" page 42 nous amène bien loin d'ici. Ceux-ci sont considérés comme des "anormaux tout à fait normaux" par Rosemary page 54.

Guy et Rosemary visitent l'appartement de leurs rêves dans l'Upper West-Side new-yorkais et les premières descriptions de celui-ci donnent surtout envie de fuir, tant les pièces semblent sombres et oppressantes. D'autant que leur ami Hutch les a avertis de la sinistre réputation de cet immeuble où de nombreux drames se sont déroulés. de plus, aussi luxueux soient les appartements ils ne sont pas équipés comme aujourd'hui, il faut aller faire la lessive au sous-sol, dans un dédale de couloirs lugubres de brique au badigeon écaillé, et mal éclairés.

On est rapidement dans une ambiance étouffante, avec des voisins gentils mais envahissants, même Guy semble ne plus être tout à fait le même. le jour où Rosemary tombent enceinte, elle semble ne plus s'appartenir. Tout le monde veut décider pour elle et elle se laisse bêtement faire. La tension va aller crescendo jusqu'au dénouement que pour ma part je ne connaissais pas, n'ayant pas vu le film.

C'est un roman qui se lit bien mais qui personnellement m'a plus exaspérée qu'effrayée. J'ai trouvé tous les personnages horripilants dans leur façon de traiter Rosemary comme une gamine et de tout décider pour elle. Mais bien sûr, ça sert l'intrigue.
C'est une sorte de plongeon dans une époque totalement révolue et tant mieux car un peu étriquée, qui devient tout doucement horrifique, avec une balade plutôt sympa dans le New-York des sixties.
J'ai bien aimé, même si ça ne restera pas pour moi le roman d'horreur du siècle. Je l'ai trouvé assez inoffensif, pas du tout effrayant et assez prévisible. J'ai lu bien d'autres romans réellement terrifiants comme ceux de 
Dean Koontz ou Stephen King, et moins datés surtout. Mais ça reste une lecture agréable et surtout je ne pourrai plus dire que je ne connais pas l'histoire du bébé de Rosemary.

 

Citations :

Page 54 : — Et les voisins n’ont absolument pas l’air anormaux, ajouta-t-elle. À part certains anormaux tout à fait normaux comme les pédérastes ;

 

Page 170 : On prétend aujourd’hui que les femmes enceintes s’inventent des envies uniquement parce qu’elles s’imaginent que c’est ce qu’on attend d’elles. Moi je ne suis pas d’accord avec cette théorie. Je vous dis : si vous avez envie de cornichons au milieu de la nuit, poussez votre pauvre mari au bas du lit et envoyez-le vous en chercher, comme dans les histoires. Accordez-vous tout ce qui vous fera envie. Vous serez étonnée des choses bizarres que votre corps vous réclamera dans les mois qui vont venir.

 

 

 

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Mon avis : L’homme qui savait la langue des serpents – Andrus Kivirähk

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’estonien par Jean-Pierre Minaudier

 

Éditions Le Tripode

 

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Quatrième de couverture :

Empreint de réalisme magique et d'un souffle inspiré des sagas islandaises, L'homme qui savait la langue des serpents révèle l'humour et l'imagination délirante d'Andrus Kivirähk.
Le roman qui connaît un immense succès depuis sa parution en 2007 en Estonie, retrace dans une époque médiévale réinventée la vie d'un homme qui, habitant dans la forêt, voit le monde de ses ancêtres disparaître et la modernité l'emporter.
Grand Prix de L'Imaginaire 2014

 

 

Mon avis :
Amis des bêtes, bienvenue dans ce drôle de monde et cette époque où les humains étaient proches de la nature, où un ours pouvait séduire une femme mariée, où les hérissons étaient de gros crétins, où certains savaient la langue des serpents car ils étaient leurs frères. Hélas, à part Leemet, tout le monde a oublié... Il est le dernier à la parler. Et il nous raconte.

