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Mon avis : Le chat qui rendait l’homme heureux – Umi Sakurai

Publié le par Fanfan Do

Éditions Soleil Manga

 

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Quatrième de couverture :

Fuyuki Kanda est seul et triste. Un jour, il décide d'entrer dans une animalerie où il remarque Fukumaru, un chat pas très beau, gros et plus très jeune. Ce dernier semble triste et désespéré car personne ne veut de lui. Pourtant, de manière inattendue, l'homme va l'adopter ! Ainsi commence l'histoire d'un quotidien plein de tendresse, entre un homme et un chat en mal d'amour.

 


Mon avis :
Un peu de légèreté dans ce monde de brutes…
Un chat, dans une vitrine. Il a bientôt un an et personne n'en veut. Et c'est triste car il manque d'amour et il a du chagrin. Il voudrait être adopté mais n'y croit plus. Puis un homme entre dans la boutique et c'est ce chat là qu'il veut. Il l'achète et l'emmène chez lui. Mais le chat a peur que les autres membres de la famille ne le veuillent pas.
C'est mignon, attendrissant, et drôle aussi. Totalement craquant en fait !

Ça nous raconte deux solitudes qui vont s'unir, car ils ont tant à donner l'un et l'autre. Ils vont apprendre à se connaître car l'homme ne connaît rien aux chats, et le chat ne connaît des hommes que ce qu'il en a vu depuis sa cage.

J'ai totalement craqué pour cette histoire d'amour entre un homme et son chat... entre un chat et son papa. C'est tellement bien vu tous les comportements rigolos des félins, les dessins sont magnifiques et font bien ressortir tout ce qui est adorable chez ces petits poilus. Alors pour ceux qui ne connaissent pas les chats, en gros, ce qui est adorable chez eux, c'est eux. Bon, et puis Fukumaru, le chat, est dodu, patapouf et patatesque et du coup il m'a énormément fait penser à mon chat adoré, mon petit Sushi.
Cette histoire m'a fait fondre, glousser bêtement... comme avec mes chats quand ils font les andouilles. En tout cas cette belle histoire d'amour entre un humain et un chat m'a beaucoup touchée.

Moi qui ne suis pas du tout habituée aux mangas, j'avoue avoir été désarçonnée par le sens de lecture, même les cases se lisent de droite à gauche. Mais on s'y fait très vite.

 

Citations :

Un nom est un cadeau important, tout de même. J’aimerais en choisir un qui te plaise. Autrefois, pour choisir le prénom des enfants… o, réfléchissait longuement elle et moi… et une fois à cours d’idées… on revenait toujours à notre premier choix.

 

 

 

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Mon avis : Méridien de sang – Cormac McCarthy

Publié le par Fanfan Do

Traduit par François Hirsch

 

Éditions de l’Olivier - Points

 

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Quatrième de couverture :

Dans les années 1850, un gamin de quatorze ans part au Texas rejoindre une bande de chasseurs payés pour exterminer les Indiens. Au milieu du désert, la loi n’existe plus. À ce jeu de massacre, seuls survivent ceux qui parviennent à éveiller la plus profonde et la plus intime sauvagerie Avec cet anti-western basé sur des faits réels, l’auteur nous livre l’un de ses plus grands romans: noir, lyrique et violent.

 


Mon avis :
1849. Ça commence fort, vraiment ! Sans préambule on arrive directement dans une violence dont on se doute qu'elle va aller crescendo. Ça doit être la méthode McCarthy, pas de quartier, noir c'est noir. On est prévenu. C'est sale et ça pue la crasse, la vieille sueur et l'haleine fétide. Et c'est absolument captivant dès la première page.

Le gamin, quatorze ans, a fuit son père alcoolique et brutal et se retrouve par hasard avec Glanton et sa bande de mercenaires très violents, exterminateurs d'indiens mais aussi de mexicains, hommes, femmes, enfants. Cette troupe hétéroclite sans foi ni loi va sillonner le pays, laissant derrière elle nombre de cadavres, humains comme animaux.

J'ai rapidement été saisie par un terrible sentiment de solitude pour le gamin, face à la sauvagerie mais aussi face aux éléments, sur cette terre qui, d'ici, semble avoir été presque encore vierge dans les années 1850. Les grands espaces, les déserts, la dureté du climat et de la vie, tout dans ces descriptions nous amène bien loin du rêve américain. Terre de pionniers dont beaucoup ont perdu la vie dans un faible espoir d'un avenir meilleur, ou moins mauvais. Les animaux ont eu la malchance d'être utiles aux humains. de la souffrance, encore et encore. Pour les hommes et les bêtes. Massacres des indiens et des mexicains, qui massacrent à leur tour. Ce récit déborde de violence, de sang et de putréfaction. La vie semble ici tellement dérisoire.

