Mon avis : Sur la piste des aigles – Adrien Sarrault
Éditions Daphnis et Chloé
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Quatrième de couverture :
Entrepreneur couronné de succès dans le domaine de l’intelligence artificielle, Édouard Neuville décide soudainement de vendre sa société pour se lancer en politique. Entouré de son précieux collaborateur Antoine Berlioz et de sa très belle épouse Valentine, assisté des meilleurs experts, son charisme, son érudition et son discours disruptif lui assureront rapidement notoriété et popularité dans un pays secoué par de multiples crises. Mais parviendra-t-il à pénétrer les cercles du pouvoir ? Sur fond de fresque sociale et politique, une fiction à suspense qui nous interpelle aussi sur les transformations de nos sociétés par l’intelligence artificielle et les nouvelles technologies associées.
Grand voyageur, cosmopolite, ingénieur en MBA, Adrien Sarrault observe ses congénères et le monde qui change. Après Un buisson d’amarante, un roman d’apprentissage incisif, drôle et profond dont l’action se déroule sur 4 continents, Sur la piste des aigles est son deuxième titre.
Mon avis :
Roman reçu dans le cadre de Masse Critique Privilégiée. Merci à Babelio
•Antoine Berlioz, jeune cadre, stressé par la pression au travail et sa relation tendue avec Victoire sa sublime maîtresse.
•Édouard Neuville, son patron, stressé par la pression au travail, marié à une sublime créature.
•Jacques Sanchez, Investment Banker, perpétuellement angoissé par la peur de tomber dans la misère. Car c'est un transfuge de classe, tout comme Antoine d'ailleurs.
•Valentine Neuville, épouse d'Édouard, femme idéale, parfaite, de bonne famille et belle réussite dans les études mais ancienne complexée.
Voilà pour les quatre personnages du début que j'ai tout de suite trouvés, hélas, très "cliché". Je me suis demandé si on allait avoir droit tout le long à des stéréotypes, voire des poncifs. Pourtant il est vrai que souvent les hommes très riches ont des femmes très belles.
Beaucoup trop d'anglicismes m'ont exaspérée, ça n'arrête pas, même si je me doute que dans le monde des affaires ça doit être ainsi. Seulement voilà, ça m'a vraiment fait penser au sketch des Inconnus quand ils se moquent outrageusement de ces snobinards de publicitaires.
Néanmoins, quelque chose donne envie de poursuivre. le cynisme de certains ? La découverte du chômage par d'autres ? Les différentes classes sociales et le choc des cultures ? L'abjection de certaines méthodes et mentalités ? L'envie de savoir jusqu'où ça peut aller ? Sûrement tout ça… Mais aussi la condescendance de ceux qu'on appelle les élites (je déteste ce mot qui nous ramène au rang de peu de chose, nous, le peuple) et dont on se rend compte que quasiment rien ne les arrête. Ces manipulateurs qui ont du pouvoir, que ce soient les grands patrons ou les politiques
Peut-être tout simplement ai-je aimé la critique de notre société qui part à vau-l'eau sans que ça n'inquiète réellement nos dirigeants, perchés qu'ils sont sur leur Olympe, à se regarder le nombril.
Et donc ce roman parle des affaires, de magouilles financières, de réorientation professionnelle, d'intrigues politiques, d'intelligence artificielle, de hackers éthiques, de requins de la finance, de femmes fatales, de cocufiages, de scrupules mais pas trop car, ce que femme veut… on connaît la chanson, et les scrupules sont vite étouffés par la concupiscence. Et d'un autre côté il y a des consommateurs de femmes, à la chaîne…
L'auteur étrille clairement le pouvoir en place et les puissants en général, et bordel, que c'est bon !!! Et il nous donne une lueur d'espoir et d'idéalisme via les "hacktivistes".
L'écriture est belle et nombreuses sont les références philosophiques, politiques, historiques et littéraires. Mais alors, ce qui m'a vraiment dérangée, car ça revient plusieurs fois au début, c'est "en vélo", "en trottinette". "En" veut dire dans, donc en voiture, en bus, en train, mais à vélo, à trottinette, à moto, tout comme à cheval, où là, la faute n'est jamais faite. Et je trouve que dans les livres, il ne devrait pas y avoir de fautes.