On navigue dans un univers fantasque où on rencontre des femmes qui se flagellent nues en haut des arbres, un vieil ivrogne quasi végétal, un sage des vents, un cul-de-jatte qui fabrique de la vaisselle un peu spéciale, un très vieux poisson barbu, et le Christ est l'idole des jeunes... Il suffit de se laisser porter et permettre à l'enfant qui est en nous de refaire surface, pour croire aux anthropopithèques qui élèvent des gros poux délirants, à la salamandre volante, à Ints la jeune vipère et meilleur ami, à l'Ondin esprit du lac, aux ours tombeurs de ces dames, aux louves laitières... c'est jubilatoire ! Il y a d'un côté ceux de la forêt un peu doux dingues mais parfois plus dingues que doux, qui vivent en harmonie avec la flore mais dominent la faune, dont certains croient aux génies, et de l'autre ceux du village, qui ont tout renié de leur mode de vie passé, qui sont sous l'emprise de la religion, et donneurs de leçons. Les villageois qui passent leur temps à cultiver les champs et aller à la messe, les forestiers qui mangent de l'élan encore et encore et beaucoup trop, entre deux flâneries dans les bois.

Ce roman c'est, transposé au temps des chevaliers, le monde ancien contre le monde moderne. Et vraiment, c'est l'ancien qui est le plus attrayant, féerique, enchanteur, fabuleux, ensorcelant, flippant... Ah !... Ça se voit que j'ai aimé ? Adoré ? Surkiffé ? Oui ! Ce roman est une bulle d'oxygène sylvestre, de croyances ancestrales, de fantasmagorie et aussi de drôlerie. Car oui, c'est joyeux, drôle, et parfois hilarant.

L'auteur se moque allègrement, à travers ses personnages, des croyances et superstitions païennes et de celles liées à la religion et de la récupération qu'ils font, toujours en leur faveur, des événements, tendant à prouver que rien de ce qui arrive n'est dû aux mérites des individus car ils sont forcément l'instrument de Dieu, ou du diable s'il n'y a que de l'indignité et pas de gloire à s'approprier. Il égratigne au passage les sociétés, les pouvoirs en place qui veulent tout contrôler, ne voir qu'une tête, et surtout pas de libres penseurs, la religion toute puissante qui asservit les gens par la peur et l'ignorance, pourvoyeuse de la pensée unique. le contrôle de la nature, et vade retro la liberté ! Des peuples sous le joug de têtes pensantes prosélytes qui haïssent l'apostasie, l'athéisme, le paganisme. Et ça, c'est intemporel. Il faut avouer que la religion en prend pour son grade, à moins que ce ne soit plutôt les ecclésiastiques, mais avec énormément d'humour. Cela dit, le mage aussi prend cher avec ses lutins, ses génies, sa bêtise, sa méchanceté et ses désirs de domination. Et les peuples qui se comportent en bons petits moutons mais jugent durement ceux qui ne marchent pas comme eux dans le rang. Ça m'a mis une chanson en tête : Non les braves gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux.

C'est foisonnant, il s'y passe tant de choses, des joies, des douleurs, le monde qui change, l'amitié, l'amour, la mort, les affres de l'obscurantisme, de l'ignorance et du fanatisme. C'est l'histoire de toute une vie, celle de Leemet le narrateur, et il nous la raconte d'une façon enthousiasmante, enjouée et très drôle, mais aussi douloureuse parfois et quelquefois résignée. J'ai tellement aimé que je ne vais pas m'arrêter là quant à ma découverte des romans de 
Andrus Kivirähk !

 

Citations :

Page 32 : Dites donc à vos parents qu’ils arrêtent avec leurs âneries ! Tous ceux qui ont quelque chose dans la cervelle viennent s’installer au village. À notre époque, c’est idiot de s’enterrer au fin fond d’un fourré en se privant de tous les acquis de la science contemporaine. Ça me fend le cœur de penser à ces pauvres gens qui continuent à végéter dans des cavernes alors que d’autres vivent dans des châteaux ou des palais ! Pourquoi les estoniens devraient-ils être les derniers à se civiliser ? Nous aussi, nous avons droit aux mêmes plaisirs que les autres peuples ! Dites(le à vos parents. S’ils ne pensent pas à eux, qu’ils aient au moins pitié de leurs enfants. Qu’est-ce que vous allez devenir si vous n’apprenez pas à parler allemand et à servir Jésus-Christ ?

