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Mon avis : La voiture rouge – Jacques Timmermans

Publié le par Fanfan Do

Autoéditions

 

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Quatrième de couverture :

Après un premier recueil de nouvelles SFF, Jacques Timmermans nous revient avec un roman à la croisée des genres, mêlant intimement le réel et l’imaginaire.
En pénétrant dans son univers littéraire, les pistes de la raison pure se brouillent rapidement, le doute s’insinue peu à peu sur nos vérités inébranlables, et nous apparaît alors fort naturellement en filigrane la part de vrai mystère que recèle notre monde.

Une banale auto, abandonnée non loin d’un village reculé de campagne.
Mais voilà que cette voiture s’est mise soudain à effectuer de petits déplacements imprévisibles. Et que, plus étrange encore, la répétition de cet événement laisse bientôt les villageois dans une totale indifférence.
Jusqu’au jour où débarque Zoé, une journaliste freelance, attirée sur place par la perspective d’un article à sensation, et bien déterminée à tirer cette affaire au clair. Sa tâche va cependant s’avérer plus complexe qu’elle ne se l’était imaginée. Comment peut-elle faire la part des choses, plongée au cœur d’un monde qui lui apparaît de plus en plus indéchiffrable ?
Son enquête, semée d’embûches et de rebondissements, va lui réserver encore bien des surprises…


 

 

Mon avis :
Voilà une histoire qui tourne autour d'une étrange petite voiture rouge qui bouge toute seule et imperceptiblement dans un petit village belge.
Zoé, jeune journaliste qui vient enquêter sur ce phénomène atterrit dans un manoir au fond d'une clairière en guise d'hôtel. Et là je dois dire que j'ai tout de suite aimé son hôte, un vieil homme du nom de Reginald de Sambre. Accueillant, érudit et sympathique, il a un salon rempli d'étagères elles-mêmes remplies de livres… des centaines de livres ! le paradis sur Terre !!!

Zoé a juste un petit défaut typique des citadins, elle prend les habitants de la campagne pour des ploucs qui vivraient quasiment dans une époque lointaine et hors du temps. Mais voilà, elle n'a pas totalement tort concernant ce village. Il semble être hors du monde et du temps. D'ailleurs il est décrit avec beaucoup d'humour notamment quand les habitants sont au troquet du coin.

Les investigations de Zoé la mènent... nulle part en fait. Elle a l'impression de piétiner. Mais à force de persévérance elle va apprendre peu à peu des petites choses, de-ci, de-là, et on sait bien que les petits ruisseaux font les grandes rivières. Avec opiniâtreté elle mène son enquête, car elle ne peut pas revenir bredouille à la rédaction du journal où sa rédac' chef l'attend au tournant. Mais quel sac de nœud le mystère de cette petite voiture de marque inconnue, possédant une immatriculation répertoriée nulle part et qui semble avoir une vie propre!...
Et tout le long de ma lecture je me suis demandée quelle était cette énigme, avec les questions en suspens, les rebondissements et les doutes qui s'insinuent.

Encore une fois j'ai énormément aimé la belle écriture de 
Jacques Timmermans, son humour subtile et son imagination débordante pour embarquer le lecteur dans une histoire abracadabrantesque qui m'a fait passer un excellent moment, autant par le sujet que par les personnages tous hauts en couleur. On apprend par ailleurs beaucoup sur différents sujets tels le rasoir d'Ockham, la vie sylvestre et l'enchevêtrement du mycélium laccaire, la cognition, et d'autres choses encore, et c'est ce que j'adore dans les romans, quand je me distrais et m'instruis en même temps.

Et cette fin !... je ne m'y attendais pas et je pense que c'est le genre d'épilogue qu'on ne peut s'empêcher de retourner dans tous les sens tant il interpelle et fait réfléchir.
Un roman passionnant qui se dévore !

 

Citations :

Page 10 : Mais voilà, l’esprit humain est ainsi fait qu’il s’accommode finalement sans peine de l’irrationnel lorsque la répétition de celui-ci finit par l’intégrer dans la nature habituelle des choses.