Ces hommes qui torturent, assassinent, scalpent et bafouent la vie de toutes les manières possibles, parlent de Dieu et de la sagesse divine comme de quelque chose de sacré. Il y a même parmi cette bande de mercenaires un ancien prêtre et un juge "à l'âme noire comme la suie." Une vraie bande de psychopathes sans états d'âme, qui tuent comme ils respirent, pour le plaisir de tuer.

C'est un bout de l'histoire de la conquête des États-Unis, dans ce qu'elle a de plus répugnant.
Durant cette lecture, j'ai souvent trouvé les humains insondables, car beaucoup se complaisent dans l'abjection et la cruauté. Je retiendrai surtout que l'humanité a un fond sauvage et cruel qui n'est jugulé que par la civilisation, tant qu'elle est à portée de main.
Une écriture ciselée, sublime, au service d'une page d'histoire sordide où la terre fut gorgée du sang des natifs, des pionniers et de tant d'animaux. Ce roman, inspiré par des faits réels, m'a remplie par moments d'une infinie tristesse car vraiment, l'homme est un loup pour l'homme.

 

Citations :

Page 28 : Y a quat’ choses qui peuvent détruire le monde, dit-il. Les femmes, le whisky, l’argent et les nègres.

 

Page 62 : Toute la nuit des nappes d’éclairs sans origine palpitèrent à l’occident derrière les nuées d’orages nocturnes, muant le désert en jour bleuâtre, les montagnes sur cet horizon éphémère massives et noires et livides comme une terre d’un autre ordre dont la vraie géologie n’était point la pierre mais la peur.

 

Page 102 : Ils virent des argonautes déguenillés arrivés des États-Unis qui menaient leurs mules à travers les rues. Ils allaient au sud et s’apprêtaient à gagner la côte par les montagnes. Des chercheurs d’or. Des dégénérés itinérants qui se répandaient vers l’ouest comme un fléau d’héliotropes.

 

Page 164 : On a pas laissé grand-chose à part les os pour les lobos, mais personnellement j’pourrais jamais tuer un loup et j’en connais d’autres qui sont du même avis.

 

Page 187 : Le lendemain soir en arrivant sur la corniche occidentale ils perdirent une mule. Elle rebondit le long de la paroi du canyon avec le contenu des paniers qui explosait sans bruit dans l’air sec et brûlant et elle dégringola à travers la lumière du soleil et l’ombre, tournant sur elle-même dans ce vide solitaire et disparaissant dans un siphon de froide étendue bleue qui l’affranchissait à jamais du souvenir dans l’esprit de toute créature vivante.

 

Page 211 : Des centaines de badauds se pressaient alentour pendant que les scalps desséchés étaient déposés sur les pierres pour être comptés. Des soldats armés de mousquets tenaient la foule à distance et les jeunes filles contemplaient les Américains de leurs immenses yeux noirs et les garçons se faufilaient pour toucher les sinistres trophées. Il y avait cent vingt-huit scalps et huit têtes et l’adjoint du gouverneur et sa suite descendirent dans la cour pour accueillir les mercenaires et admirer leur ouvrage.

 

Page 223 : Ils prirent à l’ouest dans la montagne. Ils passèrent par des petits villages en soulevant leur chapeau pour saluer des gens qu’ils allaient assassiner avant que le mois ne fût achevé.

 

Page 257 : Le cinq décembre ils partirent en direction du nord dans la froide obscurité d’avant l’aube munis d’un contrat signé du gouverneur de l’État de Sonora pour la livraison de scalps d’Apaches.

 

Page 379 : Les feux d’un navire clignotaient dans la houle. Le poulain se pressait contre le cheval avec la tête penchée et le cheval regardait au loin, là-bas où s’arrête le savoir de l’homme, où les étoiles se noient, où les baleines emportent leur âme immense à travers la mer sombre et sans faille.

 

 

 

 

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Mon avis : À l’autre bout de la mer – Giulio Cavalli

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’italien par Lise Caillat

 

Les Éditions de L’Observatoire

 

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Quatrième de couverture :

Giovanni Ventimiglia est pêcheur. Il vend son poisson au marché de DF, une petite ville italienne accrochée à la côte comme beaucoup d'autres, avec un curé qui sermonne et qui va au bordel, une chaîne d'actualité locale qui enflamme le cœur des ménagères avec son présentateur grisonnant et son afflux de touristes estival. Mais un matin de mars, en accostant au port, Giovanni découvre un cadavre, celui d'un jeune homme venu d'ailleurs.
Après lui, les découvertes se succèdent sans que les autorités locales ne parviennent à trouver un fil conducteur, une raison logique à ces vagues mortifères. Désemparée, la petite ville appelle à l'aide, et finira par mettre au point une bien étrange stratégie pour venir à bout de ces vagues macabres mais s'en relèvera-t-elle indemne ?
Giulio Cavalli réinvente le genre de la dystopie dans ce roman aussi noir que fascinant, véritable miroir tendu vers l'humanité et ce qu'elle a de plus dérangeant.

