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Mon avis : Jane Eyre – Charlotte Brontë

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Sylvère Monod

 

Éditions Pocket Classique

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

Le destin dramatique de Charlotte Brontë transparaît dans l'histoire de son héroïne Jane Eyre, en rupture avec le puritanisme victorien de son époque.
Orpheline maltraitée, sans fortune et sans beauté, Jane entre comme gouvernante au manoir de Thornfield, pour s'éprendre du ténébreux Rochester, le maître des lieux. Entraînés par une passion sensuelle et une égale exigence morale, ils envisagent bientôt le mariage. Mais une présence mystérieuse hante ce domaine perdu entre landes et bruyères. Qui est cette femme, cette « folle » recluse dans une mansarde de Thornfield, qui menace leur union ?
En plein XIXe siècle, dans l'Angleterre victorienne qui voit s'éteindre les sombres lumières du roman gothique et s'étioler les vapeurs du spleen romantique, Charlotte Brontë incarne l'audacieux combat des femmes prêtes à se battre pour leur indépendance et leur liberté.


 

 

Mon avis :
Jane Eyre, un film vu dans mon enfance et qui m'avait bouleversée mais dont je me rappelle que la fin. Donc j'ai eu envie de lire le roman, alors qu'il y a si peu de temps encore ne lisais absolument jamais de classiques.
Les deux premiers chapitres m'ont révoltée car 
Jane Eyre, orpheline, qui a été recueillie par le frère de sa mère, est maltraitée par sa tante et ses cousins. J'ai presque tout de suite été emportée dans l'histoire de cette petite fille martyrisée et rapidement j'ai été captivée par sa personnalité et son destin.

Assez vite je me suis trouvée dans le style de lectures d'antan, où les enfants souffraient, où les adultes étaient odieux et ça m'a ramenée au monde du XIXème siècle tel que je le voyais étant petite. Ben oui parce que voilà... Ça se passait plutôt mal à cette époque pour les enfants ! Surtout les pauvres, et surtout les orphelins. Comme si la vie ne s'était pas suffisamment acharnée et qu'il fallait que les détenteurs de la vérité en rajoute une couche. Ceux-là, c'étaient les chrétiens de tous poils, qui voulaient apprendre à ces pauvres gamins les vertus de l'humilité, de la frugalité (en les affamant carrément), et de l'austérité en général ainsi que des châtiments corporels, pendant que eux-mêmes vivaient dans l'opulence et le tape à l'oeil le plus indécent et vulgaire qui soient tout en oubliant le principe de charité chrétienne.

Mais Jane est une petite rebelle. Elle ne trouve pas normales les méchancetés et les humiliations qu'on lui inflige. de plus, arrivée à l'âge adulte, elle émet des idées ouvertement féministes, trouvant injuste que les hommes aient tous les droits, y compris celui de faire des choses agréables pendant que les femmes sont assignées uniquement à des tâches sans joie.

C'est une histoire lente mais toutefois prenante, et par certains aspects déconcertante, car elle raconte en détail une manière de vivre et les liens sociaux que les moins de 150 ans ne peuvent pas connaître.

En réalité, pour moi ce roman ça a été les montagnes russes. Par moment prenant, puis d'un ennui mortel pendant de nombreuses pages car il ne se passe pas grand-chose et le peu qui se passe on sent qu'on va devoir attendre longtemps pour en connaître la raison.

Ce qui m'a le plus marquée, c'est que les gens riches, nobles ou pas, étaient horriblement méprisants envers le petit peuple, extrêmement mal élevés avec eux et totalement sans filtre, comme s'ils parlaient à un animal qui ne comprend pas ce qu'on lui dit. C'étaient des gens immondes.
Il y a toutefois une histoire d'amour. Un amour sincère, fort, puissant, qui ne se soucie que de l'être et non du paraître. Mais est-il réellement partagé ? Cette question m'a fait trembler…
Puis il y a les lois divines et humaines de l'époque.