 

Page 36 : « Il y en a qui croient aux génies et fréquentent les bois sacrés, et puis d’autres qui croient en Jésus et qui vont à l’église. C’est juste une question de mode. Il n’y a rien d’utile à tirer de tous ces dieux, c’est comme des broches ou des perles, c’est pour faire joli. Rien que des breloques pour s’accrocher au cou ou pour faire joujou. »

 

Page 160 : Ce fut un automne sinistre, peut-être le plus désespéré de tous ceux que j’ai vécus, car même si plus tard j’ai connu des temps encore plus tristes et qu’il m’est arrivé des choses bien plus terrible, à l’époque mon cœur n’était pas encore endurci comme il s’est endurci par la suite, ce qui me rendit les souffrances plus supportables. Pour parler serpent, je n’avais pas encore mué comme je le fis à plusieurs reprises, plus tard, au cours de mon existence, me glissant dans des enveloppes de plus en plus rudes, de plus en plus imperméables aux sensations. À présent, peut-être que rien ne traverse plus. Je porte une pelisse de pierre.

 

Page 164 : Je nageais dans le sommeil, il me roulait dessus comme des vagues, je pouvais pratiquement le toucher ; je le sentais doux comme de la mousse, et en même temps il me glissait entre les doigts comme du sable. Il était tout autour de moi, il comblait tous les vides et tous les orifices, il était chaud et frais en même temps, il flottait partout comme un souffle de vent qui caresse et radoucit l’atmosphère.

 

Page 199 : J’étais vraiment sidéré qu’un être humain puisse être à ce point sans défense, tel un misérable oisillon, qu’il se laisse mordre par un reptile. Bien sûr, j’avais vu de mes propres yeux Ints tuer le moine, mais pour moi les moines et les hommes de fer n’appartenaient pas vraiment à l’espèce humaine vu qu’ils ne comprenaient ni la langue des gens ni celle des serpents, et bafouillaient des choses parfaitement incompréhensibles. C’était comme des espèces de scarabées, on pouvait les mordre et les tuer tant qu’on voulait.

 

Page 234 : Les gens sont toujours en train d’inventer un quelconque croquemitaine pour se décharger sur lui de leurs responsabilités.

 

Page 274 : « Le gamin a mal tourné, désolé. Peut-être parce qu’il a perdu sa mère très tôt. Je n’ai pas su l’élever. Mais qu’est-ce que je peux y faire, c’est quand-même mon fils, je ne peux quand-même pas l’abattre parce qu’il s’est fait moine. »

 

 

 

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Mon avis : Épépé – Ferenc Karinthy

Publié le par Fanfan Do

Traduit du hongrois par Judith et Pierre Karinthy

 

Éditions France Loisirs

 

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Quatrième de couverture :

Un linguiste nommé Budaï s'endort dans l'avion qui le mène à Helsinki pour un congrès. Mystérieusement, l'appareil atterrit ailleurs, dans une ville immense et inconnue de lui. Surtout, la langue qu'on y parle lui est parfaitement inintelligible. Ni la science de Budaï - il maîtrise plusieurs dizaines de langues - ni ses méthodes de déchiffrement les plus éprouvées ne lui permettent de saisir un traître mot du parler local. Tandis qu'il cherche désespérément à retrouver sa route, le mur d'incompréhension se resserre. Sous les apparences familières d'une grande cité moderne, tout paraît étrange et inhumain. Au plus profond de l'incommunicabilité, Budaï fait un séjour en prison, connaît des amours éphémères et participe même à une insurrection à laquelle il ne comprend décidément rien.

