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premier roman

Mon avis : Parcourir la Terre disparue – Erin Swan

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Juliane Nivelt

 

Éditions Gallmeister

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

En 1873, Samson, chasseur de bisons fraîchement immigré, parcourt les Grandes Plaines, plein d’optimisme devant son nouveau pays.
En 1975, Bea, adolescente enceinte et mutique, arpente le même paysage, et finit par atterrir dans une institution où un psychiatre s’efforce de déchiffrer ses dessins.
En 2027, après une série de tornades dévastatrices, un ingénieur abandonne son existence routinière pour concevoir une ville flottante sur le site de ce qui fut La Nouvelle-Orléans, où il fonde avec sa fille poétesse une communauté de rêveurs et de vagabonds.
En 2073, la Terre est entièrement noyée, et la jeune Moon n’a entendu à son propos que des histoires. Vivant sur Mars, elle s’interroge sur l’avenir de son espèce.
Parcourir la Terre disparue est l’histoire d’une famille, de celles et ceux qui, génération après génération, héritent d’un même rêve. Avec la même pugnacité et le même espoir, ils tentent de survivre sur une Terre qui se couvre lentement d’eau.


 

 

Mon avis :
Cet étrange roman m'a semblé, de prime abord, empli de solitudes et d'angoisses. Quelque chose d'hypnotique nous emmène à travers les vies de Samson, Moon, Bea, Paul, Kaiser, Michel-Ange, Penelope, Eva. C'est oppressant et addictif à la fois. On part de 1873 pour aller en 2073 puis en 1975 et ainsi de suite. Tous ces personnages sont de la même lignée ou très proches. On fait des allers-retours dans le temps, dans un désordre chronologique étudié. C'est quasi-hypnotique, on est emporté de lignes en lignes, de pages en pages sans avoir envie d'en sortir. Il y a tant de poésie dans ces mots, tant de justesse.

La narration m'a beaucoup évoqué la tradition orale, ces histoires familiales ou tribales qu'on se transmettait de génération en génération. Chaque personnage finit par composer un bout de la légende.
Un don de prescience incontrôlé dont chaque membre de la lignée semble avoir hérité.
Le cauchemar récurent d'un homme marchant dans un désert.
Une étoile rouge.
Le réchauffement climatique, les tempêtes, la montée des eaux, l'exode des populations, un avenir redoutable.

C'est un roman de fin du monde, de fin d'un monde et il m'a parfois donné envie de pleurer à l'idée de tout ce qu'on avait à perdre, de tout ce qu'on va perdre, par notre faute.
C'est tout à la fois de l'anticipation, de la science fiction, une dystopie et un roman écologiste. C'est terrifiant et beau. Ça nous parle d'un monde dévasté, d'avenir, de rêve, d'utopie, de folie.

J'ai trouvé ce roman d'une beauté calme et envoûtante. Il m'a totalement émerveillée. J'aurais voulu qu'il dure encore et encore. J'ai infiniment aimé les personnages, les lieux, les descriptions, tout, absolument tout.
Quand un roman m'enveloppe à ce point dans son ambiance, dans son propos, alors je me sens comblée. Et je me dis que j'ai de la chance d'aimer les livres car ils nous offrent des univers parallèles, d'autres vies dans la vie.
Ah vraiment !! Pourquoi ne l'ai-je pas lu avant ?

 

Citations :

Page ,97 : Même si elle n’en a pas envie, même si elle entend le cerf tousser sa peur et sa solitude aussi vaste que le ciel, elle s’exécute.

 

Page 100 : Selon mon père, les Américains étaient des hommes d’honneur qui se battaient pour la liberté. (Il rit.) La merveilleuse liberté de vendre, d’acheter, d’être de bons chrétiens et de violer ces terres. On aurait dû foutre la pais aux Indiens.

 

Page 127 : Il a vécu dans cinq familles d’accueil. Il se rappelle les sols à cause du temps qu’il a passé à les scruter — linoléum gris, moquette orange, contreplaqué souillé de taches de peinture. Certains parents s’intéressaient à lui, le bombardant de questions. La plupart l’ignoraient, déposant sur la table une barquette réchauffée au micro-ondes sans croiser son regard.

 

Page 157 : Paul se demande quel effet cela fait, de savoir d’où on vient.

 

Page 201 : Cette vie est merdique, Paul. Le moins qu’on puisse faire, c’est d’y injecter un peu de beauté.

 

Page 251 : Je quittais Kansas City pour suivre Pa. Nous faisions le même cauchemar, où un homme sans visage marchait dans le désert. Nous étions père et fille. Nous étions liés. Je ne pouvais y échapper.

 

Page 345 : Si on regarde une chose suffisamment longtemps, peu importe combien elle est fantastique, elle finit par devenir banale.

 

 

 

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Mon avis : Bien sûr que les poissons ont froid – Fanny Ruwet

Publié le par Fanfan Do

Éditions L’Iconoclaste

 

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Quatrième de couverture :

Vous tenez entre les mains l'irrésistible roman de Fanny Ruwet...
Il parle de dépression, de rencontres amoureuses sur les réseaux sociaux, de crise existentielle et d'alcoolisme mondain. Il nous embarque dans une intrigue à couper le souffle. Et évidemment, la fin va vous surprendre.
C'est un livre truffé de blagues, contrairement à cette présentation, son éditeur ayant mois d'humour que son autrice. Vous allez verser quelques larmes, mais surtout rire, beaucoup rire.
Et ça, c'est rare en littérature, non?

 

Humoriste belge, Fanny Ruwet est à 28 ans une figure montante de la scène comique. Depuis 2018, elle tient un billet d’humeur dans l’émission « La Bande Originale » sur France Inter. En trois ans, elle a rencontré un succès incroyable avec son spectacle Bon anniversaire Jean. Bien sûr que les poissons ont froid est son premier roman.


 

 

Mon avis :
Fanny Ruwet tient un billet d'humeur dans l'émission de Nagui et Leïla Kaddour-Boudadi "La bande originale" sur France Inter et c'est toujours d'une drôlerie à tomber par terre, un humour ravageur qui me fait énormément rire… J'adore !! Et ça, c'est son premier roman, que je ne pouvais absolument pas rater. Je me le suis donc offert pour Noël.

Après avoir quitté Alexandre et pendant la dégustation d'un pain-saucisse avec son pote Maxime, Allie lui raconte sa folle histoire d'amour avec Nour, un ado de Montpellier, via internet, quand elle avait 15 ans et qu'elle s'ennuyait l'été. Elle l'avait rencontré sur un blog de folk, et rapidement ils s'étaient mis à roucouler comme deux crétins tout juste pubères. Puis ils se sont perdus sans jamais s'être rencontrés. Et c'est vraiment drôle les pensées pseudo romantiques stupides qu'on peut avoir à cet âge là. Ça doit être intemporel, ça m'a rappelé ma propre adolescence XD. Maxime lui propose alors de chercher à retrouver Nour.

Elle raconte aussi sa famille un peu déglinguée, avec humour et autodérision : Notre famille était en miettes, mais au moins tous les morceaux étaient ensemble. Et aussi ses terreurs existentielles, ses histoires de coeur, ses histoires de cul avec parfois quelques révélations qui lui sautent aux yeux de façon très crue et tellement drôle !!! Ses rendez-vous foireux, son attirance pour les filles, sa peur de retrouver Nour et d'abîmer les souvenirs avec la triste réalité.