 

Page 76 : Le monde que je vois aujourd’hui me paraît malheureusement rongé en profondeur par les prétendues valeurs qu’il met en avant : ce n’est partout que compétitivité, égocentrisme, consommation et accumulation à outrance, toujours plus de croissance aveugle. Difficile de retrouver dans ce soi-disant progrès un vrai sens à notre existence, vous ne pensez pas ?

 

Page 156 : Mais c’est un destin on ne peut plus normal que les parents s’en aillent avant les enfants, l’inverse serait atroce et profondément injuste. Et puis nos êtres chers, une fois disparus, sont finalement avec nous beaucoup plus souvent qu’ils ne l’étaient de leur vivant, n’est-ce pas ?

 

Page 247 : Pourquoi ne nous sommes-nous jamais mariés ?

- On s’aimait trop, peut-être ?

 

 

 

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Mon avis : L’aube d’un autre monde – Lionel Emery

Publié le par Fanfan Do

Éditions Souffles Littéraires

 

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Quatrième de couverture :

Arizona, 1914.
Ce jour de baptême devait être celui d’une grande fête, il s’achèvera par un massacre ne laissant en vie qu’une mère, Lydia, et son enfant.
C’est un jeune prêtre au passé sombre puis un vétéran des guerres indiennes qui vont l’aider à le retrouver.
Les pistes que cette quête leur fera prendre révéleront les secrets de plus en plus terribles de ceux dont le but est de déstabiliser le monde afin de le diriger.
Quels liens peuvent exister entre les massacres de simples fermiers, l’enlèvement d’enfants et le déclenchement de la Première Guerre Mondiale ?
À vous de le découvrir…


 

 

Mon avis :
Arizona printemps 1914. Un baptême a lieu lorsqu'une bande de mexicains accompagnés d'adolescents soldats armés jusqu'aux dents arrive et fait un carnage. Mais pourquoi ? Et pourquoi tant de cruauté ? Ils n'épargnent que lydia et son bébé dont c'était le baptême. Mais avant de partir ils lui font quelque chose d'abominable.
J'ai tout de suite été happée dans le roman parce que bien évidemment ce déchaînement du début a une raison d'être pour la suite de l'histoire… cette violence extrême et gratuite allait engendrer une réaction terrible, un désir de vengeance ou à minima un besoin de réponses pour pouvoir continuer à vivre.

Lydia part, accompagnée de Paul Deville, un prêtre extrêmement bienveillant qui n'a pas l'air de porter en grande estime les hautes instances de l'Église, celles qui prêchent l'austérité pour leurs ouailles mais surtout pas pour elles-mêmes. Ce prêtre est un étrange personnage, hors norme. Il embarque dans la quête de Lydia qu'il a fait sienne son vieil ami Garonn. Et ce que Garonn dit à Lydia sur le monde fait froid dans le dos. Parce qu'il raconte les puissants et leur cynisme qui servent toujours leurs intérêts sur le dos du peuple et trop souvent dans le sang, sur lequel s'est construite l'Amérique. Il raconte la cruauté, la cupidité et la perfidie humaine et comment Paul un jour a rencontré Dieu dans un besoin de rédemption pour ne pas mourir. Et on comprend toute la logique qui le pousse à retrouver la bande qui a perpétré le massacre.

C'est une histoire très dure, sans concessions et très réaliste qui met en exergue le sadisme dont certains humains, trop nombreux, sont capables. Peu à peu on va découvrir une "utopie" malsaine et furieuse accompagnée d'un totalitarisme absolu, imaginés par le cerveau malade d'un illuminé à l'ego hypertrophié.

J'ai été captivée par l'hypothèse élaborée dans ces pages, étayée par la noirceur de l'âme humaine parfois, qui, bien qu'elle semble complètement mégalomane amène une grosse tension et un suspense haletant.

Alors le bémol, mais ça c'est personnel, il y a un combat de coqs et je m'en serais bien passée avec tous ces détails, sans parler du rat. Je déteste ce que les humains font subir aux animaux, c'est tellement ignoble. En même temps ça met l'accent sur la cruauté des Hommes qui détruisent TOUT, leurs semblables, les animaux, la nature, leur possibilité de pouvoir continuer à vivre sur cette planète en fait.