 

 

Mon avis :
DF, petite ville du bord de mer, voit les cadavres venir s'échouer les uns après les autres sur la grève, comme des méduses. de bien étranges cadavres à vrai dire.
Pendant la messe, le prêtre pointe de son courroux les responsables qui selon lui ne font rien pour protéger les braves concitoyens. C'en est trop pour le maire Peppe Ruffini, ainsi que pour le commissaire Magnani.

Les descriptions sont nauséeuses à souhait avec des détails qui rappellent des pages sombres de l'histoire ou encore les dix plaies d'Égypte quand sont évoquées les nuées de mouches. Des tonnes de cadavres gélatineux, qui se ressemblent tous avec leurs yeux vides de poissons. Mais d'où viennent-ils ?
Contre toute attente il faut prendre des mesures pour protéger les vivants de ces miasmes.
Frediano Cattori, le journaliste de la télé locale, en bon charognard voit déjà le scoop de sa carrière.
Le maire va prendre des mesures drastiques contre ce fléau, observé par le monde, jugé, mais jamais aidé.

Étrange écriture où parfois les dialogues sont insérées dans des phrases extrêmement longues et où les protagonistes se répondent sans retour à la ligne ni tiret, juste des virgules. J'ai beaucoup de mal avec les phrases interminables. J'ai à chaque fois l'impression de faire un marathon en apnée, ça m'épuise. C'est comme si un enfant de cinq ans m'assénait sa logorrhée sans savoir où il va ni d'où il est parti. Alors oui, je me demande ce qui motive cette façon de faire, qui n'a que le résultat de me perdre en cours de route, dans le fil de chaque phrase démesurée. Ou alors c'est pour donner un effet vague scélérate et ça marche car on se prend tout de plein fouet… entre deux égarements.

Contrairement à la première partie "Les morts", j'ai préféré la seconde partie de l'histoire "Les vivants", en forme de roman choral, qui donne la parole à différents habitant de DF qui nous parlent de la résolution du problème. Néanmoins il faut parfois avoir le cœur bien accroché pour ne pas régurgiter son café du matin.

Ce roman semble être une parabole, mais de quoi ? de nos sociétés qui ferment les yeux sur le malheur des autres ? Je ne suis sûre de rien… Mais j'y ai vu un certain cynisme car pendant qu'une partie du monde s'écroule certains regardent sans bouger, et beaucoup demeurent dans leurs petites mesquineries. Et puis certains faits mettent l'accent sur une certaine immortalité, nos incongruités et nos incohérences et j'ai trouvé ça assez jubilatoire.
Je pense que les romans comme celui-ci, qui mènent à une réflexion, sont multiples car chaque lecteur y comprend une signification qui lui est propre et que de fait, il n'y a pas une révélation mais une multitude d'interprétations.
À la fin je me suis dit que cette histoire dénonçait beaucoup de choses, qu'on pourrait englober sous un seul terme : hypocrisie. L'auteur se moque de tous ceux qui trouvent une justification à l'indéfendable.
Mais vraiment la toute fin, la troisième partie, je ne l'ai pas comprise.

 

Citations :

Page 50 : Morts. Un tapis de corps amassés comme des sacs, des dizaines, peut-être une centaine de corps chevauchés pas la mer qui hachurait le rivage, les visages des uns sur le torse des autres, un pied qui dépassait sans qu’on puisse deviner le reste, enlacés telles des couleuvres, étalés sans os, en filets, avec des tee-shirts et des pantalons légers rongés par l’eau et raidis par le soleil, des cadavres de personnes, des hommes, jeunes et identiquement musclés comme s’ils avaient été élevés en batterie, puis, jugés matures, livrés par la mer.

 

Page 74 : Vingt-quatre mille sept cent douze cadavres compta l’armée nationale atterrie à DF en fin de journée, le pas déjà fatigué à l’idée d’être confrontée à la mort sans l’adrénaline du meurtre.