 

 

Mon avis :
Le linguiste Budaï, qui devait atterrir à Helsinki pour un congrès, se retrouve dans une ville inconnue où tout le monde parle une langue qu'il n'a jamais entendue, ni même lue. Lui qui maîtrise un grand nombre de langues n'arrive pas à déchiffrer celle qu'il entend partout autour de lui. de plus, dans cette ville il y a des multitudes de piétons et de véhicules qui vont sans cesse en tous sens, et de longues files d'attente partout, tout le temps, pour récupérer ses clés à l'hôtel, pour manger, pour téléphoner d'une cabine.
C'est assez inquiétant et ça m'a évoqué les cauchemars de mon enfance, quand les rêves étaient totalement absurdes et que rien n'avait de sens, quand tout ce qu'on connaît à disparu et que pourtant c'est normal. Quand on veut crier mais qu'aucun son ne sort. Quand on se retrouve seul au monde sans personne qui puisse nous aider. L'angoisse totale.

À part le fait que j'ai trouvé l'ambiance oppressante pratiquement dès le début, au bout de 50 page je me suis demandé si ça allait être comme ça pendant 313 pages. Des descriptions de cohues, de taxis bondés de passagers, de piétons pressés qui bousculent ceux qui ne se poussent pas, des files d'attente interminables partout tout le temps et du coup un ennui terrible car c'est répétitif et il ne se passe rien de nouveau. Ah ! Enfin le métro ! Et des couloirs, des dédales de couloirs, remplis de gens, qui vont, qui viennent,  comme dans une immense fourmilière... Et puis un marché, des camelots qui vendent tout et n'importe quoi et je peux dire que j'en ai eu des palpitations à force. Errer dans une foule aussi dense et se sentir si seul au monde, c'est affreux.

Au bout d'un moment, Budaï comprend que pour s'y retrouver il doit suivre le mouvement, le courant, le flot de la foule. Il décrypte les comportements. Et il boit.
Il y a cependant beaucoup d'opiniâtreté chez Budaï, mais aussi de l'espoir sans cesse renouvelé, sinon à quoi bon avancer. C'est cette espérance qui m'a fait persister dans ma lecture. Car je me suis demandé comment j'allais tenir jusqu'au bout de cet étrange roman... Mais j'avoue que j'ai voulu connaître le fin mot de l'histoire.

Bien sûr, en bon linguiste qu'il est, rompu à la réflexion méthodique, il cherche à déchiffrer cette langue qui lui échappe et on se dit qu'il finira sans doute par y arriver, en tout cas on l'espère, car sinon comment rentrera-t-il chez lui un jour ?
J'ai pensé à une parabole évoquant le bloc de l'est, car ce roman a été écrit en 1970. Ça m'a fait penser à L'URSS, une prison à l'échelle d'un pays, un lieu dont on ne peut pas sortir. Ou alors la métaphore d'autre chose, mais quoi ? Ou peut-être Budaï a-t-il glissé dans une dimension parallèle. Ou il a perdu la raison. Ou encore il dort. En tout cas, au bout d'une bonne centaine de pages j'ai fini par être totalement absorbée par cette étrange histoire.

J'ai trouvé intéressant et amusant le regard de l'auteur sur les comportements humains et l'effet de mimétisme qui en découle parfois, sans en avoir conscience. Et ces brefs et enrichissants aperçus de linguistique qui reviennent çà et là.
Et Épépé,  Dédé, Bébé, Vévé, Etèt, Tiétié, Dédéd
é, Pépé, Ébébé, Tété, Épépép...

Il semble toutefois que ce livre ait des effets secondaires très bizarres. Pendant ma lecture, j'ai fait un cauchemar qui y ressemble étrangement : j'avais été plantée par des amis dans une ville inconnue, sans mon sac donc pas de papiers, ni d'argent, ni de téléphone. J'essayais de téléphoner avec ma main en faisant mon propre numéro dans ma paume sans parvenir au delà de 06... et la peur de n'avoir nulle part où dormir. Oups !

J'en suis venue à bout, un peu laborieusement quand-même. C'est réellement un roman étonnant, une expérience unique. J'ai hélas trouvé le temps long trop souvent.