Assez rapidement je me suis demandé si on allait vers une uchronie… Mais chut ! Je suis une tombe, même sous la torture je ne dirai rien !
Ce fut une lecture passionnante, par contre âmes sensibles s'abstenir. Ça défouraille à tour de bras, ça surine copieusement, le sang coule abondamment. Ce n'est jamais gratuit. C'est juste le reflet de ce qui se passe partout dans le monde avec la sauvagerie dont nous sommes capables.

Merci beaucoup Babelio_ Masse Critique et les Éditions Souffles Littéraires pour cette découverte.

 

Citations :

Page 26 : Le soir venu, une pluie torrentielle martèle la toiture et les vitres de la cuisine éclairée par le feu de cheminée. Paul regarde les coulées de boue emporter les dernières traces du baptême. Rubans, dentelles, dragées et fleurs se mêlent aux cendres, aux douilles et au sang charriés par l’eau. Il se dit que ces rigoles sont à l’image de l’humanité dans ce qu’elle peut avoir de beau et de tellement laid à la fois, un peu de fête pour beaucoup de tragédie, l’humanité et son irrémédiable façon de s’autodétruire, l’humanité et sa manie de ne pas l’être vraiment, humaine…

 

Page 54 : Regardez c’qu’on fait à la nature avec nos villes, nos chemins d’fer, nos usines et tout le reste. Regardez ! Du pillage forcené ! D’la destruction ! Vraiment, je pense que le monde méritait mieux ! Mieux que l’homme, en tout cas que tous ceux-là, y a pas de doute… Des ordures pour qui la guerre n’a qu’un seul but : le profit, perpétuel et sans aucune limite ! Des hommes dénués d’âme qui envoient des types comme nous se battre à leur place en nous persuadant que c’est pour de belles et grandes causes… Les actes héroïques issus d’ordres aux fondements ignobles, honteux ! Du sacrifice en masse pour des raisons cachées, très bien cachées, parce que terriblement viles, si sales !

 

Page 56 : Imaginez Lydia, imaginez que c’pays immense , entouré de mers et d’océans, était entièrement peuplé d’Indiens d’toutes sortes, pas loin de cent millions ! Il n’en reste pas même cent mille. L’humanité n’avait jamais connu un massacre pareil, un crime plus exactement… Tout ça a pris moins d’deux cents ans… alors qu’ils étaient là depuis des milliers d’années !

 

Page 110 : Sur un soupir aussi pesant que sa déception du monde, Garonn reprend son chemin en se disant que si les humains sont capables d’être aussi cruels dès l’enfance, alors pourquoi s’étonner de ce qui arrive et arrivera dans le monde ?

 

 

 

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Mon avis : Mort comme au premier jour – Guillaume Suzanne

Publié le par Fanfan Do

Éditions Black Rabbit

 

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Quatrième de couverture :

Vous vous êtes déjà demandé ce qu'il y avait après la mort ? Moi, je ne m'étais jamais posé la question. Mais depuis que j'ai confondu mes marches d'escalier avec une piste de ski, la réponse s’est imposée à moi sous la forme la plus définitive qui soit. Et je peux au moins vous dire ceci : la vie après la mort n'est pas de tout repos…
Le retour de l’auteur déjanté des Poubelles Galactiques dans une aventure après la mort que vous n’êtes pas près d’oublier !


 

 

Mon avis :
Premier avis de décès :
Le narrateur de cette histoire nous raconte comment il est mort bêtement en tombant dans l'escalier et en quelque sorte nous invite à une visite guidée… ben, de la mort hein ! Et j'ai tout de suite beaucoup aimé ! C'est drôle, sarcastique et irrévérencieux, tout ce que j'aime.
Il rend la mort rigolote, on aurait presque envie d'y être si c'était vraiment comme ça. Bon, à part les limaces qui sont une de mes phobies insurmontables et qui viennent faire un tour… Beurk ! Bon, les morts ne sont pas spécialement contents d'être morts en fait, question d'incompatibilité d'humeur et puis la mort c'est très surfait… c'est déroutant, il faut s'y faire !

