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Mon avis : La colline aux tilleuls – Gloria Naylor

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Gérard Defaux

 

Éditions Belfond

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

De génération en génération, depuis que le premier Luther Needed a acheté un lopin de terre sans valeur, les Noirs de cette communauté privilégiée ont travaillé à créer ce joyeux qu'est la colline aux tilleuls. Les Noirs qui y habitent ont réussi à la manière des blancs : ils sont riches, puissants et respectés. Mais, en gagnant fortune et pouvoir, ils se sont perdus eux-mêmes ; et leur communauté, vue de l'extérieur, ressemble davantage à l'enfer qu'au paradis.

Lester et Willie, deux jeunes garçons qui cherchent de petits travaux pour acheter leurs cadeaux de Noël, viennent frapper aux portes des maisons de la colline : à leur suite, on découvre l'envers des apparences et le lecteur parcourt les neuf cercles de l'Enfer jusqu'au lac gelé où vit le propriétaire des lieux, Luther-Lucifer.

Traduit de l'américain par Gérard Defaux

Née à New York en 1950, Gloria Naylor étudie au Brooklyn College puis à Yale, avant d'être nommée écrivain-résident à l'université George-Washington. Elle a été lauréate, en 1983, de l'American Book Award pour son premier roman, Les femmes de Brewster Place, dont la traduction française a paru aux éditions Belfond en 1987.

 

 

Mon avis :
Ce roman nous raconte une lignée de Luther Nedeed, descendants du premier du nom, mort en 1879, dont on ignore s'il était un esclave affranchi ou né libre. Chaque génération n'eut qu'un seul garçon, prénommé Luther. Chacun continua de faire prospérer Linden Hills, terre achetée par le premier Luther, qui s'était lancé dans les pompes funèbres ainsi que la location de cabanons à des noirs. Il pensait avec raison que de tout temps les gens continueraient de mourir et d'avoir besoin de se loger.

Chaque Luther, génération après génération, épouse une octavonne à qui il fait un fils, Luther donc, et les mères de ces fils s'appellent juste madame Nedeed.

Une guéguerre entre noirs et blancs a lieu, à coup d'esbroufe et de dollars. Chaque génération de Nedeed semble exceller dans le cynisme le plus abject car l'immoralité par atavisme est de mise. Tous les moyens sont mis en œuvre pour prendre une revanche méritée sur le passé et sur les blancs, tout en ayant un infini mépris pour ses frères et sœurs de couleur, ces stupides noirs qui prient le dieu des blancs.

Un sinistre manipulateur paranoïaque qui se prend pour Dieu tout puissant, un certain racisme des Noirs qui ont réussi, envers les Noirs pauvres, des rêves de grandeur qui rendent les gens stupides, une bonne dose de misogynie de la part de certains, mais aussi de l'amour, de l'amitié, constituent le décor et la communauté de Linden Hills.

Mais qui est Luther Nedeed, ce petit homme très laid au regard glaçant que les gens admirent, envient et détestent ?

Bien qu'ayant une petite idée, tout au long de ma lecture je me suis demandée où l'autrice voulait nous emmener. Elle nous entraîne du 19 au 24 décembre dans ce microcosme, observer la vie, les ambitions, et souvent les secrets et l'intimité de tous ces gens, riches et pauvres en multipliant les flash-backs, et semble vouloir nous dire que, quel que soient nos origines ou notre couleur de peau, si on n'y prend pas garde, le pouvoir corrompt surtout lorsqu'il est accompagné de haine et de rancœurs dans un esprit revanchard.

Hélas, je me suis beaucoup ennuyée. Sans doute parce que les vies des personnages sont trop détaillées y compris dans ce qu'elles ont d'insignifiant , ainsi que leur pensées et ça rend le tout trop lent, trop mou.

Et à la fin, je me suis dit "Tout ça pour ça ?"

Pourtant ça n'était pas inintéressant. Ah l'ambivalence !!…

 

 

Citations :

Page 16 : Le fils du vieux Luther parvint finalement à louer des cabanons le long de Tupelo Drive. Ces nouveaux locataires ne paraissaient pas gênés de la proximité du cimetière. La rumeur voulait qu’ils fussent tous des meurtriers, des médecins marrons, des aventuriers sans foi ni loi, des prédicateurs véreux qui avaient été chassés du Sud et qui, pour dissimuler leurs activités suspectes, avaient besoin de la mémoire courte des morts et de l’ombre longue que leur procuraient les tilleuls.

 

Page 18 : Poussé par l’ambition, un jeune avocat mit finalement la main sur un mandement du XVIIe siècle qui interdisait aux Nègres de posséder, de louer ou de transférer une propriété dans le comté de Wayne. Cette même loi, malheureusement, empêchait aussi les juifs, les catholiques et les adorateurs du Diable d’avoir accès aux service public.

 

Page 89 : son père avait raison : une femme se casse, elle se fait, comme une paire de pantoufles neuves.

 

Page 152 : Je trouve injuste de ne pouvoir me faire des amies parmi les femmes blanches à cause de la couleur de la peau de mon mari, et parmi les femmes noires à cause de sa richesse.

 

Page 183 : Il pénétrait son corps et se retirait d’elle avec la même minutie dont il faisait preuve pour tenir ses comptes à jour, découper sa viande ou tenir son journal.

 

Page 198 : Mais comme il est impossible de parler de ce qui n’a pas lieu, il ne pouvait lui dire qu’il la respectait trop pour la tromper avec des femmes de leur congrégation. Et que, quand elle participait aux réunions du conseil d’administration de la mission ou à celles des dames patronnesses, elle n’avait pas besoin de prendre ce regard, dur et méfiant. Non, il n’y avait pas moyen de lui dire la vérité, de lui avouer que ses infidélités le faisaient souffrir beaucoup plus qu’elle, parce qu’elles faisaient de lui le témoin de sa propre cruauté, et qu’il voyait s’effondrer intérieurement, progressivement, inéluctablement, chaque nouvelle fois un peu plus que la précédente, la seule femme qu’il eut jamais réellement aimée.

 

Page 286 : Y essaient tous de dire avec leur musique ce qui ne peut pas se dire avec des mots. Il n’y a pas réellement de mots pour exprimer l’amour ou la peine. Et, à la façon dont moi je vois les choses, seuls les imbéciles essayent de dire leur amour ou de crier leur peine avec des mots. Au contraire, les gens intelligents font de la musique, on les comprend sans qu’ils aient besoin de parler.

 

Page 310 : La véritable folie, si effrayante qu’elle puisse nous paraître, permet d’oublier le chaos de l’existence. Les gens qui se suicident sont ceux qui essayent de mettre de l’ordre dans leur vie et, quand ils voient que la bataille est perdue, ils préfèrent mettre eux-mêmes fin à leurs jours plutôt que de voir quelqu’un d’autre s’en charger. La folie ne permettrait pas ce genre de lucidité.

 

Page 332 : La seule chose en toi qui changera, c’est ton âge. Oui, il aurait vingt et un ans l’année prochaine. Il ne pouvait rien faire pour empêcher ça, c’était la seule chose sur laquelle il n’eût aucun contrôle. Car, le destin, la prédestination n’existaient pas. Il n’était pas très sur qu’il y eût un Dieu, mais s’il y en avait un, il ne passait pas son temps à tirer les ficelles. C’étaient les gens qui s’en chargeaient, qui décidaient de leur propre destin.

 

 

 

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