 

Citations :

Page 16 : Il a tout le temps pour observer les gens qui font la queue avec lui. Des Blancs et des gens de couleur ; devant lui deux jeunes nègres noir de suie à cheveux lisses, plus loin, une femme jaune, les yeux bridés, avec sa petite fille, quelques hommes grands de type germanique, un gros de type méditerranéen, le visage luisant de sueur en manteau à poil de chameau, des Malais basanés, des Arabes ou des Sémites, une blonde à taches de rousseur en pull bleu avec une raquette de tennis : il serait difficile de trouver une race ou une ethnie majoritaire, tout au moins là, devant ce restaurant.

 

Page 21 : Par son métier, il a un sens linguistique particulièrement aiguisé : sa spécialité proprement dite c’est l’étymologie, l’étude de l’origine des mots. Dans le cadre de son travail il aborde les langues les plus diverses : parmi les langues finno-ougriennes, le hongrois et le finnois bien sûr, mais aussi quelque peu le vogoul et l’ostiaque, et puis le turc, un peu l’arabe et le perse ainsi que le slavon, le russe, le tchèque, le slovaque, le polonais et le serbo-croate. Mais ce langage que l’on parle ici n’en rappelle aucune, pas plus le sanscrit, l’hindi, le grec ancien ou moderne, mais il ne peut pas non plus être germanique ; de plus il se débrouille en allemand, en anglais et éventuellement en hollandais.

 

Page 44 : Pendant ce temps-là le soir tombe, les lumières s’allument à l’extérieur ; la veille c’est à peu près à la même heure que l’autobus l’a amené. Donc vingt-quatre heures déjà. Pour l’instant il ne s’attarde pas à cette pensée, il poursuit sa pesante marche en avant, l’âme rongée d’inquiétude : il a appris à se battre, à pousser et bousculer pour avancer, tout comme les autres…

 

Page 85 : C’est en lui-même que doit résider la faute, dans son caractère auquel toute agressivité, toute bousculade sont étrangères, cette révélation vient de s’imposer à lui, tout endormi et ivre qu’il est. Tant qu’il n’arrivera pas à vaincre sa modestie pusillanime, sa crainte d’importuner, il n’arrivera jamais à partir d’ici, ni même à donner de ses nouvelles afin que quelqu’un puisse lui porter secours.

 

Page 96 : Il recommence donc, comme les autres fois, à essayer de communiquer en diverses langues, allemand, hollandais, polonais, portugais, et même turc et perse, et aussi en grec ancien, mais l’autre n’accroche pas, il l’interrompt :

Chérédérébé todidi hodové guruburu pratch… Antapratch, vara lédébédimé karitchaprati…

 

Page 109 : Quelles explications ses proches, ses amis, ses collègues de travail se donnent-ils de ce mystère, et sa femme avant tout, que peut-elle ressentir ? Et son petit garçon, et son chien ?…

 

Page 169 : À proprement parler, n’importe quel habitant de la ville serait en mesure de lui enseigner sa langue, les mots, les règles au fur et à mesure, à condition de lui consacrer suffisamment de temps et de patience. Mais c’est précisément cela qui manque le plus chez les gens d’ici, un peu de courtoisie, de serviabilité, de disponibilité dans leur hâte immodérée et leur éternelle bousculade, quelqu’un qui l’écouterait demander ce dont il a besoin, qui une fois au moins daignerait témoigner de l’intérêt pour ses gesticulations de sourd-muet. Jamais personne n’a pris le temps pour cela depuis son arrivée, personne ne lui a permis de nouer une quelconque relation humaine. Sauf peut-être une seule…

 

Page 173 : Ce sont les soirs qui lui font le plus peur, sa chambre lui semble une cellule de prison ; s’il avait au moins quelque chose à lire dans n’importe quelle langue familière ! Impossible de s’immerger éternellement dans ces rebus indéchiffrables, il ressent un manque affreux de nourritures spirituelles, de détente, il craint d’en devenir fou.

 

Page 264 : Sur le plan matériel il doit faire des choix : ou il économise pour du linge, ou il boit, or en toute sobriété et après réflexion il opte pour la boisson car sans alcool son existence est carrément insupportable.