Suivent le deuxième puis le troisième avis de décès que j'ai pris pour des nouvelles avant de me rendre compte qu'il s'agissait des différents chapitres. C'est joyeusement iconoclaste et ça m'a fait passer un bon moment, avec un sourire idiot collé sur le visage.

Durant cette lecture j'avais l'impression que quelqu'un de facétieux (l'auteur, Ah le coquinou !!!) s'amusait à m'amuser avec des choses qu'on considère grave, tragiques et pas drôles.
Un bon petit moment de lecture. Petit par la taille, 76 pages, mais qui font une parenthèse rigolote dans le quotidien.
Et comme j'aime bien me marrer avec des sujets improbables, j'ai déjà dans ma pal 𝐋𝐞𝐬 𝐩𝐨𝐮𝐛𝐞𝐥𝐥𝐞𝐬 𝐩𝐥𝐞𝐮𝐫𝐞𝐧𝐭 𝐚𝐮𝐬𝐬𝐢 du même désopilant 
Guillaume Suzanne.

 

Citations :

Page 10 : - Ne t’en fais pas. Tu es mort, c’est tout.

- C’est tout ? Dieu merci, tu m’as fait peur, j’ai cru qu’il m’était arrivé quelque chose de grave !

 

Page 16 : - Ne sois pas stupide ! Ce sont les moines du quatorzième siècle qui ont créé les pulsions homosexuelles pour rendre la prêtrise attrayante aux jeunes générations.

 

Page 18 : Pour la première fois de ma vie et de ma mort, je me sentais totalement libre, en phase avec moi-même et en paix avec tous les mondes.

 

Page 47 : Je méprise énormément les hommes, que ce soit ante ou post mortem. Je ne fais pas de jaloux. Ce qui me réconcilie avec l’Humanité, c’est qu’une espèce qui a engendré – même par hasard – l’odeur de la pluie sur l’asphalte ne peut pas être totalement mauvaise.

 

 

 

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Mon avis : Anne de Green Gables – Lucy Maud Montgomery

Publié le par Fanfan Do

Traduit par Hélène Charrier

 

Éditions Monsieur Toussaint Louverture

 

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Résumé de l’éditeur :

Cheveux désespérément roux, visage constellé de taches de rousseur, Anne Shirley est une petite fille curieuse, pleine d’énergie, souvent perdue dans ses pensées, parfois d’une gravité solennelle, sans aucun doute intemporelle. Difficile de résister à ce petit bout d’humanité de onze ans parfaitement imparfait, héroïne d’une série de romans qui a su conquérir des millions de lecteurs à travers le monde, Anne de Green Gables, écrit par Lucy Maud Montgomery, et dont le premier tome parut en 1908. Orpheline à l’esprit vif, à l’imagination sans bornes et qui adore employer de « grands mots », Anne se retrouve par erreur chez Marilla et Matthew Cuthbert qui attendaient un garçon pour les aider à la ferme.


 

 

Mon avis :
Une lecture commune pour ce roman, dont j'ai vu passer tant d'avis dithyrambiques, ne pouvait qu'apporter des échanges enrichissants.
Dès le début je me suis sentie emportée avec douceur dans cette histoire d'un autre temps. Et cette petite Anne ! Quel personnage incroyable ! Tellement volubile, enthousiaste, prête à aimer tout ce qui existe sur terre, avec une telle capacité à s'extasier. Un rayon de soleil dans la vie morne de Matthew le gentil et Marilla l'austère.

Alors qu'ils avaient prévu d'adopter un garçon, Matthew et Marilla, qui sont frère et soeur, voient arriver dans leur vie Anne. Et elle parle, elle parle constamment. C'est qu'elle en a des choses à dire ! Elle a besoin d'exprimer son amour pour la beauté du monde et de toutes ces petites choses qui font que la vie est belle. Elle parle à tout, aux gens, aux fleurs, aux ruisseaux, à la nature tout entière. Anne n'est qu'amour, passion et enthousiasme, mais elle a parfois aussi des colères explosives et des rancunes tenaces.
Elle est vive, intelligente, drôle et rebelle.