Alors ce livre est véritablement un page turner ! D'abord, il est drôle et je peux même dire qu'à chaque punchline un peu crue, j'étais morte de rire et j'entendais la voix de 
Fanny Ruwet, que j'adore écouter… je l'ai déjà dit !? Ah ouais… Et puis il dit (le livre ;) ) des choses assez profondes et belles, et parfois tristes, parce que la vie c'est plein de tout. Ensuite, la recherche de Nour en mode Maigret 2.0 (ou 3.0 ou 4.0, je ne sais pas où on en est arrivé XD) m'a tenue en haleine jusqu'au bout et j'ai adoré !
Et à part internet, qui n'existait pas quand j'avais 27 ans, je me suis pas mal reconnue dans ce personnage un peu barré qu'est Allie, et ça m'a fait comme un voyage dans le temps.

Et sinon, connaissez-vous la différence entre Hermione Granger et Effy Stonem, Debra Morgan, Fleabag, Eve Polastri, 
Alex Rider, Holden Caulfield (oups pas encore lu L'attrape-coeur), Rue Bennett, Molly Moon ?? Il n'y a que Hermione Granger que je connais. Je dois avoir dépassé la limite d'âge pour certaines de ces références Hi Hi ! Il y a d'autres réf que j'avais à force de les entendre de mes enfants qui sont de la génération de l'autrice, ouf !.. L'honneur est presque sauf… Pour le reste, merci internet… Et la réf pour les vieux à la fin, ben je ne l'ai pas vraiment… oups, je suis hors d'âge MDR.

Pour résumer, j'ai adoré cette histoire d'une meuf un peu bipolaire, un peu pochtronne en soirées, à fleur de peau avec un cœur grand comme ça (désolée, il manque le geste), un chat, et un meilleur ami au top !!! Et tellement rigolote !

Et vraiment, que 
Fanny Ruwet soit éditée chez L'ICONOCLASTE, c'est énorme ! Ça lui va tellement bien MOUAHAHAH !!!
Bon, ben moi je vais aller lire L'attrape-cœur hein !

 

Citations :

Page 25 : J’ai toujours trouvé ça bizarrement agréable, de rester cloîtrée à l’intérieur quand il fait chaud. Ça me donne l’impression d’être dans un bocal sous pression. D’exister en dehors du monde et d’avoir accès à des heures secrètes dont personne ne soupçonne l’existence.

 

Page 27 : Déjà à l’époque, j’étais obsédée par les oiseaux blessés (mon préféré, c’est le poulet) et ça n’a jamais changé : dès que les gens sont tristes, j’ai envie de prendre soin d’eux. De les serrer contre moi et de leur répéter que tout ira bien. Parfois, je me dis que je devrais draguer dans les salles d’attentes de psy. « Ce qui m’a plu chez lui ? Ses traumas. Je l’ai aimé à la seconde où j’ai compris qu’on allait mutuellement se tirer vers le bas. »

 

Page 51 : Ça me bute que les gens puissent avoir envie de faire des gosses alors qu’on passe clairement sa vie d’adulte à essayer de se remettre de son enfance.

 

Page 91 : Je savais que je lui plaisais. Il me courait après depuis plusieurs mois en n’ayant apparemment pas compris deux choses : qu’il avait établi un campement définitif dans ma friendzone et que, clairement, en dehors du petit crush que j’avais eu sur Nour, je préférais les filles.

 

Page 93 : En étant une fille et en aimant les filles, il n’était pas possible d’exister en tant que personne. Un peu comme les femmes sans enfant, les lesbiennes ne sont pas considérées comme des êtres accomplis et épanouis : «Il y a tellement de choses qu’elles ne peuvent pas comprendre ». Une lesbienne l’est forcément par ignorance, « parce qu’elle ne sait pas ce qu’elle rate ».

 

Page 195 : Un des trucs qui me déprime le plus au sujet des gens morts, c’est qu’il n’y aura jamais de nouvelles photos d’eux.

 

 

 

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Mon avis : Deep winter – Samuel W. Gailey

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Laura Derajinski

 

Éditions Gallmeister - Totem

 

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Quatrième de couverture :

Danny ne sait pas quoi faire du cadavre qu'il vient de découvrir. Ce corps, c'est celui de Mindy, sa seule amie dans la petite ville de Wyalusing, en Pennsylvanie. Depuis la tragédie survenue dans son enfance qui l'a laissé orphelin et simple d'esprit, tous les habitants de Wyalusing méprisent Danny, le craignent et l'évitent. Aux yeux du pourri qui sert de shérif adjoint à la ville, Danny est le coupable idéal pour ce crime. Alors en quelques heures, l'équilibre précaire qui régnait jusqu'ici à Wyalusing va chavirer.


 

 

Mon avis :
Le roman commence sur la découverte par Danny du corps de Mindy. Danny, géant débonnaire et simple d'esprit, et Mindy qui était une des seules personnes à être gentille avec lui.
Puis retour en arrière, dix-huit heures plus tôt, on fait la connaissance de Sokowski, shérif adjoint et gros connard du genre viril répugnant, arrogant, méprisant, bête et méchant, obsédé et phallocrate, superbe échantillon de la nullité incarnée, et son âme damnée Carl, le suiveur et "gros tas débile". Une vraie équipe de champions…

Les chapitres portent à tour de rôle les noms de Danny, Mindy et Sokowski, puis peu à peu, d'autres personnages viennent s'ajouter : Carl, Lester, Taggart, etc... On les découvre les uns après les autres, qui vivent tous avec leurs démons, des vies difficiles et douloureuses, souvent faites de regrets, de sentiments d'échec et d'incompréhension.

Évidemment Danny apparaît comme le coupable idéal dans le meurtre de Mindy. Une angoisse s'installe, liée à un terrible sentiment d'injustice, mais aussi à la candeur et la douceur du suspect.
Dans ce lieu enneigé, à travers ces bois glacés, avec ces américains bruts de décoffrage, j'ai été tenue en haleine, totalement happée par l'histoire et l'ambiance. Car certains veulent faire justice eux-mêmes.

Quand l'incompétence, la corruption et la perversité se conjuguent pour faire d'une vie un enfer, on se sent totalement en empathie avec Danny, ce grand petit garçon au cœur tendre.
On fait là une incursion dans l'Amérique profonde qui sent la bière, le whiskey et le shit, qui défouraille à tout va, qui cogne avant de réfléchir mais qui ne réfléchit pas forcément après.
Un roman totalement palpitant et angoissant.
J'ai beaucoup aimé, j'aurais voulu pouvoir le lire d'une traite. Hélas, les obligations…

 

Citations :

Page 13 : Il faisait souvent de son mieux pour ne pas pleurer. Oncle Brett disait que les vrais hommes ne pleurent jamais comme des bébés.

 

Page 58 : Sokowski et Carl étaient déjà défoncés quand ils arrivèrent au Teddie’s. Pendant les trente-deux minutes de trajet, ils avaient fait tourner une bouteille de Wild Turkey et deux gros joints. Ils avaient parlé de baise et de came, et encore de baise. Ils avaient évoqué celles qu’ils baiseraient, et celles qu’ils ne baiseraient pas, et celles qu’ils avaient déjà baisées. Toute cette conversation de baise les avait bien fait marrer.