 

 

 

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Mon avis : Le monstre des Hawkline – Richard Brautigan

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Michel Doury et Lorraine de la Valdène

 

Éditions 10/18

 

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Quatrième de couverture :

"Plus qu'une écriture, ce livre a au fond un parfum :

pour être tout à fait franc,

il faut y voir quelque chose comme le mélange

d'une senteur de genévrier frais le matin

et d'un relent de hasch dans une cuisine.

"Ce roman est écrit pour les copains du Montana",

prévient Brautigan dans une dédicace.

Il faut le recevoir comme ça :

la bonne,

la très bonne histoire contée par un gars

qui doit pas beaucoup hésiter

pour s'en rouler un petit et après,

tasse de thé à la main et bûche dans l'âtre,

s'offrir une rêverie aussi élaborée

que les stratégies échéquiennes de Bobby Fischer.

Un grand maître de l'imagination."

Jean-François Fogel

Libération (1977)

 


 

Mon avis :
1902.
Cameron et Greer, deux tueurs à gages en carton, beaucoup trop empathiques pour être efficaces à 100%.
Un jour Magic Child vient les chercher pour les emmener auprès de sa patronne Miss Hawkline qui a une mission, extrêmement bien payée, pour eux.

Mais alors, comment parler de ce livre complètement barré ?!
Alors que nos deux "héros" sont des tueurs dont l'un a des tocs, qu'ils baisent des putes de quatorze ans (c'est pas moi qui le dit, c'est Brautigan), qu'il y a de-ci de-là des pendus dans le décor, il y a un je ne sais quoi de facétieux dans la narration, et ça donne tout le temps envie de sourire, et parfois ça fait rire.

Des chapitres extrêmement courts, souvent une page et demie, parfois seulement quelques lignes et ça donne un rythme particulier que j'ai bien aimé, comme pour cadencer les étapes de leur voyage et de leur mission. C'est bourré d'échanges absurdes, et de faits anecdotiques, comme par exemple les cerfs qui broutent les fleurs sur les tombes du cimetière, au grand dam du Pasteur.

On avance dans cette histoire farfelue et carrément irrévérencieuse où le langage est cru, où les dialogues sont souvent complètement ébouriffants d'absurdité, et on se retrouve dans le surnaturel sans l'avoir vu venir. Brautigan s'est amusé au mélange des genres en mode loufoque. J'ai trouvé ça réussi, je n'ai jamais rien lu de tel, c'est jubilatoire.

Cette étrange histoire m'a prise par la main et m'a emmenée jusqu'à l'épilogue sans que j'aie envie de m'arrêter. Ce livre est dingue, tout simplement. Je l'ai adoré !

 

Citations :

Page 27 : À la sortie de Grompville, un pendu se balançait au pont qui traversait le fleuve. Son visage portait une expression incrédule, comme s’il ne pouvait pas encore croire qu’il était mort. Simplement, il refusait de croire qu’il était mort. Il n’y croirait qu’après qu’on l’eut enterré.

 

Page 54 : L’ivrogne était étalé le nez dans la poussière au milieu de la grand-rue. Il gisait inconscient et paisible sous le soleil poussiéreux de l’été. Il avait les yeux fermés et un sourire en coin. Un gros chien jaune lui reniflait les bottes et un gros chien noir reniflait le gros chien jaune. Ces chiens étaient heureux. Tous deux remuaient la queue.

 

 

 

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Mon avis : La voiture rouge – Jacques Timmermans

Publié le par Fanfan Do

Autoéditions

 

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Quatrième de couverture :

Après un premier recueil de nouvelles SFF, Jacques Timmermans nous revient avec un roman à la croisée des genres, mêlant intimement le réel et l’imaginaire.
En pénétrant dans son univers littéraire, les pistes de la raison pure se brouillent rapidement, le doute s’insinue peu à peu sur nos vérités inébranlables, et nous apparaît alors fort naturellement en filigrane la part de vrai mystère que recèle notre monde.