Anne est un papillon, un feu follet, un zéphyr printanier, un pétale dans le vent, une luciole, un éclat de rire. Elle croque la vie à pleines dents, voit toujours ce qui est beau et ainsi fait disparaître les mesquineries du monde qui l'entoure. Elle est rafraîchissante et redonne foi en l'humanité. D'ailleurs elle humanise ceux qu'elle approche, faisant sortir le meilleur d'eux-mêmes parfois enfoui sous une carapace de sévérité, telle Marilla qui s'éveille peu à peu à la fantaisie d'Anne et aux petites joies de l'existence.

Un roman écrit en 1908 qui raconte une histoire simple, de gens simples avec des rêves simples et des joies simples.

Ça, c'était le côté positif. Maintenant, le côté négatif, ou plus terre à terre. C'est bien beau mais ça n'existe pas un monde où tout est beau, où les gens sont tous bons et généreux, où la pire des personnes est juste un peu langue de vipère. Ou alors ça s'appelle une utopie ! J'aimerais bien, hein, un monde où la bêtise serait éradiquée, où tout le monde serait gentil, où il n'y aurait plus de guerre… zut, voilà que je me transforme en miss France XD. Bref, c'est rempli de bons sentiments et il ne se passe pas grand-chose à part la vie à la campagne au début du XXÉME siècle. Néanmoins ça se lit avec beaucoup de plaisir. Par ailleurs le livre est un très bel objet, mais 
Monsieur Toussaint Louverture nous a habitué à ça…

 

Citations :

Page 17 : Matthew avait peur de toutes les femmes, hormis Marilla et Madame Rachel ; il éprouvait la désagréable impression que ces mystérieuses créatures se moquaient de lui dans son dos. Et il avait peut-être raison, car c’était un personnage d’apparence curieuse : une silhouette dégingandée, de longs cheveux gris fer tombant sur des épaules voûtées, et une épaisse barbe brune et soyeuse qu’il portait depuis ses vingt ans. En vérité, à soixante ans, il ressemblait beaucoup à ce qu’il était à vingt, grisaille exceptée.

 

Page 102 : - Mais moi, je préférerais avoir l’air ridicule comme tout le monde plutôt que d’être la seule à être convenable, insista Anne, plaintive.

 

Page 107 : Impuissante, Marilla sentait bien que tout ceci aurait mérité de sérieux reproches, mais il était indéniable, et c’est ce qui la retenait, que ce qu’avait dit Anne, particulièrement au sujet des sermons du pasteur et des prières de Monsieur Bell, correspondait à ce qu’elle-même pensait en son for intérieur depuis des années, sans jamais avoir osé le dire. Il lui sembla presque que ses pensées secrètes, ses critiques silencieuses, avaient soudainement pris corps – une forme palpable et accusatrice – en la personne de ce petit bout d’humanité négligé à la langue bien pendue.

 

Page 177 : Ruby Gillis dit que quand elle sera grande, elle aura toujours plein de prétendants qu’elle mènera à la baguette et qu’ils seront fous d’elle, mais je pense que ce serait trop palpitant. Je préfère n’en avoir qu’un seul sain d’esprit.

 

Page 340 : - Eh bien, moi, je ne voudrais être personne d’autre que moi-même, même si je dois me passer du réconfort des diamants toute ma vie, déclara Anne. Cela me convient très bien d’être Anne de Green Gables avec mon collier de perles. Je sais que Matthew y a mis plus d’amour qu’il n’y en a jamais eu dans les bijoux de la Dame en Rose.

