Mon avis : L’affaire Alzheimer – Jacques Timmermans
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Quatrième de couverture :
Avec ce roman, Jacques Timmermans nous plonge au cœur de l’industrie des soins de santé, milieu professionnel qu’il connaît bien, tant pour ses belles façades que ses sombres coulisses. Le résultat est à la fois instructif et édifiant, à travers une intrigue où s’entremêlent la science omniprésente et une fiction à ce point réaliste qu’elle en devient crédible. Un récit captivant servi par une écriture fluide, intelligente et teintée d’un humour grinçant, faisant la part belle à la psychologie profonde de personnages parfois attachants, parfois carrément odieux. Un régal !
Le pitch
Quinze ans déjà que Fred travaille comme chercheur dans une grosse multinationale pharmaceutique. Et tandis que sa motivation professionnelle est au plus bas depuis un bon moment, voilà que lui tombe dessus une nouvelle tuile. Les résultats de sa dernière étude sur souris transgéniques sont totalement aberrants, et son patron, au paroxysme d’une fureur incompréhensible, en exige la raison. Fred n’a désormais pas d’autre issue que de trouver au plus vite une explication à cette bizarre énigme.
En spectateur désabusé et souvent impuissant face à l’adversité sournoise de ce milieu professionnel aux pratiques glaçantes, notre brave héros se lance alors dans une pénible enquête, semée d’obstacles et de rebondissements inattendus. Qu’a-t-il donc bien pu se passer ?
Et s’il détenait en fin de compte le remède miracle contre la maladie d’Alzheimer… ?
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Mon avis :
Fred, qui travaille dans une grosse multinationale pharmaceutique, assiste à une des (trop) nombreuses et inutiles réunions où il se fait hurler dessus par son supérieur hiérarchique devant le nouveau directeur. Il exècre ces séances où chacun se fait mousser, ce "fichu management meeting mensuel" où le cynisme lié au gros profits s'étale à travers les propos de Laurence, docteure et directrice de la recherche clinique au sein de l'entreprise.
Il a fallu que je m'adapte dès le départ à un langage (de bureau je suppose) qui m'est totalement étranger : laptop, sharp, CEO², annual review, smart casual, il n'y a que dress code qui ne m'a pas posé de problème. Ça m'a rappelé un sketch des Inconnus... Cela dit, l'auteur se moque aussi "L'envie me vient soudain de lui répondre n'importe quoi, avec un terme anglais tous les trois mots, mais il ne va pas comprendre."
Néanmoins, merci internet qui vous dit tout ce que vous avez besoin de savoir, j'ai trouvé tous les termes.
Mais voilà que Fred nous explique tout depuis le début, le fameux projet G181256 sur lequel il a travaillé dans cette entreprise pharmaceutique dès la fin de son doctorat. Ses recherches étaient en lien avec la maladie d'Alzheimer, épée de Damoclès au-dessus de nos têtes de potentiels futurs grands vieillards. Or, ses expériences sur deux groupes de souris semblent présenter une grosse erreur, voire une énorme aberration, une impossibilité.
Un chef de service caractériel et une mémoire qui semble défaillir depuis peu vont donner des sueurs froides à Fred. de réunions en formations, il traîne son inquiétude et ses questionnements à propos de ses souris Alzheimer, ou pas... et cherche la raison de cette étrangeté.
Ce livre pointe du doigt les méthodes et le manque d'éthique des multinationales qui n'ont comme objectifs que de faire du fric, pressurer leurs salariés comme des citrons et ignorer les dangers de leurs produits. Sans oublier toutes les absurdités administratives et règlements qui se contredisent, qui peut-être cachent autre chose. Et puis la souffrance au travail, devenue courante dans les grandes entreprises, des supérieurs hiérarchiques aux ambitions démesurées qui n'hésitent pas à piétiner leurs collègues, des jeunes loups aux dents longues... Mais aussi l'arrêt de certains médicaments, sans raisons apparentes, laissant des tas de gens dans la détresse, peu importe leur bien-être, seul compte le profit.
Cependant que Fred s'ingénie à tenter de comprendre ce qui est arrivé à ses souris de laboratoire, il semble que ses journées se transforment en parcours du combattant ou en saut d'obstacles, au choix. Il est dans ces moments où tout se combine pour vous pourrir la vie.
Alors je dois dire que je me suis retrouvée, avec cette histoire, dans un univers qui m'est totalement étranger. le milieu de la recherche, et des multinationales, je ne connais pas et j'ai envie de dire tant mieux. Un chouette panier de crabes !
Dans cette foire d'empoigne où tout le monde se fait des courbettes et des sourires hypocrites, Fred est un électron libre, solitaire à l'esprit facétieux, pratiquant l'ironie en son for intérieur.
J'ai appris au passage qu'il y a des entreprises qui fournissent des souris transgéniques Alzheimer (et peut-être pas que...) et ça me laisse sans voix. Nous les humains sommes persuadés d'être au sommet de tout et nous permettons toutes les cruautés, mais plus dure sera la chute.
Ce que Fred va découvrir va violemment l'ébranler...
C'est un roman édifiant sur l'industrie pharmaceutique, mais aussi sur le monde des grosses entreprises en général, où les ambitions personnelles peuvent écraser du monde, sans état d'âme car trop souvent il s'y pratique un management toxique.
C'est le troisième livre de Jacques Timmermans, et le troisième que je lis. Ils sont tous différents mais leur point commun c'est l'humour disséminé çà et là, et c'est à chaque fois un plaisir.
Citations :
Page 14 : — Et qu’y aurait-il d’ailleurs d’illégal à commanditer une étude clinique auprès d’un expert ? Mais qu’est-ce que vous croyez, les bisounours de l’administration ? Vous êtes nouveaux dans le business, ou quoi ? Toutes les boîtes pharma font pareil, et si nous jouons les puritains, l’essentiel du marché sera rapidement passé à la concurrence, dès demain.
Page 124 : — On ne va pas se mentir, Fred, on connaît toi et moi la devise de leur modèle économique de base, qu’« un patient guéri est un client de perdu. » Suffit de voir comment sont habituellement conçues au sein de l’industrie pharma les stratégies de traitement des maladies chroniques.
Page 128 : Le scientifique est d’abord obligé de s’inventer de nouveaux mots pour construire son interprétation du monde, en oubliant presque aussitôt que sa démarche ultérieure ne servira qu’à expliquer les mots et certainement pas ce qu’il y a derrière. Le mot n’est alors qu’un obstacle supplémentaire entre lui et la chose. Et le mystère ne se dévoile aucunement.
Page 221 : Mais retiens donc que le seul et unique objectif d’une boîte pharma est de faire du pognon, avant tout pour satisfaire ses actionnaires.