Ce roman a réveillé mon ambivalence congénitale avec ses moments intéressants puis ce qui m'a paru interminable avant de redevenir passionnant puis de nouveau long et monotone… J'ai aimé, un peu, beaucoup, moyennement, énormément…
C'est bien écrit mais souvent trop développé à mon goût. On se noie dans les sentiments décrits sur des pages et des pages.

J'ai vu dans ce roman beaucoup de vanité, de mépris pour les classes dites inférieures, d'insensibilité, voire de dureté. J'y ai vu une analyse extrêmement pointue et fine de la nature humaine dans ce qu'elle peut avoir de bon ou de pervers. J'ai vu à quel point la ferveur religieuse peut mettre en danger avec un pied au bord du fanatisme quand le discernement fait défaut. J'ai surtout été effarée par la douleur que peuvent s'infliger certaines personnes par crainte de la colère de Dieu et peur du jugement des Hommes.
Jane est une altruiste, elle est généreuse et totalement désintéressée. C'est un personnage magnifique ! Mais elle n'est pas la seule…
À la fin de ces 760 pages, le constat est que le plaisir de lecture a été plus fort que l'ennui qui m'a plusieurs fois accablée.

 

Citations :

Page 29 : Toutes les violentes tyrannies de John Reed, toute la hautaine indifférence de ses sœurs, toute l’aversion de sa mère, toute la partialité des domestiques remontèrent à la surface de mon esprit agité comme un dépôt noirâtre dans un puits troublé. Pourquoi devais-je toujours souffrir, toujours être rabrouée, toujours accusée, condamnée sans cesse ?

 

Page 58 : - Il n’y a pas de spectacle plus affligeant que celui d’un enfant désobéissant, commença-t-il, surtout quand cet enfant est une petite fille.

 

Page 96 : Sans doute, si j’avais récemment quitté un foyer heureux et des parents affectueux, eût-ce été là l’heure où j’eusse le plus cruellement regretté la séparation ; le vent m’eût attristé le cœur ; le désordre dans l’obscurité eût troublé la paix de mon esprit : dans les circonstances où j’étais, je tirais de l’un et de l’autre une étrange surexcitation et, d’humeur aventureuse et fébrile souhaitais entendre le vent hurler plus sauvagement, voir la pénombre se muer en ténèbres et le désordre dégénérer en clameurs.

 

Page 189 : Il est vain de prétendre que les êtres humains doivent se satisfaire de la tranquillité ; il leur faut du mouvement ; et s’ils n’en trouvent pas, ils en créeront. Des millions d’individus sont condamnés à un destin plus immobile que le mien, mais ces millions sont en rébellion silencieuse contre leur sort. Nul ne sait combien de révoltes, en dehors des révoltes politiques, fermentent dans la masse des vivants qui peuplent la terre. Les femmes sont censées être très paisibles en général, mais les femmes ont tout autant de sensibilité que les hommes ; il leur faut des occasions d’exercer leurs facultés et un champ d’action tout comme à leurs frères ; elles souffrent de contraintes trop rigides, d’une stagnation trop complète, exactement comme en souffriraient des hommes ; et c’est par étroitesse d’esprit que leurs compagnons plus privilégiés décrètent qu’elles devraient se borner à faire des entremets et à tricoter des chaussettes, à jouer du piano ou à broder des sacs. Il est sot de les condamner ou de se moquer d’elles quand elles cherchent à faire ou à apprendre plus de choses que la coutume n’a déclarées nécessaires aux personnes de leur sexe.

 

Page 196 : Je n’avais pour ainsi dire jamais vu de beau jeune homme ; jamais de ma vie je n’avais adressé la parole à un tel personnage. J’éprouvais en théorie de la déférence et de la vénération pour la beauté, l’élégance, la bravoure, le charme ; mais si j’avais rencontré ces qualités incarnées dans un corps masculin, j’aurais compris d’instinct qu’elles n’étaient ni ne pouvaient être en sympathie avec aucun trait de ma propre nature et je les eusse évitées comme on évite le feu, la foudre ou tout autre objet lumineux mais de nature hostile.