 

Page 111 : Il critiquait peut-être tout le temps Kelly quand il était avec Sokowski, mais c’était une femme bien — elle l’avait épousé, lui et son cul minable. C’était une bonne maman, aussi. Elle élevait les mômes du mieux qu’elle pouvait. Et qu’est-ce qu’elle obtenait en échange ? Tout ce qu’il faisait, lui, c’était râler et se plaindre de toujours manger des escalopes de poulet panées, que le mobil-home était une vraie porcherie, qu’elle passait son temps à glandouiller en regardant cette foutue Roue de la fortune à la con.

 

Page 113 : Taggart gardait toujours un livre à portée de main. Il aimait mieux lire que discuter avec les atrophiés du cerveau qui lui faisaient office de collègues.

 

 

 

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Mon avis : Ce que je sais de toi – Eric Chacour

Publié le par Fanfan Do

Éditions Philippe Rey

 

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Quatrième de couverture :

Le Caire, années 1980. La vie bien rangée de Tarek est devenue un carcan. Jeune médecin ayant repris le cabinet médical de son père, il partage son existence entre un métier prenant et le quotidien familial où se côtoient une discrète femme aimante, une matriarche autoritaire follement éprise de la France, une sœur confidente et la domestique, gardienne des secrets familiaux. L'ouverture par Tarek d'un dispensaire dans le quartier défavorisé du Moqattam est une bouffée d'oxygène, une reconnexion nécessaire au sens de son travail. Jusqu'au jour où une surprenante amitié naît entre lui et un habitant du lieu, Ali, qu'il va prendre sous son aile. Comment celui qui n'a rien peut-il apporter autant à celui qui semble déjà tout avoir ? Un vent de liberté ne tarde pas à ébranler les certitudes de Tarek et bouleverse sa vie.
Premier roman servi par une écriture ciselée, empreint d'humour, de sensualité et de délicatesse, Ce que je sais de toi entraîne le lecteur dans la communauté levantine d'un Caire bouillonnant, depuis le règne de Nasser jusqu'aux années 2000. Au fil de dévoilements successifs distillés avec brio par une audacieuse narration, il décrit un clan déchiré, une société en pleine transformation, et le destin émouvant d'un homme en quête de sa vérité.

 


Mon avis :
Ce roman était dans ma wishlist, j'ai eu la chance de le recevoir grâce à Lecteurs.com alors MERCI MERCI MERCI.

Le Caire - 1961.
Ce roman débute en un temps où les enfants ne choisissaient généralement pas ce qu'ils feraient dans la vie. À la question de son père lui demandant ce qu'il aimerait plus tard, de fil en aiguille Tarek dit involontairement qu'il voudra être médecin. Donc il sera médecin, comme son père. Il suivra ce chemin tracé pour lui de longue date, tranquillement, consciencieusement.

L'histoire fait des allers-retours dans plusieurs époques et m'a appris un certains nombre de choses sur l'histoire de l'Égypte et le cosmopolitisme cairote.
Ce qui m'a sauté aux yeux très rapidement, c'est que l'auteur décrit les sentiments, les pensées et les comportements humains magnifiquement. C'est comme s'il m'avait donné les clés qui me permettaient soudain de comprendre mes semblables : […] il n'y a pas d'adultes au comportement d'enfant, il n'y a que des enfants qui ont atteint l'âge où le doute est honteux.
Une chose m'a attristée et heurtée, seul Tarek semble avoir de l'importance aux yeux de ses parents. Ce que dit ou pense Nesrine, sa sœur cadette, n'est jamais entendu. Elle est quantité négligeable.
Par ailleurs, le narrateur s'adresse à Tarek et le tutoie. Cette façon de faire, très inhabituelle, m'a énormément plu. Il lui parle, et de fait nous raconte son histoire et ça rend le tout assez intime. Mais Tarek et son côté humaniste qui ne se satisfaisait plus uniquement de la médecine pour les riches et de la petite vie convenable qu'elle engendre, au fond s'est-il trouvé où s'est-il perdu ? Car son chemin tout tracé va prendre des voies sinueuses qui affecteront le cours de sa vie.

J'ai beaucoup aimé la narration qui met une petite distance entre les personnages et nous tout en nous invitant dans leurs vies et surtout celle de Tarek, avec ce qu'il faut de pudeur, sans jamais aucun voyeurisme ni pathos. On finira par apprendre qui est le narrateur puis d'autres choses, auxquelles je ne m'attendais pas du tout et je l'ai ressenti comme le second souffle de cette histoire.

Une écriture belle et envoûtante, tout en nuances et délicatesse qui nous raconte l'histoire d'une vie qui finalement n'entre pas dans les cases qui lui avaient été assignées. Combien de gens regardent en arrière et regrettent ? Sans doute beaucoup. Pourtant, à quoi bon ?
J'ai adoré ce roman qui nous parle de la vie et des choix, ou non-choix, qu'on fait, qui peuvent être aux antipodes de ce qu'on aurait pu imaginer de plus fou, qui forgent irrémédiablement nos existences. C'est peut-être ça qu'on appelle le destin et qui pourtant n'est que le résultat de nos décisions. Ce roman nous emmène de 1961 à 2001, du Caire à Montréal. C'est aussi l'histoire d'une quête, du besoin de combler un manque, le manque de quelque chose d'essentiel.

 

Citations :

Page 17 : Tu appréciais davantage la compagnie des adultes que celle des enfants de ton âge. Tu étais ébloui par ceux qui n’hésitent jamais. Ceux qui, avec le même aplomb, peuvent critiquer un Président, une loi ou une équipe de football. Ceux dont chaque geste semble affirmer qu’ils détiennent la vérité pleine et entière. Ceux qui régleraient en un claquement de doigts les questions de la Palestine, des Frères musulmans, du barrage d’Assouan ou des nationalisations. Tu finissais par croire que c’était cela , l’âge adulte : la disparition de toute forme de doute.

 

Page 35 : De même que les zabbalines du Moqattam dédiaient leur existence à redonner vie aux objets qui finissaient entre leurs mains, tu t’appliquais à soigner ces corps malmenés, ces membres disloqués, ces plaies purulentes dont personne ne distinguait plus l’odeur tant ce bidonville concentrait à lui seul les exhalaisons les plus fétides.

 

Page 182 : Je ne comprenais pas ces lettres mais je les aimais. Elles te disaient. Je ne pouvais pas encore m’en rendre compte, mais elles étaient à la fois honteuses et sublimes. Elles étaient rédigées dans l’arabe empêché de celui qui a dû apprendre tard à l’écrire. Elles avaient le tracé hésitant, la syntaxe malmenée, elles respiraient l’effort, le doute, la sueur. Elles portaient en chaque mot la crainte, celle d’être ridicules, perdues ou interceptées, de ne jamais te parvenir. Elles sentaient le mauvais papier, la nature et le manque. Elles ne disaient jamais « Je t’aime ». Elles disaient toutes « Je t’aime ». Elles ne disaient jamais ce qu’elles disaient vraiment mais j’étais, à cet âge, bien loin de l’entrevoir.

 

Page 279 : La nouvelle année est pourtant vieille de quelques semaines, mais le temps ne se mesure pas de la même manière dans un hôpital. Ceux qui savent qu’ils s’en sortiront cherchent à le tuer, les autres tentent d’en gagner un peu.