 

Page 141 : J’en ai gagné des prix avec mes restaurants. J’en ai eu des satisfactions. La première fois que j’ai ramené mon cul dans une cuisine à DF, la frisella – du pain sec et de la tomate – était considéré comme un plat gastronomique, des fèves on buvait même le bouillon et il suffisait que le poisson soit mort pour être mis sur la table. Une ville de primitifs, vraiment. J’aime ma ville, que ce soit clair, je suis resté ici alors que mes camarades de classe fanfaronnaient en m’envoyant des cartes postales de Rome, de Milan, de Palerme, l’un d’eux a même fini à Londres. Bande d’idiots. Depuis six mois maintenant ils frappent à la porte, les salauds, pour profiter de DF. Trop facile. Ruffini a très bien fait de bloquer les entrées : nettoyer ses chiottes pour y faire chier les autres c’est se manquer de respect et, si à présent la ville est devenue pour beaucoup un mirage, c’est à nous d’en profiter. Bordel. Autrement dix citoyens sur dix n’auraient pas voté oui au référendum du mois dernier pour refuser les demandes de domicile et de résidence.

 

Page 157 : Ottavio Prazio, je le connais bien. Ces dernières années il nous est arrivé de déjeuner ensemble au port, Prazio est un nostalgique, quelqu’un qui célèbre le fascisme plus pour le folklore que par conviction, un brave type, il a une grande gueule mais il ne tordrait pas la patte d’une mouche, gentil avec tout le monde, il offre toujours à boire, distribue des caresses aux gamins, rejette les poissons à la mer, il a payé la communion de ses petits-enfants, on l’appelle le duce mais c’est un surnom comme le pêcheur, le grand-père ou le gros.

 

Page 186 : Au début de cette tragédie, quand ceux-là ont commencé à arriver, personne n’a voulu nous donner un coup de main. Personne. Écrivez-le en majuscules : l’État à qui nous avons versé des milliards de taxes pendant des années nous a abandonnés à notre triste sort et, quand nous avons décidé de nous débrouiller seuls, il a réagi comme une femme trompée. Ça vous semble normal ?

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Mon avis : Le baron perché – Italo Calvino

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’italien par Juliette Bertrand, revue par Mario Fusco

 

Éditions Gallimard - Folio

 

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Quatrième de couverture :

« Pour bien voir la terre, il faut la regarder d'un peu loin. »

 

En 1767, suite à une dispute avec ses parents au sujet d'un plat d'escargots, le jeune Côme Laverse du Rondeau monte dans l'yeuse du jardin. Il ne descendra plus des arbres jusqu'à sa mort, s'y éveillant au savoir et à l'amour, à la solitude comme à la fraternité.

 

Conte philosophique en hommage au siècle des Lumières, autoportrait d'un excentrique épris de liberté, Le baron perché enchante par son humour généreux, ses constantes inventions, son humanisme intemporel.

 

Le baron perché fait partie de la trilogie Nos ancêtres, qui comprend également Le vicomte pourfendu et Le chevalier inexistant.

 


 

Mon avis :
Perché le petit futur baron ? Oui et en même temps pas tant que ça. Dans un arbre oui, par esprit de révolte et je dois dire que j'ai tout de suite été d'accord avec lui ! Il faut savoir se défendre, ne pas se soumettre, surtout quand on est petit. Bon, il est quand-même peut-être un peu perché. Mais qu'il est drôle cet enfant !
D'ailleurs la sœur aînée, Baptiste (c'est tellement étrange d'avoir Traduit Battista en Baptiste) est quelque peu azimutée à sa façon, qui se situe dans le registre du gore culinaire. La mère aussi est spéciale et le père a des rêves de grandeur et un frère naturel très bizarre… C'est une famille de doux dingues.
Quant à Blaise, le petit frère et narrateur, il est en admiration devant cet aîné si courageux et extravagant.

Et puis il y a la petite voisine, Violante. Une espèce de petite pestouille, qui m'a fait penser à Minnie avec Mickey. Ou Daisy avec Donald. Et oui, j'ai de drôles de références, mais c'est parce que dans cette histoire, la fille est celle qui fait tourner en bourrique le pauvre garçon, et qui nous rendrait presque misogyne !.. Comme Minnie et Daisy. Eh oui, l'enfance nous imprègne durablement.

Et donc, cet enfant, parti dans les arbres par esprit de contestation envers ses parents, ne redescendra plus. Tel un funambule il passera d'arbre en arbre sans plus jamais toucher le sol. Et nous lecteurs, avec Côme nous allons parcourir toutes sortes d'essences d'arbres et apprendre lesquels sont les plus adaptés au funambulisme. Eh oui ! Et on n'apprend pas que ça !
Côme, doux rêveur, devient l'anticonformisme personnifié, d'une belle érudition, jamais à cours d'idées et d'une telle ouverture d'esprit pour son temps qu'il m'a énormément plu. Tout l'intrigue, tout l'intéresse, tout le passionne… y compris l'altruisme et le don de soi.