 

 

 

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Mon avis : La passe-miroir Livre 4 – La tempête des échos – Christelle Dabos

Publié le par Fanfan Do

Éditions Gallimard Jeunesse

 

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Quatrième de couverture :

Les effondrements se multiplient, de plus en plus impressionnants: Babel, le Pôle, Anima... aucune arche n'est épargnée. Pour éviter l'anéantissement total il faut trouver le responsable. Trouver l'Autre. Mais comment faire sans même savoir à quoi il ressemble ? Plus unis que jamais, Ophélie et Thorn s'engagent sur des chemins inconnus où les échos du passé et du présent les mèneront vers la clef de toutes les énigmes.


 

 

Mon avis :
Voilà le Tome 4, la dernière ligne droite… enfin, droite non ! Car tout est mouvementé dans cette saga et rien ne va en ligne droite !

Les arches perdent des pans entiers dans le vide et une évacuation des non-natifs de Babel est organisée, ou plutôt une expulsion qui tourne à l'émeute. Ophélie doit absolument trouver "l'autre" car sans doute est-il responsable de ce qui est en train d'arriver. Ou bien est-ce Eulalie ? Et pour ce faire, elle pense devoir intégrer l'observatoire des Déviations, cet endroit terrible où il semble se passer des choses affreuses.

Je me suis beaucoup demandé qui était en réalité Ophélie. À mesure qu'elle avance dans sa quête de la vérité, tout devient de plus en plus étrange, voire métaphysique, autant pour elle que pour le lecteur. Je dois dire que par moments j'ai été perdue. On découvre peu à peu sur elle des choses qu'elle-même ne sait pas. Elle navigue à vue dans de constantes distorsions de temps et de lieux.

Ophélie qui pensait juste être une petite conservatrice de musée insignifiante s'avère au fil des pages une personne forte, volontaire, pugnace, résistante, intuitive, généreuse, altruiste, un très beau personnage féminin.

Le final de cette saga est totalement ébouriffant. Cependant, quelques pages de moins ne m'auraient pas déplu. J'ai parfois trouvé trop long les nombreuses descriptions de cette espèce d'apocalypse contre laquelle Ophélie lutte avec l'énergie du désespoir mais surtout une force incroyable.
J'avoue que cette fin ouverte n'est pas celle que j'espérais. Elle donne la possibilité d'une suite que j'aimerais tellement mais qui n'a pas été écrite…
En tout cas, une saga totalement addictive dont le tome 2 a été mon préféré.

 

Citations :

Page 233 : Ophélie eut soudain l’impression de mieux respirer. Thorn avait parfois des manières de coupe-papier, mais son absence de doutes balayait les siens.

 

Page 294 : À sa vive surprise, Thorn acquiesça sans seulement essayer de la décourager. Elle ressentit à cet instant pour lui une infinie gratitude. Elle lui était reconnaissante d’être si stable devant elle, si présent parmi les absents, si vivant surtout.

 

Page 346 : Chaque choix comportait la promesse d’une récompense et le risque d’une condamnation.

 

Page 538 : Il la couvrait de baisers, elle le couvrait d’insultes. Une bulle de bonheur dans un océan de chaos.

 

 

 

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Mon avis : La passe-miroir Livre 3 – La mémoire de Babel – Christelle Dabos

Publié le par Fanfan Do

Éditions Gallimard Jeunesse

 

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Quatrième de couverture :

Deux ans et sept mois qu’Ophélie se morfond sur son arche d’Anima. Aujourd’hui il lui faut agir, exploiter ce qu’elle a appris à la lecture du Livre de Farouk et les bribes d’informations divulguées par Dieu. Sous une fausse identité, Ophélie rejoint Babel, arche cosmopolite et joyau de modernité. Ses talents de liseuse suffiront-ils à déjouer les pièges d’adversaires toujours plus redoutables ? A-t-elle la moindre chance de retrouver la trace de Thorn ?


 


 

Mon avis :
À peine le tome 2 refermé que je me jetais avec avidité sur le 3 avec comme seul rêve de pouvoir m'extraire du monde le temps de le lire d'une traite. Hélas, ça c'est pas possible.