 

 

 

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Mon avis : Le bal des folles – Victoria Mas

Publié le par Fanfan Do

Éditions Albin Michel

 

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Quatrième de couverture :

« Depuis l’arrivée de Charcot à la Salpêtrière, on dit que seules les véritables hystériques y sont internées. Mais le doute subsiste »

 

Chaque année, à la mi-carême, se tient, à la Salpêtrière, le très mondain Bal des folles. Le temps d'une soirée, le Tout-Paris s'encanaille sur des airs de valse et de polka en compagnie de femmes déguisées en colombines, gitanes, zouaves et autres mousquetaires. Cette scène joyeuse cache une réalité sordide : ce bal "costumé et dansant" n'est rien d'autre qu'une des dernières expérimentations de Charcot, adepte de l'exposition des fous. Dans ce livre terrible, puissant, écrit au scalpel, Victoria Mas choisit de suivre le destin de ces femmes victimes d'une société masculine qui leur interdit toute déviance et les emprisonne. Parmi elles, Geneviève, dévouée corps et âme au service du célèbre neurologue ; Louise, une jeune fille "abusée" par son oncle ; Thérèse, une prostituée au grand cœur qui a eu le tort de jeter son souteneur dans la Seine ; Eugénie Cléry enfin qui, parce qu'elle dialogue avec les morts, est envoyée par son propre père croupir entre les murs de ce qu'il faut bien appeler une prison. Un hymne à la liberté pour toutes les femmes que le XIXe siècle a essayé de contraindre au silence.


 

 

Mon avis :
Mesdames, tenez vous le pour dit, dès les premières pages on sait que la place qui nous est assignée en 1885 est à la maison et en silence ! Les femmes n'ont pas voix au chapitre car ce qu'elles pourraient avoir à dire n'intéresse personne. Et si elles ont la mauvaise idée de la ramener, d'avoir des envies, des rêves, ou qu'elles ne supportent pas le mal qu'on leur a fait, on les enferme à la Salpêtrière chez les folles !
Voilà comment les femmes pouvaient être traitées à l'époque.

Victoria Mas raconte le mal qui a été fait aux femmes, de tous temps. Mais plus précisément, il semble qu'on enfermait facilement celles qui étaient considérées comme folles dès qu'elles dérangeaient un peu, telle Louise, violée à treize ans, ou Eugénie avec qui les défunts entrent en contact. Car croire en Dieu, que personne n'a jamais vu, c'est bien, communiquer avec les morts c'est mal ! Il y a des choses acceptables et d'autres non.

Le professeur Charcot, roi du diagnostic psychiatrique à l'emporte-pièce, est le maître absolu en ce lieu, vénéré par ses pairs, ses étudiants, les infirmières, et même par les internées. Son avis et sa parole ne sont jamais mis en doute, ce qui le rend hermétique à toute forme d'avis extérieur, d'introspection, ou même d'empathie envers ses patientes.

J'ai bien aimé cette histoire qui part d'un phénomène de société totalement révoltant qui pourtant ne choquait personne à l'époque. Cependant, bien qu'il semble extrêmement bien documenté et que je l'ai dévoré, ce roman ne m'a pas provoqué un grand enthousiasme, je n'ai pas réussi à m'attacher aux personnages ni à détester ceux qui pourtant auraient dû provoquer chez moi une certaine aversion.

 

Citations :

Page 24 : Le père n’a pas levé les yeux de son assiette. Maintenant qu’il a parlé, les autres peuvent prendre la parole.

 

Page 25 : La jeune fille de dix-neuf ans retient un sourire. Si elle ne provoquait pas son père, celui-ci ne daignerait même pas lui adresser un regard. Elle sait que son existence n’intéressera le patriarche que lorsqu’un parti de bonne famille, c’est à dire une famille d’avocats ou de notaires, comme la leur, souhaitera l’épouser. Ce sera alors la seule valeur qu’elle aura aux yeux de son père – la valeur d’épouse.

 

Page 54 : Son corset la gênait horriblement. Aurait-elle su qu’elle allait parcourir une aussi longue distance, elle l’aurait laissé dans une armoire. Cet accessoire a clairement pour seul but d’immobiliser les femmes dans une posture prétendument désirable – non de leur permettre d’être libres de leurs mouvements ! Comme si les entraves intellectuelles n’étaient pas déjà suffisantes, il fallait les limiter physiquement. À croire que pour imposer de telles barrières, les hommes méprisaient moins les femmes qu’il ne les redoutaient.

 

Page 86 : L’ancienne petite fille catholique, traînée de force à l’église chaque dimanche de son enfance, a toujours récité la prière avec dédain. Aussi loin qu’elle s’en souvienne, tout ce qui touchait de près ou de loin à ce lieu lui faisait horreur – les rudes bancs en bois, le Christ mourant sur sa croix, l’hostie qu’on forçait sur sa langue, les têtes baissées des fidèles en prière, les phrases moralisatrices qu’on distillait dans les esprits comme une poudre bienfaisante ; on écoutait cet homme qui, parce qu’il arborait une toque et se tenait à l’autel, avait toute autorité sur les gens de la ville ; on pleurait un crucifié et on priait son père, identité abstraite qui jugeait les hommes sur terre. Le concept était grotesque. L’absurdité de ces parades la faisait gronder en silence.

 

Page 102 : Entre l’asile et la prison, on mettait à la Salpêtrière ce que Paris ne savait pas gérer : les malades et les femmes.

 

Page 102 : Libres ou enfermées, en fin de compte, les femmes n’étaient en sécurité nulle part. Depuis toujours, elles étaient les premières concernées par des décisions qu’on prenait sans leur accord.

 

Page 112 : Tant qu’les hommes auront une queue, tout l’mal sur cette terre continuera d’exister.

 

Page 167 : Des années à la Salpêtrière lui avaient fait comprendre que les rumeurs faisaient plus de ravages que les faits, qu’une aliénée même guérie demeurait une aliénée aux yeux des autres, et qu’aucune vérité ne pouvait réhabiliter un nom qu’un mensonge avait souillé.

 

 

 

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Mon avis : Cinq petits indiens – Michelle Good

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Isabelle Maillet

 

Éditions du Seuil – Voix Autochtones

 

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Résumé :

Canada, fin des années 1960. Des milliers de jeunes autochtones, libérés des pensionnats, essaient de survivre dans le quartier d'East Vancouver, entre prostitution, drogue et petits boulots.
Il y a Maisie, qui semble si forte ; la discrète Lucy, épanouie dans la maternité ; Clara, la rebelle, engagée dans l'American Indian Movement ; Kenny, qui ne sait plus comment s'arrêter de fuir, et, enfin, Howie, condamné pour avoir rossé son ancien tortionnaire.
D'une plume saisissante, Michelle Good raconte les destins entremêlés de ces survivants. Un roman choral bouleversant.


 

 

Mon avis :
Roman choral qui nous fait faire des sauts dans le temps en nous racontant l'histoire dramatique de cinq enfants amérindiens, parmi des milliers, qu'on enleva à leur famille pour les "désindianiser" dans des instituts religieux tenus par des sadiques pervers de la pire espèce.
Les Blancs voulaient tuer l'indien en eux, ils ont tué bien plus que ça… Ils leur ont mis la peur au ventre pour toujours et une colère inextinguible.

Kenny, Lucy, Maisie, Clara, Howie.
J'ai eu l'impression de lire ces vies comme en apnée, tant j'ai passé mon temps à avoir peur pour ces enfants, tant j'ai souffert de la terrible injustice qui leur a été faite. Enfermés, battus, humiliés, violés dès l'enfance, jetés dehors à 16 ans sans que rien ne les ait préparés à la vie à l'extérieur. Tout en ayant vécus à peu près les mêmes sévices, ils auront des vies différentes les uns des autres, avec leurs séquelles propres et leurs capacités à les surmonter ou pas.
J'ai tremblé pour eux devenus adultes, à me demander s'ils allaient parvenir à terrasser leurs démons et accepter la vie.
Mais pourquoi ceux à qui on a fait énormément de mal persistent-ils à s'en faire eux-mêmes ? Pourquoi deviennent-ils leur pire ennemi ?