 

Page 235 : Vous n’avez pas le droit de me faire des sermons, jeune néophyte, qui n’avez point franchi le portail de la vie et êtes absolument ignorante de ses mystères.

 

Page 316 : Mlle Ingram était un objet indigne de la jalousie : elle était trop inférieure pour susciter un tel sentiment. Excusez l’apparent paradoxe ; je dis bien ce que je veux dire. Elle était très brillante, mais elle n’était pas authentique ; elle avait une belle prestance et nombre de talents éclatants, mais son esprit était pauvre et son cœur naturellement sec ; rien ne fleurissait spontanément sur un pareil sol ; nul fruit n’en jaillissait aisément et naturellement pour enchanter par sa fraîcheur.

 

Page 398 : - Georgiana, il est certain que nul animal plus vain ou plus absurde que toi n’a jamais pu encombrer la terre de sa présence . Tu n’avais pas le droit de naître ; car tu ne tires aucun parti de la vie. Au lieu de vivre pour toi-même, en toi-même et avec toi-même, comme le doit faire tout être raisonnable, tu ne cherches qu’à accrocher ta faiblesse à la force d’une autre personne ; si tu ne trouves ni homme ni femme qui accepte de se charger d’un être aussi gras, aussi débile, aussi bouffi, aussi inutile que toi, tu t’écries qu’on te maltraite, qu’on te néglige et qu’on te rend malheureuse.

 

Page 400 : Il y a des gens qui ne font guère de cas des sentiments sincères et généreux ; mais voilà que l’absence de tels sentiments rendait l’une de ces deux natures insupportablement pointue, et l’autre méprisablement fade. La sensibilité sans le jugement n’est en vérité qu’une potion bien insipide ; mais le jugement qui n’est pas tempéré par la sensibilité est une substance trop amère et trop rugueuse pour pouvoir être avalée par un gosier humain.

 

Page 462 : Mon futur époux devenait pour moi tout l’univers ; et plus que l’univers terrestre, presque mon espoir d’au-delà. Il se dressait entre moi et toutes mes pensées religieuses, comme une éclipse s’interpose entre l’homme et le grand soleil. À cette époque, une créature m’empêchait de voir Dieu, car de cette créature j’avais fait une idole.

 

Page 525 : Engager une maîtresse est ce qu’il y a de pire, après l’achat d’une esclave ; l’une et l’autre sont souvent par nature et toujours par position des inférieures ; or, vivre en familiarité avec des inférieurs est avilissant.

 

Page 541 : Au milieu de la douleur de mon cœur et de la farouche résistance de mes principes moraux je me détestais. Je ne tirais aucune consolation de ma propre approbation ; aucune non plus du sentiment de ma propre dignité.

 

Page 662 : Ce salon n’est pas son domaine, pensai-je. La crête de l’Himalaya, la brousse du pays cafre, ou même le marécage pestilentiel de la côte de Guinée lui conviendraient mieux. Il a bien raison de se dérober au calme de la vie familiale ; ce n’est pas son élément ; ses facultés y restent stagnantes, elles ne peuvent se développer ou y apparaître à leur avantage. C’est dans les scènes de lutte et de péril, là où le courage s’affirme, où l’énergie s’exerce, où l’endurance est mise à rude épreuve, qu’il pourra parler et agir, en chef et en supérieur. Mais devant cet âtre un enfant joyeux aurait l’avantage sur lui.

 

Page 689 : Je n’avais guère de fierté en pareille circonstance ; j’ai toujours préféré être heureuse plutôt que digne ; je lui courus donc après ; il était au pied de l’escalier.

 

 

 

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