Cependant, tout le côté politico-financier décrit ici ainsi que les magouilles informatiques et politiques, les manipulations qui visent à faire tomber des gens, j'ai trouvé tout ça passionnant. Trop d'argent nuit sûrement à la santé mentale, et le pouvoir corrompt, j'en suis sûre. À croire que dans les milieux qui brassent des sommes énormes, il y a des Judas partout en embuscade, prêts à vous poignarder pour prendre votre place. Et moi qui n'entends rien à tout ça, j'ai appris plein de choses qui m'ont confortée dans mon idée que l'humanité est souvent retorse, cupide et mégalomane. Heureusement, il y a des rêveurs.
Et alors qu'au départ j'y croyais moyennement, contre toute attente j'ai dévoré cette lecture. Et je me suis instruite ! Par exemple concernant le pari de Pascal, dont j'ignorais la théorie… à laquelle je n’adhérerai pas car mon âme est perdue XD.
Citations :
Page 58 : Le déjeuner avait été organisé dans la salle à manger que Neuville avait aménagé au siège de la société. C’était là que se tenaient tous ces déjeuners d’affaires quand il était à Paris. Il détestait aller au restaurant. Surtout les restaurants gastronomiques, où il se retrouvait toujours bloqué pendant des heures devant des défilés d’amuse-gueules, d’entrées, de plats, d’entremets, de viandes, de fromages, de desserts et de mignardises auxquels il ne goûtait guère. Dans sa « lunch room », le menu était toujours le même : salade, sushis et fruits frais. Et ni champagne ni Margaux, et encore moins de Petrus. On n’y buvait que de l’eau. Les convives qui n’appréciaient pas ce régime n’étaient pas obligés d’accepter ni de revenir.
Page 83 : J’étais alors chez Steve Jobs, je suis maintenant chez Paul Emploi. Sic transit gloria mundi, s’amusa-t-il à penser.
Page 93 : — Tu veux donc commencer une carrière de révolutionnaire ? Bonne chance ! Tu as du talent et de l’argent. Mais te rends-tu compte de l’énormité de ce que tu me dis ? Notre démocratie est fondée sur des institutions qui sont quand-même bien installées, et qui sont acceptées par tous, et aussi par un contre-pouvoir médiatique, qui est certes critique mais qui est connivent. Et tu retrouves cette situation dans tous les pays importants de la planète. Et tout cela est renforcé par une multitude de traités entre États.
Page 127 : À contrario, intéressons-nous au fonctionnement de la démocratie représentative, avec ses 577 députés, ses 348 sénateurs, ses 4058 conseillers généraux, ses 79 élus au Parlement européen, les 233 membres du Conseil économique et social dont on ne sait pas toujours d’où ils viennent. Et je ne cite pas le reste, la liste serait trop longue. Dès le début du courant des Lumières, courant intellectuel fondateur et dominant dans la pensée politique française depuis le XVIIe siècle, on a su que ces solutions de démocratie ont pour principal défaut de ne pas répondre à l’idéal démocratique pur. Avec elles, Nous sommes vraiment très loin du contrat social de Jean-Jacques Rousseau.
Page 158 : La désinformation est une pratique aussi ancienne que l’humanité, mais avec l’IA on disposera d’une arme redoutable pour détruire la réputation d’une personne.
Page 173 : La prison ! Le gnouf ! Le trou ! Le ballon ! Les geôles de la République… Tout cela pouvait faire penser à Alexandre Dumas et au Comte de Monte-Cristo. Mais hélas, il n’y avait rien de romantique dans ce qu’il risquait de lui arriver. Pour lui, il n’y aurait pas d’abbé Faria, pas de trésor caché dans une île à aller récupérer, pas de vengeance à aller orchestrer dans les salons du Second Empire. En prison, en France, au XXIe siècle, il n’allait croiser que des chefs de gangs, des voyous sans foi ni loi, des assassins, des drogués, des pervers et des psychopathes qui allaient lui faire souffrir mille maux, ou pire tenter de le transformer en vulgaire sodomite…