Ophélie est retournée sur Anima et elle se morfond depuis plus de deux ans tant l'ennui, le doute et l'incertitude sont profonds. Par chance, elle réussit à échapper à la vigilance de la Rapporteuse et sa girouette et décide d'aller à Babel.
Et là, force est de constater que l'autrice n'est jamais à court d'imagination, une imagination débordante, délirante, où chaque nouveau monde nous réserve de nouvelles fantasmagories toutes plus folles les unes que les autres. C'est chaque fois un plaisir incommensurable de découvrir ces lieux féeriques qui nous éloignent de notre quotidien pour nous ramener à notre âme de gosse qui croyait que tout était possible.

À Babel, Ophélie, qui s'y trouve incognito, se lance un défi énorme qui devrait lui permettre d'atteindre son but, qui consisterait presque à décrocher la lune.
"Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer" semble être le mantra d'Ophélie.

Babel, sous ses airs bien propre, pacifique et disciplinée est en réalité une société totalitaire. Tous ces interdits, c'est vraiment glaçant. Tout le monde est surveillé, tout le monde doit dénoncer le moindre écart au règlement qui est régi par des codes très stricts, qui vont de la tenue vestimentaire jusqu'au langage. La violence est prohibée, il est interdit d'utiliser le mot guerre, de crier, de dire des grossièretés, de mentir. Les sanctions sont sans violences physiques et pourtant terribles. Dans cette arche où le mensonge est un crime très grave, Ophélie vit sous une fausse identité.

On rencontre de nouveaux personnages, Ambroise qui est étrangement inversé, Blasius le maladroit, Octavio si magnétique, Mediana la peste ambitieuse, Pollux et Hélène les esprits de famille jumeaux, et un univers d'une richesse incroyable. Parallèlement on suit les pérégrinations d'Archibald accompagné de Renard et Gaëlle à travers les roses des sables. Il y a aussi une petite Victoire qui a un pouvoir étonnant dont on se demande à quoi il va être utile. Et bien sûr, une fin qui donne furieusement envie de poursuivre cette saga.
Et donc, EN ROUTE POUR LE TOME 4 !!!

 

Citations :

Page 133 : Alors qu’Ophélie cherchait le verre de ses lunettes, qui avait lâchement profité de l’occasion pour reprendre la fuite, la colère explosa dans son ventre. Une mioche ! Même loin de chez elle, même après toutes ces années, on la traitait encore et toujours comme une mioche.

 

 

 

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Mon avis : La passe-miroir Livre 2 – Les disparus du Clairedelune – Christelle Dabos

Publié le par Fanfan Do

Éditions Gallimard Jeunesse

 

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Quatrième de couverture :

Fraîchement promue vice-conteuse, Ophélie découvre à ses dépens les haines et les complots qui couvent sous les plafonds dorés de la Citacielle. Dans cette situation toujours plus périlleuse, peut-elle seulement compter sur Thorn, son énigmatique fiancé ? Et que signifient les mystérieuses disparitions de personnalités influentes à la cour ? Sont-elles liées aux secrets qui entourent l’esprit de famille Farouk et son Livre ? Ophélie se retrouve impliquée malgré elle dans une enquête qui l’entraînera au-delà des illusions du Pôle, au cœur d’une redoutable vérité.

 

 

Mon avis :
Voilà que j'ai enchaîné le deuxième tome, car l'essayer c'est l'adopter. En effet, on a envie de savoir où tout ça va mener Ophélie mais aussi Thorn, son futur époux, dans ce monde cruel et menteur. Car si lui y a toujours vécu, Ophélie vient d'une arche où il n'y a pas de jeux de pouvoir ni de duplicité. C'est comme si elle avait été plongée dans un bain d'acide et qu'elle devait apprendre à y survivre et même à y vivre pleinement.

Ophélie est amenée à rencontrer Farouk, l'esprit de famille de cette arche et donc l'être le plus vieux et le plus puissant de ce lieu ainsi que l'ancêtre de tous. Il est décrit comme étant d'une beauté fascinante, pourtant il paraît totalement évaporé, a une mémoire défaillante et semble s'ennuyer au delà de tout. En fait il a l'air carrément gâteux. Ce personnage si puissant qui a l'air de ne rien comprendre ni retenir m'a beaucoup amusée.