Alors que ce choix, fait sous la colère, d'aller vivre dans les arbres a permis à Côme de vivre des choses incroyables toute sa vie, moi je n'ai pas totalement réussi à me laisser emporter par la poésie de cette existence car j'ai eu froid pour lui, j'ai souffert de sa solitude à sa place et j'ai regretté qu'il ne foule plus jamais l'herbe de ses pieds, qu'il ne puisse serrer Optimus Maximus dans ses bras. Au fond, il est une sorte d'Antigone, inébranlable dans ses convictions, quel que soit le prix à payer.
Cette surprenante épopée sylvestre m'a rappelé que souvent l'orgueil nous emmène plus loin qu'on ne l'aurait voulu et parfois beaucoup trop loin.

 

Citations :

Page 40 : Nous ferons toute une armée des arbres, et nous ramènerons à la raison la terre et ses habitants.

 

Page 76 : C’était un destin extraordinaire pour une mère que d’avoir un fils aussi fantasque, un fils qui se refusait à tout ce qui compose normalement une vie sentimentale ; […]

 

Page 79 : Les exploits que fondent une obstination toute intérieure doivent rester muets et secrets ; pour peu qu’on les proclame ou qu’on s’en glorifie, ils semblent vains, privés de sens, deviennent mesquins.

 

Page 129 : Le figuier vous assimile, vous imprègne de sa gomme, du grondement de ses bourdons ; Côme, après un moment, avait l’impression de devenir figue lui-même : il se sentait mal à son aise, et s’en allait. On vit bien dans le dur sorbier, dans le mûrier ; dommage qu’ils soient si rares.

 

Page 141 : Optimus Maximus était un chien perdu qui s’était joint à la meute par passion juvénile.

 

Page 224 : Que sert d’avoir risqué sa vie, quand on ne connaît pas encore la saveur de la vie ?

 

Page 329 : Tout cela était bien beau : mais moi, j’avais l’impression que mon frère, outre sa folie, tombait dans l’imbécilité, chose plus grave et douloureuse ; soit en bien, soit en mal, la folie est une force de la nature, mais l’imbécilité n’en est qu’une faiblesse, sans aucune contrepartie.

 

Page 345 : Je n’ai jamais bien compris comment Côme pouvait concilier sa passion pour la vie en association et son refus perpétuel de l’univers social ; ce n’est pas une des moindres singularité de son caractère.

 

 

 

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Mon avis : Le jour avant le bonheur – Erri De Luca

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’italien par Danièle Valin

 

Éditions Gallimard

 

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Quatrième de couverture :

Nous sommes à Naples, dans l'immédiat après-guerre.
Un jeune orphelin, qui deviendra plus tard le narrateur de ce livre, vit sous la protection du concierge, don Gaetano. Ce dernier est un homme généreux et très attaché au bien-être du petit garçon, puis de l'adolescent. Il passe du temps avec lui, pour parler des années de guerre et de la libération de la ville par les Napolitains ou pour lui apprendre à jouer aux cartes. Il lui montre comment se rendre utile en effectuant de menus travaux et, d'une certaine façon, il l'initie à la sexualité en l'envoyant un soir chez une veuve habitant dans leur immeuble.
Mais don Gaetano possède un autre don: il lit dans les pensées des gens, et il sait par conséquent que son jeune protégé reste hanté par l'image d'une jeune fille entraperçue un jour derrière une vitre, par hasard, lors d'une partie de football dans la cour de l'immeuble. Quand la jeune fille revient des années plus tard, le narrateur aura plus que jamais besoin de l'aide de don Gaetano Dans la veine de Montedidio, ce nouveau livre du romancier italien s'impose comme un très grand roman de formation et d'initiation.

 

 

Mon avis :
Quelle belle écriture !
Le narrateur nous raconte son enfance pauvre à Naples, quand, orphelin se sentant fils de personne, il vivait dans un réduit d'immeuble et que Don Gaetano le concierge, orphelin aussi, prenait soin de lui et lui prêtait des livres. C'était juste après la guerre.
Gaetano lui racontait les laissés pour compte, l'orphelinat, le froid, la nuit à Naples, la guerre, pourquoi il a caché un juif. C'est beau…

C'est l'histoire d'une vie, du chemin qui mène de l'enfance à l'âge adulte, avec Don Gaetano comme guide et la découverte de la folie des hommes, de l'imagination fertile des enfants, des rêves, des espoirs, de l'amour, du désir, la capacité de renoncer, et une phrase m'a particulièrement touchée : Les désirs des enfants donnent des ordres à l'avenir. C'est comme si cette phrase à elle seule résumait ce roman. Mais il y a aussi le mystère des origines… et la question de savoir qui on est, d'où on vient, de qui.