Une banale auto, abandonnée non loin d’un village reculé de campagne.
Mais voilà que cette voiture s’est mise soudain à effectuer de petits déplacements imprévisibles. Et que, plus étrange encore, la répétition de cet événement laisse bientôt les villageois dans une totale indifférence.
Jusqu’au jour où débarque Zoé, une journaliste freelance, attirée sur place par la perspective d’un article à sensation, et bien déterminée à tirer cette affaire au clair. Sa tâche va cependant s’avérer plus complexe qu’elle ne se l’était imaginée. Comment peut-elle faire la part des choses, plongée au cœur d’un monde qui lui apparaît de plus en plus indéchiffrable ?
Son enquête, semée d’embûches et de rebondissements, va lui réserver encore bien des surprises…


 

 

Mon avis :
Voilà une histoire qui tourne autour d'une étrange petite voiture rouge qui bouge toute seule et imperceptiblement dans un petit village belge.
Zoé, jeune journaliste qui vient enquêter sur ce phénomène atterrit dans un manoir au fond d'une clairière en guise d'hôtel. Et là je dois dire que j'ai tout de suite aimé son hôte, un vieil homme du nom de Reginald de Sambre. Accueillant, érudit et sympathique, il a un salon rempli d'étagères elles-mêmes remplies de livres… des centaines de livres ! le paradis sur Terre !!!

Zoé a juste un petit défaut typique des citadins, elle prend les habitants de la campagne pour des ploucs qui vivraient quasiment dans une époque lointaine et hors du temps. Mais voilà, elle n'a pas totalement tort concernant ce village. Il semble être hors du monde et du temps. D'ailleurs il est décrit avec beaucoup d'humour notamment quand les habitants sont au troquet du coin.

Les investigations de Zoé la mènent... nulle part en fait. Elle a l'impression de piétiner. Mais à force de persévérance elle va apprendre peu à peu des petites choses, de-ci, de-là, et on sait bien que les petits ruisseaux font les grandes rivières. Avec opiniâtreté elle mène son enquête, car elle ne peut pas revenir bredouille à la rédaction du journal où sa rédac' chef l'attend au tournant. Mais quel sac de nœud le mystère de cette petite voiture de marque inconnue, possédant une immatriculation répertoriée nulle part et qui semble avoir une vie propre!...
Et tout le long de ma lecture je me suis demandée quelle était cette énigme, avec les questions en suspens, les rebondissements et les doutes qui s'insinuent.

Encore une fois j'ai énormément aimé la belle écriture de 
Jacques Timmermans, son humour subtile et son imagination débordante pour embarquer le lecteur dans une histoire abracadabrantesque qui m'a fait passer un excellent moment, autant par le sujet que par les personnages tous hauts en couleur. On apprend par ailleurs beaucoup sur différents sujets tels le rasoir d'Ockham, la vie sylvestre et l'enchevêtrement du mycélium laccaire, la cognition, et d'autres choses encore, et c'est ce que j'adore dans les romans, quand je me distrais et m'instruis en même temps.

Et cette fin !... je ne m'y attendais pas et je pense que c'est le genre d'épilogue qu'on ne peut s'empêcher de retourner dans tous les sens tant il interpelle et fait réfléchir.
Un roman passionnant qui se dévore !

 

Citations :

Page 10 : Mais voilà, l’esprit humain est ainsi fait qu’il s’accommode finalement sans peine de l’irrationnel lorsque la répétition de celui-ci finit par l’intégrer dans la nature habituelle des choses.

 

Page 76 : Le monde que je vois aujourd’hui me paraît malheureusement rongé en profondeur par les prétendues valeurs qu’il met en avant : ce n’est partout que compétitivité, égocentrisme, consommation et accumulation à outrance, toujours plus de croissance aveugle. Difficile de retrouver dans ce soi-disant progrès un vrai sens à notre existence, vous ne pensez pas ?

 

Page 156 : Mais c’est un destin on ne peut plus normal que les parents s’en aillent avant les enfants, l’inverse serait atroce et profondément injuste. Et puis nos êtres chers, une fois disparus, sont finalement avec nous beaucoup plus souvent qu’ils ne l’étaient de leur vivant, n’est-ce pas ?

 

Page 247 : Pourquoi ne nous sommes-nous jamais mariés ?

- On s’aimait trop, peut-être ?

 

 

 

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