Il y a cependant une infinie beauté au milieu de toute cette crasse. de la sororité, de la fraternité, de l'amour, un attachement indestructible à leurs origines, et surtout un lien indéfectible entre ceux qui sont passés par là, entre les mains sales des institutions religieuses. Ils sont une famille à tout jamais, pour le meilleur et pour le pire

Ce roman poignant m'a rappelé Jeu blanc de 
Richard Wagamese amérindien lui aussi, qui traite de ce qu'on a fait subir aux enfants des premières nations au Canada.
C'est une page d'histoire du peuple indien d'Amérique du nord qui nous est racontée là, qui parle du mal qu'on leur a fait, de leurs croyances qui les englobent dans un grand tout, qui les enracine dans cette terre qu'on leur a volée.
C'est un livre qui se dévore, entre colère, révolte et espoir, comme un cri qui nous dit "regardez ce qu'on nous a fait !" Et qui nous montre que beaucoup sont toujours debout. Sous cette magnifique couverture se trouve le récit de l'enfer vécu par des enfants mais aussi parfois de la résilience. Énormément d'émotions dans cette lecture, et un énorme coup de cœur !

 

Citations :

Page 77 : Un peu avant l’arrivée de Lucy, j’avais rencontré au Balmoral une fille qui venait de mon village. Après le traditionnel échange pour savoir qui étaient nos oncles et tantes respectifs, elle m’avait dit qu’elle était désolée pour ma mère. Je n’étais pas au courant, mais elle n’avait pas eu besoin d’ajouter quoi que ce soit. Javais rêvé si souvent au pensionnat de ce jour où je rentrerais auprès d’elle… Où je pourrais cuisiner avec elle, dormir en sécurité dans ma chambre, jouer librement et sans crainte sur la plage… J’aspirais désespérément à grimper de nouveau sur cette chaise devant la cuisinière, à remuer le contenu d’une casserole sous son regard attentif, comme quand j’étais petite. Mais hélas, redevenir un enfant, vivre à nouveau dans l’insouciance, sans peur, sans coups – personne n’a droit à une telle chance. Ne subsiste qu’un vide béant, un manque que rien ne peut combler.

 

Page 97 : Je voyais les pochetrons et les tapineuses déambuler sur la place, dans l’attente d’un verre ou d’un client. Et aussi les gens normaux qui, à peine sortis du bureau, marchaient à vive allure sans un regard pour les êtres brises qui s’étaient approprié cet endroit, les annihilant de leur indifférence. Je fumai encore, jetant à leurs pieds les mégots encore embrasés pour attirer leur attention.

 

Page 150 : - Est-ce qu’on a déjà eu droit au bonheur dans cette vie ? Demanda Lucy dans un souffle.

 

Page 165 : « Pour qui se prennent-ils, tous ces Blancs ? Notre peuple a sauvé leur misérable peau quand ils ont débarqué, morts de faim et de froid. Et comment nous ont-ils remerciés ? En répandant la haine et le meurtre. Ils n’étaient pas si nombreux, mais tout a changé. Nous ne sommes pas si nombreux, mais nous aussi nous changerons tout, et je suis prête à sacrifier ma vie pour reprendre ce qui nous appartient. »

 

Page 174 : Pensez au tambour, au cœur qui bat, aux chants, et à la façon dont tous ces sons merveilleux résonnent en un écho porté par le vent venu de nos ancêtres, qui soufflera aussi sur la vie des enfants de nos enfants.

 

Page 324 : - Si tu y réfléchis, avait-il poursuivi, toute notre enfance a été marquée par le malheur, la destruction et la mort. Combien y en a-t-il aujourd’hui qui n’arrivent pas à supporter leurs propres souvenirs ? Ils ont besoin que la vérité soit dite.

 

 

 

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Mon avis : Wilderness – Lance Weller

Publié le par Fanfan Do

Traduit par François Happe

 

Éditions Gallmeister

 

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Quatrième de couverture :

Sur la côte du Pacifique Nord-Ouest, Abel Truman vit avec son chien pour unique compagnon. Hanté par la Guerre civile américaine, il décide de partir pour un ultime voyage vers l'est, guidé par ses souvenirs. Mais un homme au visage déchiré et un Indien aux yeux sans éclat l'attaquent et lui dérobent son chien. Laissé pour mort par ses assaillants, Abel part sur leurs traces à travers les Olympics Mountains menacées par la neige. Sa quête l'entraînera sur la route de son passé et vers une rédemption qu'il n'espérait plus. Wilderness est une fresque ambitieuse qui décrit la course contre la mort d'un homme à travers l'histoire et le continent américain.

 


 

Mon avis :
L'histoire débute en 1965 avec Jane Dao-ming Poole, seule dans sa chambre d'une maison de retraite. On entrevoit ses souffrances passées…
Elle remonte dans ses souvenirs et, en 1899, dans la vie d'Abel Truman, son deuxième père.
On plonge là dans des abîmes de noirceur où il n'est question que de souvenirs de guerre, de peur, de mort, de souffrance, de douleurs, de chagrins, de blessures mal guéries et de solitude.

On fait des allers-retours entre 1899, quand Abel est vieux, malade et seul avec son chien, et 1864, sur les champs de bataille de la guerre de sécession avec ses compagnons d'arme, face à l'ennemi.
On s'attache à eux, David, Ned, dont on sait qu'ils vont mourir alors qu'ils sont si jeunes. L'absurdité est omniprésente, tant d'entre eux sont morts dans une folie sans nom durant cette guerre et ici plus précisément pendant la bataille de la 
Wilderness. On ressent la terrible atmosphère de violence et de terreur sur tous ces champs de batailles qui se sont gorgés du sang de ces soldats, de leurs chairs déchiquetées, de leurs rêves anéantis avec eux. C'est d'une tristesse sans nom. Tous ces massacres sont une abomination.
Les descriptions de certaines atrocités m'ont fait dresser les cheveux sur la tête.

Un jour, des hommes laissent Abel pour mort sur le rivage, et lui volent son vieux chien. Sauvé et remis sur pied par des indiens, au bout d'une vie de tant de drames, il part en quête de son ami, son compagnon, son chien, pour le sauver d'un destin funeste.

Ces pages d'histoire de l'Amérique m'ont terriblement donné le sentiment que pour beaucoup, la vie n'est qu'une vallée de larmes, car l'homme est d'une cruauté sans limites.

J'ai été totalement bouleversée par ce roman plein de bruit et de fureur qui nous relate, entre autre, la boucherie qu'a été la guerre de sécession et je me suis demandé pourquoi certaines personnes doivent ainsi souffrir du début à la fin de leur existence. 
Lance Weller nous immerge totalement dans cette histoire dont le réalisme est parfois glaçant. Il parvient à mettre de la poésie dans ses descriptions de moments pourtant tragiques et macabres, comme dans un ralenti où on s'attend à être touché par la grâce alors qu'on est en pleine tragédie. Rien n'est manichéen ici. Beaucoup de noirceur, contrebalancée par un peu de lumière et de chaleur. J'ai trouvé cette histoire d'une beauté déchirante.