Alors c'est très poétique et ça dit des belles choses mais c'est très lent. Je me suis pas mal ennuyée… et quand je m'ennuie mon esprit vagabonde et je dois souvent revenir en arrière…

 

Citations :

Page 11 : Comment se fait-il que je n’ai pas eu peur ? Je compris que ma peur était timide, elle avait besoin d’être seule pour sortir à découvert.

 

Page 23 : - Tu cherches à tout prix un saint. Il n’y en a pas, pas plus que des diables. Il y a des gens qui font quelques bonnes actions et une quantité de mauvaises. Pour en faire une bonne, tous les moments se valent, mais pour en faire une mauvaise, il faut des occasions, des opportunités. La guerre est la meilleure occasion pour faire des saloperies. Elle donne la permission. En revanche, pour une bonne action, aucune permission n’est nécessaire.

 

Page 36 : Un étudiant du conservatoire, Ruggero Semeraro, dix-sept ans, a ouvert la fenêtre de son balcon et a joué au piano La Marseillaise, cet air qui donne encore plus de courage. Le curé Antonio La Spina, soixante-sept ans, sur la barricade devant la banque de Naples, criait le psaume 94, celui des vengeances. Le coiffeur Santo Scapece, trente-sept ans, a lancé une bassine de mousse de savon sur la fente de vision d’un tank qui est allé s’écraser contre le rideau de fer d’un fleuriste. En l’espace de trois jours, le tir des habitants était devenu infaillible.

 

Page 52 : Quand on l’étudiait à l’école, l’univers était une table dressée pour des invités munis d’un télescope. En fait, il s’étendait à l’œil nu et ressemblait à un mimosa en mars, avec ses grappes fleuries, surchargées de points nébuleux, jetés pêle-mêle dans le feuillage, serrés au point de cacher le tronc.

 

Page 64 : Les désirs des enfants donnent des ordres à l’avenir. L’avenir est un serviteur lent mais fidèle.

 

Page 103 : Petit, j’imaginais que j’étais un bout de cet immeuble, mon père était le corps du bâtiment, ma mère la cour. Je fouillais dans tous les coins pour mieux les connaître. C’était une version qui me tenait compagnie et faisait de la nuit mon amie.

 

Page 126 : En classe nous étudiions jusqu’à la Première Guerre mondiale, puis l’année scolaire se terminait et avec elle le vingtième siècle. Un jeune homme avait tiré sur un archiduc et le monde s’était fait la guerre à lui-même, divisé entre ceux qui étaient du côté de l’archiduc et ceux du côté du jeune homme.

 

Page 129 : Il y avait une générosité civile dans l’école publique, gratuite, qui permettait à un garçon comme moi d’apprendre. J’avais grandi en elle et je ne mesurais pas l’effort d’une société pour s’acquitter de cette tâche. L’instruction nous donnait de l’importance, à nous les pauvres. Les riches s’instruisaient de tout façon. L’école donnait du poids à ceux qui n’en avaient pas, elle rendait égaux. Elle n’abolissait pas la misère mais, entre ses murs, elle permettait l’égalité. La différence commençait dehors.

 

 

 

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Mon avis : Nous sommes Bob Tome 1 – Dennis E. Taylor

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Sébastien Baert

 

Éditions Le Livre de Poche

 

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Quatrième de couverture :

Bob Johansson vient de vendre sa start-up et va pouvoir profiter de la vie. Tant de lieux à visiter, de livres à lire et de films à voir ! Pas de bol, il se fait écraser en traversant la rue. Lorsqu’il revient à lui, un siècle plus tard, c'est pour découvrir qu'il appartient désormais au gouvernement. Téléchargé dans un ordinateur, il est pressenti pour devenir une IA capable de se répliquer à volonté, aux commandes d'une sonde interstellaire destinée à la recherche de planètes habitables. Les enjeux sont considérables. S'il refuse cette mission, on l'éteindra et un autre prendra sa place. S'il accepte, il devient une cible de choix. Au moins trois autres puissances se verraient bien envoyer leur sonde en premier, et tous les coups sont permis.
Pour Bob, l'endroit le plus sûr, c'est dans l'espace, le plus loin possible de la Terre. C'est du moins ce qu'il croit

Drôle, intelligent, captivant et totalement surprenant. Lanfeust Mag.
Un très grand premier opus. Science-Fiction magazine.

 

 

Mon avis :
Bob ! Un homme bien dans son époque, jeune startupper, totalement geek, fan de science-fiction, signe un contrat avec CryoEterna pour être cryognisé le jour de sa mort puis ramené à la vie plus tard, quand la science aura énormément progressé. Et comme si la faucheuse n'avait attendu que ça embusquée au détour d'une rue, Bob se fait écrabouiller le lendemain par une voiture.
Et là commence sa deuxième vie ! Enfin, si on peut dire… 117 ans plus tard, soit en 2133.