 

Citations :

Page 10 : Elle est âgée désormais, elle est devenue grise et fragile au-delà de toutes les représentations qu’elle avait pu se faire de la vieillesse lorsqu’elle était enfant.

 

Page 27 : Le chien savait aussi qu’ils ne reviendraient pas. Il savait ces choses de la même façon qu’un chien connaît bien le cœur de l’homme qu’il aime et comprend ce cœur au-delà de ce que l’homme pourrait jamais espérer.

 

Page 32 : Devenu un vieil homme désormais, Abel se dit qu’avec une bonne concentration il était capable de faire revenir ces hommes dans ses souvenirs. Chacun de ces hommes qui étaient morts sous ses yeux et dont il connaissait le visage. Se les rappeler et les faire revivre, ne serait-ce qu’un instant, ne serait-ce que dans son esprit seulement. Abel prit une profonde inspiration, sentant l’effet progressif de l’air frais en lui. Il se disait que s’il pouvait faire revenir ces hommes, il aurait bien des choses à leur demander.

 

Page 44 : Il se retrouva entièrement dans l’eau. Ses pieds ne touchaient plus les cailloux et le sable, sa tête n’était plus exposée à la lune et à la nuit. Le vieux soldat ferma les paupières et se mit à flotter entre la terre et l’air, chaque endroit de son corps étant en contact avec l’eau froide. Fermant les yeux, il goûta la saveur âcre du sel de l’océan et l’imagina en train de se répandre en lui, de reprendre possession de lui – de sa pauvre chair loqueteuse – pour ne laisser de lui que des os blanchis et articulés et des morceaux de métal rouillés raclant le fond de la mer pour l’éternité.

 

Page 66 : Il n’avait pas parlé, il n’avait pas tremblé, car il s’était rapidement rendu compte que cette chose, cette scène, n’était qu’un maillon d’une longue et terrible chaîne d’évènements qu’il sentait – plus qu’il ne la voyait – s’étirer si loin sur la courbe de sa vie qu’il s’imaginait qu’une extrémité devait rejoindre l’autre quelque part pour former un cercle parfait du malheur. Un seul moment, celui-là.

 

Page 153 : Oyster Tom resta assis un certain temps, les yeux rivés sur le vieil homme meurtri étendu devant lui. Les anciennes blessures et les nouvelles. Il resta là comme s’il essayait de découvrir des motifs dans les spirales, le câblage et le gribouillage des cicatrices qui balafraient ce corps, chacune d’entre elles racontant l’histoire d’une blessure, chacune d’entre elles marquant la fin de la trajectoire d’une balle, d’un éclat d’obus, ou d’une lame, ou de l’instrument souillé d’un chirurgien, et chacune reliée à la suivante par un morceau de chair pâle et lisse dont l’unique fonction semblait être de rattacher une cicatrice à une autre.

 

Page 163 : Comment les choses s’étaient passées, cet après-midi là, à Gettysburg, quand le monde avait basculé et qu’ils avaient ressenti ce basculement, comme si la Terre elle-même avait été secouée jusqu’en son centre, et peut-être bien qu’elle l’avait été. Ce jour-là.

 

Page 193 : Les corps explosent, leur sang gicle et retombe sur les vivants et les morts comme une douce pluie de printemps…

 

Page 200 : Regardez, vous ne pouvez pas vous en empêcher. Regardez, et vous verrez des hommes morts ou blessés, des hommes fracassés ou brûlés. Des hommes debout qui se battent, une sinistre détermination se lisant sur leur visage figé comme s’ils avaient découvert en eux des choses avec lesquelles il sera difficile de vivre, plus tard, et des hommes effrayés à en perdre la raison, étendus face contre terre, pleurant dans l’herbe. Des soldats de l’Union qui battent en retraite dans le champs des hurlements, et des masses de soldats des deux camps, étendus, serrés les uns contre les autres dans le fossé humide, entre les lignes, se passant et se repassant des bouteilles. Des fanions, des étendards et des drapeaux déchirés par les balles faisant tous flotter fièrement leurs couleurs vives au milieu de la fumée et des flammes. Dans les bois, de part et d’autre du champs, les drapeaux vert et jaune des hôpitaux de campagne que le vent fait onduler surgissent çà et là, attirant les blessés vers eux comme d’horribles fleurs héliotropes. Les chirurgiens sont au travail, les bras nus, leurs poings blancs serrant fort les poignées de leurs scies.

 

 

 

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Mon avis : De mères en filles – Maria José Silveira

Publié le par Fanfan Do

Traduit du portugais (Brésil) par Diniz Galhos

 

Éditions Denoël

 

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Quatrième de couverture :

De mères en filles est une plongée dans l’histoire du Brésil à travers une lignée de femmes allant d’Inaia, fille d’un guerrier indien née en 1500, jusqu’à Amanda, jeune Carioca des années 2000.
Indigènes, Africaines, Portugaises, Espagnoles, Françaises et un métissage de tout cela, esclaves, libres, sorcières, guérisseuses, amoureuses, meurtrières ou artistes, toutes sont des femmes aux personnalités colorées, complexes et inoubliables. Il y a Guilhermina, chasseuse de fauves, Ana de Pádua, propriétaire d’esclaves et de bétail, Diva Felícia, photographe et voyageuse, ou encore Lígia, activiste politique sous la dictature.
À travers cet enchevêtrement de récits et de destins au féminin, Maria José Silveira fait revivre l’histoire de ce colosse aux pieds d’argile qu’est le Brésil.

 

 

Mon avis :
Maria José Silveira nous raconte le Brésil à travers des femmes, en partant de l'année 1500 jusqu'à nos jours. On commence avec Inaiá, indienne née en 1500, puis toute sa descendance au féminin pour nous raconter l'histoire de ce pays. Une femme par chapitre, parfois deux. Chacune a un destin particulier, qui nous fait découvrir l'histoire du pays, l'arrivée des hommes blancs, l'esclavage, le métissage, l'évangélisation. C'est quelquefois teinté d'humour, comme par exemple avec le cannibalisme. Pourtant, quel sujet épouvantable !

J'ai énormément aimé la façon dont l'histoire est traitée. le destin du Brésil raconté à travers la vie de vingt-deux femmes. L'autrice va à l'essentiel, toujours, sans se perdre dans des détails, d'Inaiá qui n'avait jamais vu d'homme blanc, ni de noir d'ailleurs, jusqu'à Amanda, multi-métissée.
On comprend l'incroyable métissage de ce pays, notamment à travers les moeurs des autochtones, totalement désinhibés, l'esclavage des indiens et des africains, les colons européens, tout ce monde qui se mélange allègrement et je dirais que ça c'est le bon côté des choses : des êtres humains s'accouplant avec d'autres êtres humains.

J'ai été effarée, à travers cette traversée des siècles, par la barbarie dont l'humanité est capable. C'est pas que je l'ignorais mais là, on assiste en accéléré à la construction d'un pays et à toute la souffrance qu'elle a engendré et ça se révèle d'une cruauté sans limite. Des descendants d'esclaves propriétaires d'esclaves, des brésiliens, donc avec du sang indien dans les veines qui pourtant méprisent les indiens avec qui ils pensent n'avoir aucun lien, une humanité aberrante…
Et que dire du mariage dans ces régions sauvages, où il n'était pas question d'amour mais d'un acte réfléchi par lequel il fallait passer pour avoir un projet de vie et une descendance ?!
Et des femmes, fortes, combatives, coriaces, libres, indépendantes souvent, mais aussi parfois futiles et stupides.
À travers cet éventail de vies de femmes, toutes descendantes d'Inaiá, et les pères de leurs enfants, on a un large panel de représentants de l'humanité, avec ce qu'elle comporte de beau ou de laid.

J'ai adoré ce roman qui m'a fait arpenter les siècles et l'histoire du Brésil, et m'a permis de comprendre cette page d'histoire dont j'ignorais tout.

Dès le départ ce livre avait tout pour me plaire ! de la couverture que je trouve superbe, au titre qui me laissait espérer quelque chose de très fort, jusqu'au résumé, moi qui adore l'histoire. Sans books_food_swing et son book trip brésilien sur Instagram, je n'aurais jamais eu la chance de découvrir ce roman qui m'a transportée !

 

Citations :

Page 17 : Le lendemain matin, la tribu était réunie presque au grand complet sur la grève pour voir les Caraibas, les prophètes venus de l’est, du côté du soleil.

 

Page 17 : Prémices d’un destin fatidique, ces hommes étranges armés de fer et de feu furent acceptés comme des amis et des frères.

On peut donc dire qu’Inaia avait bien assisté, sans pour autant rien en voir, à l’évènement qui devait changer pour toujours son existence et celle de son peuple.

 

Page 91 : Jeune fille soumise d’excellente constitution, la mère de Bento Diego dévoua sa vie à sa seule et unique mission, celle-là même que lui avait donnée la reine : procréer. Bento Diego fut le douzième de ses quatorze enfants.

 

Page 126 : De fait, on peut comprendre que beaucoup de personnes aient jugé inquiétantes ces trois femmes qui grimpaient et descendaient les sentes de la ville – Maria dans la plénitude de la quarantaine, Belmira dans la beauté éthérée de sa folie et Guilhermina dans l’impétuosité ardente de son enfance – en laissant derrière elle une traînée d’interrogations et de fascination.

 

Page 130 : La blancheur de la main de la jeune fille posée sur le bras noir et musclé du jeune homme semblait menacer la ville tout entière.

 

Page 216 : Du point de vue de Jacira, il était tout aussi évident que les indiens étaient plus proches de l’animal que d’eux. Deux siècles ne s’étaient pas encore écoulés, et cette génération de Brésiliens avait déjà complètement oublié de qui ils étaient les descendants.

 

Page 227 : Vous vous étonnez qu’une femme assume un tel pouvoir à cette époque ? Eh bien vous ne devriez pas. À toutes les époques, partout dans le monde, il y a toujours eu des femmes aussi puissantes que les hommes. Ces femmes ont toujours existé, et il faudrait beaucoup plus que les doigts des deux mains pour les compter. Et à ce moment du récit, tout le monde aura déjà compris que les femmes qui ont conquis ces terres durant les deux ou trois siècles ayant suivi leur découverte par les Européens, qui se sont enfoncées dans le Sertao, qui ont vécu dans la foret primaire de ce pays tout jeune, ne pouvaient se permettre le luxe d’être fragiles et soumises, ainsi que beaucoup aimeraient les dépeindre.

 

Page 255 : C’était dans sa nature, elle avait cette capacité à accepter tout ce que la vie lui réservait, le bien comme le mal. Ce don qui lui permettait de ne pas appréhender le passé comme un fardeau, mais comme un coffre où elle gardait sous clé son trésor, cette flamme qui jamais ne s’éteindrait.

 

Page 303 : Rio de Janeiro était alors le terminus négrier des Amériques, avec la plus forte concentration d’esclaves au monde depuis l’Empire romain. C’était une ville à moitié africaine, presque totalement noire.

 

Page 399 : Il a tout lu, il savait tout, et à quoi ça lui a servi ? Il est mort.

 

Page 464 : - Papa est resté silencieux un moment, et puis il a juste dit qu’il commençait à comprendre pourquoi nous autres millenials on ne sait que répondre des « j’en sais rien », des « peut-être bien ». Vu toutes les conneries qu’on fait, c’est normal qu’on sache jamais rien. Mais pour le coup, c’était lui qui avait l’air paumé.

 

 

 

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Mon avis : L’aube d’un autre monde – Lionel Emery

Publié le par Fanfan Do

Éditions Souffles Littéraires

 

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Quatrième de couverture :

Arizona, 1914.
Ce jour de baptême devait être celui d’une grande fête, il s’achèvera par un massacre ne laissant en vie qu’une mère, Lydia, et son enfant.
C’est un jeune prêtre au passé sombre puis un vétéran des guerres indiennes qui vont l’aider à le retrouver.
Les pistes que cette quête leur fera prendre révéleront les secrets de plus en plus terribles de ceux dont le but est de déstabiliser le monde afin de le diriger.
Quels liens peuvent exister entre les massacres de simples fermiers, l’enlèvement d’enfants et le déclenchement de la Première Guerre Mondiale ?
À vous de le découvrir…


 

 

Mon avis :
Arizona printemps 1914. Un baptême a lieu lorsqu'une bande de mexicains accompagnés d'adolescents soldats armés jusqu'aux dents arrive et fait un carnage. Mais pourquoi ? Et pourquoi tant de cruauté ? Ils n'épargnent que lydia et son bébé dont c'était le baptême. Mais avant de partir ils lui font quelque chose d'abominable.
J'ai tout de suite été happée dans le roman parce que bien évidemment ce déchaînement du début a une raison d'être pour la suite de l'histoire… cette violence extrême et gratuite allait engendrer une réaction terrible, un désir de vengeance ou à minima un besoin de réponses pour pouvoir continuer à vivre.

Lydia part, accompagnée de Paul Deville, un prêtre extrêmement bienveillant qui n'a pas l'air de porter en grande estime les hautes instances de l'Église, celles qui prêchent l'austérité pour leurs ouailles mais surtout pas pour elles-mêmes. Ce prêtre est un étrange personnage, hors norme. Il embarque dans la quête de Lydia qu'il a fait sienne son vieil ami Garonn. Et ce que Garonn dit à Lydia sur le monde fait froid dans le dos. Parce qu'il raconte les puissants et leur cynisme qui servent toujours leurs intérêts sur le dos du peuple et trop souvent dans le sang, sur lequel s'est construite l'Amérique. Il raconte la cruauté, la cupidité et la perfidie humaine et comment Paul un jour a rencontré Dieu dans un besoin de rédemption pour ne pas mourir. Et on comprend toute la logique qui le pousse à retrouver la bande qui a perpétré le massacre.

C'est une histoire très dure, sans concessions et très réaliste qui met en exergue le sadisme dont certains humains, trop nombreux, sont capables. Peu à peu on va découvrir une "utopie" malsaine et furieuse accompagnée d'un totalitarisme absolu, imaginés par le cerveau malade d'un illuminé à l'ego hypertrophié.

J'ai été captivée par l'hypothèse élaborée dans ces pages, étayée par la noirceur de l'âme humaine parfois, qui, bien qu'elle semble complètement mégalomane amène une grosse tension et un suspense haletant.

Alors le bémol, mais ça c'est personnel, il y a un combat de coqs et je m'en serais bien passée avec tous ces détails, sans parler du rat. Je déteste ce que les humains font subir aux animaux, c'est tellement ignoble. En même temps ça met l'accent sur la cruauté des Hommes qui détruisent TOUT, leurs semblables, les animaux, la nature, leur possibilité de pouvoir continuer à vivre sur cette planète en fait.