J'ai tout de suite beaucoup aimé Bob. Il est facétieux et pragmatique, ne s'affole pas facilement, même quand il découvre sa nouvelle situation qui n'est pas exactement ce à quoi il s'attendait. À vrai dire, il est un peu sous contrôle endocrinien pour mieux supporter le stress et en même temps il n'est plus qu'une sorte d'intelligence artificielle, donc c'est très bizarre.
Le projet était déjà très bizarre, là, c'est pire. Mais ça ne l'inquiète pas outre mesure. Il considère qu'un avenir incroyable s'offre à lui.

Dans cette centaine d'années là, la religion aura gagné énormément de terrain et sera au pouvoir, avec tout ce que ça peut impliquer de censures et d'interdits ; une théocratie - FAITH - avec un ministère de la Vérité et un de la Pensée éclairée et pas que…, des contrôleurs de piété et toutes sortes de joyeusetés à l'avenant.

Bob fait désormais partie d'un projet nommé HEAVEN dont le but est trouver des planètes habitables. Et j'ai eu envie de crier : EN ROUTE POUR L'AVENTURE ET AU DELÀ !!! Eh oui, parce que dès le début j'ai trouvé cette histoire hyper enthousiasmante. D'autant que Bob, qui est devenu une AI, un programme, un répliquant, en tout cas virtuel, peut se dupliquer à l'infini… Et il le fait et ça devient complètement délirant !
C'est bourré de références à la pop culture et c'est drôle. J'ai adoré, même si je ne les avais pas toutes, spécialement sur les jeux vidéo. J'ai dû aller à la pêche au infos. En revanche, celles sur le cinéma avec des blockbusters comme Star Trek et Star Wars ainsi que les dessins animés, j'étais en terrain de connaissance et franchement c'est assez jubilatoire. Bob a un gros côté ado attardé et forcément ses avatars aussi.

J'ai aimé l'humour qui pointe sans cesse son nez l'air de rien. Mais j'ai eu du mal à rester concentrée lors des nombreuses batailles dans l'espace. Je les ai trouvées trop répétitives et assez similaires. Et puis je me suis un peu perdue avec tous les Bob, au début en tout cas.
J'ai néanmoins rapidement trouvé ce roman totalement captivant, j'ai énormément aimé, et même de plus en plus à mesure que j'avançais dans l'histoire. Les nombreux Bob ouvrent le champ des possible à l'infini. Par certains côtés comme l'humour geek, voire absurde, et l'exploration spatiale, cette histoire me rappelle un livre de 
Douglas Adams que j'avais adoré il y a des années et qui s'appelait à l'époque le guide du routard galactique et qui était le premier tome d'une trilogie.
Bien sûr je vais poursuivre mon exploration de cet univers un peu fou avec les deux tomes qui suivent.

 

Citations :

Page 23 : - Je suis humaniste, Karen. Tu le sais. Je ne crois pas à l’au-delà. À ma mort, j’ai le choix entre renaître ou rien. Je ferai avec ce qui se présentera quand je me réveillerai.

 

Page 120 : Ce qui m’agaçait le plus dans le fait d’être un esprit dépourvu de corps, c’était, eh bien… de ne pas avoir de corps. Il fallait constamment que je trouve à m’occuper si je ne voulais pas avoir l’impression de me trouver dans un caisson d’isolation sensorielle. Chacune de mes tentatives pour sourire, remuer ou froncer les sourcils avait connu le même sort : le sentiment d’avoir le visage anesthésié à la novocaïne. En ce qui concernait le reste de mon corps, j’avais l’impression d’être enfermé dans un morceau de coton géant. Je me demandais si ce n’était pas cette sensation qui était à l’origine des crises de démence des réplicants.

 

Page 144 : L’objectif de ma mission était de découvrir des planètes habitables, ou, à défaut, de trouver des planètes dont il serait possible de modifier l’environnement ou sur lesquelles il serait possible de vivre avec l’aide d’une assistance technique.

 

Page 257 : La planète était légèrement plus grosse que la Terre, mais sa pesanteur était plus faible, probablement à cause d’un noyau plus petit. Avec son atmosphère plus dense, c’était l ‘environnement idéal pour les créatures volantes et l’équivalent de grands arbres. Et ces derniers en avaient profité.

 

Page 289 : - Quinze millions de personnes. On est passés de douze milliards à quinze millions. Notre espèce est vraiment la plus bête que je connaisse. On ferait peut-être mieux de les laisser mourir et de tout recommencer à zéro.

 

Page 352 : Je me frottais le front. La facilité avec laquelle certains parvenaient à transformer n’importe quelle ânerie dogmatique en mouvement politique ne cesserait jamais de me surprendre.

 

 

 

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Mon avis : Nuit mère – Kurt Vonnegut

Publié le par Fanfan Do

Traduit de l’américain par Gwilym Tonnerre

 

Éditions Gallmeister

 

Mon avis sur Insta c'est ici

 

Quatrième de couverture :

"Je suis américain de naissance, nazi de réputation et apatride par inclination."
Ainsi s'ouvrent les confessions de Howard W. Campbell Jr. qui attend d'être jugé pour crimes de guerre dans une cellule de Jérusalem. Ce dramaturge à succès exilé en Allemagne fut en effet le propagandiste de radio le plus zélé du régime nazi. Mais il clame aujourd'hui son innocence et prétend n'avoir été qu'un agent infiltré au service des Alliés. Il lui reste désormais peu de temps pour se disculper et sauver sa peau

 

 

Mon avis :
Est-ce que je m'attendais à être déstabilisée par ce roman ? Peut-être ! C'est pour ça que je voulais le lire ! Mais aussi parce qu'il y a longtemps que je veux lire 
Kurt Vonnegut. J'aime ce qui est inhabituel et là, on est servi. Tout d'abord, les chapitres très très courts sont au nombre de 45, pour 215 pages.
L'humour est grinçant, voire loufoque, j'ai adoré !

Howard W. Campbell Jr. attend dans sa cellule de Jérusalem d'être jugé pour crime de guerre, car connu pour avoir été le propagandiste de radio le plus zélé du régime nazi.
Américain de naissance, immigré en Allemagne durant l'enfance, il y reste à l'âge adulte, épouse une allemande et devient plus nazi que les nazis.
Mais au fond, est-ce la vérité ? Lui, prétend que non, qu'il était un agent double.

Chapitre après chapitre je me suis délectée de ce récit à l'humour caustique et de ces faux-semblants. Car tout le problème avec un agent double, un menteur ou un manipulateur, ce qui revient au même, est de savoir à quel moment il dit la vérité et quand il ment. Il raconte sa vie, la guerre, l'antisémitisme, l'Allemagne. Il y a une forme de cynisme dans la narration des événements de cette époque sinistre, qui vire au jubilatoire car traités sur le mode de l'humour noir, et ça j'adore ! Par exemple l'histoire du chien de Resi, alors que j'aime les chiens... mais la chute m'a fait rire. Pourtant ça a été une réalité pendant la guerre.

Tout le long du roman, au fil des événements de sa vie, on a l'impression qu'il a été agent double sans le savoir, ou alors vrai américain patriote et faux nazi, ou sympathisant nazi et traître à sa patrie, ou homme aux personnalités multiples, ou imbécile heureux mais ça c'est pas sûr, tout ça dans une espèce de schizophrénie qui l'arrange bien... ou pas. Tout dans l'histoire tend à noyer le poisson. En fait, de nombreuses fois je me suis dit "ce mec est dingue, complètement ravagé".

Ce roman dit des choses de cette guerre et de ses idéologies nauséabondes, sur un ton qui paraît léger, pratiquement toujours caustique et ironique. J'ai bien kiffé !!

 

Citations :

Page 27 : Son nom est Andor Gutman. Andor est un juif estonien assoupi, pas très vif. Il a passé deux ans au camp d’extermination d’Auschwitz. D’après son propre témoignage réticent, il a bien failli en ressortir par la cheminée d’un four crématoire :

- Je venais d’être affecté au Sonderkommando, me dit-il, quand l’ordre est venu de Himmler de fermer les fours.

 

Page 54 : Ma mère et mon père sont morts. Certains disent qu’ils sont morts de peine de cœur. Ils sont morts dans leur soixantaine, en tout cas, quand les cœurs sont vulnérables.

Ils ne vécurent pas assez longtemps pour voir la fin de la guerre, et ne revirent jamais leur radieux garçon. Ils ne me déshéritèrent pas, bien qu’ils durent en être amèrement tentés.

 

Page 79 : Elle était incroyablement bien conservée pour une femme de quarante-cinq ans.

 

Page 90 : Une esclave sortit de la maison en traînant des pieds, un vase bleu d’une beauté éblouissante entre les mains. Elle était chaussée de sabots en bois maintenus avec de la toile. Elle était une loque sans nom, sans âge, sans sexe. Elle avait les yeux comme des huîtres. Elle avait le nez rongé par le froid, marbré de blanc et de rouge cerise.

 

Page 133 : - Howard… quand ma femme est morte, je n’avais d’allégeance pour rien ni personne. J’étais, moi aussi, le fragment insignifiant d’une nation à deux.

 

 

 

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