Assez rapidement je me suis demandé si on allait vers une uchronie… Mais chut ! Je suis une tombe, même sous la torture je ne dirai rien !
Ce fut une lecture passionnante, par contre âmes sensibles s'abstenir. Ça défouraille à tour de bras, ça surine copieusement, le sang coule abondamment. Ce n'est jamais gratuit. C'est juste le reflet de ce qui se passe partout dans le monde avec la sauvagerie dont nous sommes capables.

Merci beaucoup Babelio_ Masse Critique et les Éditions Souffles Littéraires pour cette découverte.

 

Citations :

Page 26 : Le soir venu, une pluie torrentielle martèle la toiture et les vitres de la cuisine éclairée par le feu de cheminée. Paul regarde les coulées de boue emporter les dernières traces du baptême. Rubans, dentelles, dragées et fleurs se mêlent aux cendres, aux douilles et au sang charriés par l’eau. Il se dit que ces rigoles sont à l’image de l’humanité dans ce qu’elle peut avoir de beau et de tellement laid à la fois, un peu de fête pour beaucoup de tragédie, l’humanité et son irrémédiable façon de s’autodétruire, l’humanité et sa manie de ne pas l’être vraiment, humaine…

 

Page 54 : Regardez c’qu’on fait à la nature avec nos villes, nos chemins d’fer, nos usines et tout le reste. Regardez ! Du pillage forcené ! D’la destruction ! Vraiment, je pense que le monde méritait mieux ! Mieux que l’homme, en tout cas que tous ceux-là, y a pas de doute… Des ordures pour qui la guerre n’a qu’un seul but : le profit, perpétuel et sans aucune limite ! Des hommes dénués d’âme qui envoient des types comme nous se battre à leur place en nous persuadant que c’est pour de belles et grandes causes… Les actes héroïques issus d’ordres aux fondements ignobles, honteux ! Du sacrifice en masse pour des raisons cachées, très bien cachées, parce que terriblement viles, si sales !

 

Page 56 : Imaginez Lydia, imaginez que c’pays immense , entouré de mers et d’océans, était entièrement peuplé d’Indiens d’toutes sortes, pas loin de cent millions ! Il n’en reste pas même cent mille. L’humanité n’avait jamais connu un massacre pareil, un crime plus exactement… Tout ça a pris moins d’deux cents ans… alors qu’ils étaient là depuis des milliers d’années !

 

Page 110 : Sur un soupir aussi pesant que sa déception du monde, Garonn reprend son chemin en se disant que si les humains sont capables d’être aussi cruels dès l’enfance, alors pourquoi s’étonner de ce qui arrive et arrivera dans le monde ?

 

 

 

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Mon avis : La passe-miroir Livre 1 – Les fiancés de l’hiver – Christelle Dabos

Publié le par Fanfan Do

Éditions Gallimard Jeunesse

 

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Quatrième de couverture :

Sous son écharpe élimée et ses lunettes de myope, Ophélie cache des dons singuliers : elle peut lire le passé des objets et traverser les miroirs.
Elle vit paisiblement sur l'arche d'Anima quand on la fiance à Thorn, du puissant clan des Dragons.
La jeune fille doit quitter sa famille et le suivre à la Citacielle, capitale flottante du Pôle.
À quelle fin a-t-elle été choisie ?
Pourquoi doit-elle dissimuler sa véritable identité ?
Sans le savoir, Ophélie devient le jouet d'un complot mortel.

 

Une héroïne inoubliable, un univers riche et foisonnant, une intrigue implacable. Découvrez le premier livre d’une grande saga fantastique et le talent d’un nouvel auteur à l’imaginaire saisissant.

 

Lauréat du Concours du premier roman

organisé par Gallimard Jeunesse, RTL, et Télérama.

Grand prix de l’imaginaire 2016

 


 

Mon avis :
Comme promis à ma fille qui y tenait énormément, j'attaque 2023 avec La passe-miroir. Et c'est Gallimard jeunesse ! Ce qui veut dire que, soit je suis complètement immature, soit j'ai gardé ma capacité de rêver et je n'ai pas tué l'enfant qui sommeille en moi. Je vais opter pour la deuxième solution !

Dès le début il est question de mariage arrangé, d'une impossibilité de dire non pour Ophélie qui doit se résigner à épouser Thorn, un homme dont elle ne sait rien. le moins qu'on puisse dire c'est que dès le premier regard, l'aversion est réciproque. Aucun des deux ne souhaite ce mariage, mais le choix ne leur appartient pas.

Ce roman est un univers de magie où, en touchant les objets Ophélie peut connaître l'histoire des propriétaires successifs, où les choses ont une vie propre et ça m'a beaucoup plu. Elle sait aussi traverser les miroirs. Ça m'a un peu évoqué Harry Potter mâtiné du Merlin l'enchanteur de Disney. Eh oui, mon âme d'enfant s'est réveillée à cette lecture. Mais La passe-miroir n'est pas une copie des deux que je viens de citer. C'est juste quelques petites choses comme ça en rapport avec mes propres références, la magie tout simplement telle l'écharpe d'Ophélie qui a sa vie propre…

Les descriptions des différentes arches, les pays, m'ont plongée dans ces mondes tant c'est visuel et immersif, ainsi que les personnages tous étonnants, parfois exubérants. Ça fourmille d'idées, d'imagination, de féerie mais aussi de suspense car le monde dans lequel Ophélie doit aller vivre avec son mari est le Pôle, glacial, extrêmement dangereux, plein de faux-semblants, de perfidie, aux antipodes du sien à tous points de vue, auxquels elle va devoir se frotter et se faire malmener. Cette société est beaucoup trop compliquée pour elle, vanités, ambitions, manipulations, complots, hypocrisies, jalousies, tout n'est que danger pour Ophélie.

En fait, je ne veux pas rentrer dans les détails de l'histoire de peur de spoiler… Il faut lire cette saga si on n'a pas tué l'enfant tapi en nous, car il n'y a pas d'âge pour se laisser aller à rêver d'un univers magique, et celui-ci est tout simplement foisonnant !
J'y ai toutefois trouvé un côté patriarcal désuet un peu pesant, mais peut-être n'est-ce qu'une impression intentionnelle de la part de l'autrice et possiblement Ophélie réussira-t-elle à s'en affranchir. Je l'espère !!!

Et, bien évidemment, SUS AU TOME 2 !!!

 

Citations :

Page 61 : Clouée sur place, Ophélie était incapable de bouger. Il était là. L’homme qui était sur le point de déstructurer sa vie était là.

 

Page 161 : Sa mère avait une personnalité envahissante qui ne laissait de place à rien d’autre qu’elle-même ; elle parlait, elle exigeait, elle gesticulait, elle n’écoutait pas. Quant à son père, il n’était que l’écho faiblard de sa femme, toujours à l’approuver du bout des lèvres sans lever le nez de ses souliers.

 

Page 312 : Dans ce monde, les domestiques avaient bien peu de valeur. Ils n’appartenaient pas à la descendance de Farouk et venaient du peuple des sans-pouvoirs, ils devaient donc compenser avec leurs mains ce qu’ils ne pouvaient apporter avec leurs dons. Il y avait effectivement de quoi rester pensif. Un Mirage qui tricote des illusions vaut donc mieux que ceux qui nettoient son linge et préparent ses repas ?

 

 

 

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