Ce deuxième tome et ses descriptions des personnages et des décors extrêmement baroques ainsi que les situations extravagantes m'ont parfois fait penser à un film des années 80 tiré d'un livre, Les aventures du Baron de Munchausen. Une espèce de folie qui donne l'impression d'être dans un univers onirique règne en permanence. Des paysages fous, des événements abracadabrants et des individus tous plus fantasques les uns que les autres donnent la sensation de voyager dans un rêve totalement délirant et féerique.

Il y a dans cette histoire une infinité de personnages passionnants, je crois même qu'ils le sont tous. Certains restent insondables dans ce mélange d'(in)humanité en tous genres, du moins pour l'instant… tel l'ambassadeur, l'anticonformiste de service, qui est un vrai tombeur et qui dépasse sans doute parfois les limites. Pourtant j'ai du mal à croire qu'il ne soit que cela. Et le chevalier, cet enfant infect au pouvoir trop grand pour lui et qui en use à mauvais escient. Thorn, le fiancé d'Ophélie, grand dadais maussade et dur, en apparence en tout cas… mais il faut dire que tout bébé on a tenté de le zigouiller ! Je l'aime énormément et assez rapidement on sent des failles, comme si sa personnalité était surtout une carapace.
Et puis des intrigues, des mystères, des menaces, des disparitions… on ne s'ennuie pas un seul instant dans cette histoire totalement prenante.

J'ai tout aimé et j'ai adoré la fin, qui apporte des réponses mais aussi des nouvelles questions. Surtout, chaque révélation semble apporter de nouveaux mystères…

Et bien entendu, À L'ASSAUT DU TOME 3 !!!

 

Citations :

Page 34 : Ophélie était consciente qu’ils jouaient ensemble sur les planches d’un théâtre, devant un public qui n’attendait qu’une fausse note pour les huer. Chaque mot, chaque intonation, chaque expression corporelle avait son importance. Mais sur cette scène, Thorn restait son plus grand adversaire. À cause de lui, on ne retiendrait d’elle que l’image d’une femme tapie dans l’ombre de son mari.

 

Page 119 : La vieillarde semblait dans l’expectative, comme si elle attendait de voir la jeunette faire ses preuves. Ophélie s’aperçut qu’elle avait elle-même envie de gagner l’estime de cette femme brillante, de cette personnalité insoumise, de cette étrangère qui s’était accomplie à travers sa profession.

 

Page 326 : Je suis la maman d’Ophélie. J’admets être sensible à l’intérêt évident que vous portez à ma fille, mais j’aurais quelques observations à vous faire. Pour commencer, je ne suis pas certaine d’apprécier la façon dont les femmes sont considérées dans votre petite réunion, dit-elle avec un geste significatif pour l’assemblée exclusivement masculine qui la jaugeait du regard. Ensuite, je vous trouve excessivement sévère avec vos plus jeunes descendants. Et enfin, conclut-elle, à l’intention cette fois des favorites, vous devriez apprendre à vous habiller convenablement, mesdames. À votre âge, on ne cache pas ses parties intimes derrière des diamants. Quel exemple déplorable vous donnez à ma fille !

 

 

 

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Mon avis : La passe-miroir Livre 1 – Les fiancés de l’hiver – Christelle Dabos

Publié le par Fanfan Do

Éditions Gallimard Jeunesse

 

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Quatrième de couverture :

Sous son écharpe élimée et ses lunettes de myope, Ophélie cache des dons singuliers : elle peut lire le passé des objets et traverser les miroirs.
Elle vit paisiblement sur l'arche d'Anima quand on la fiance à Thorn, du puissant clan des Dragons.
La jeune fille doit quitter sa famille et le suivre à la Citacielle, capitale flottante du Pôle.
À quelle fin a-t-elle été choisie ?
Pourquoi doit-elle dissimuler sa véritable identité ?
Sans le savoir, Ophélie devient le jouet d'un complot mortel.

 

Une héroïne inoubliable, un univers riche et foisonnant, une intrigue implacable. Découvrez le premier livre d’une grande saga fantastique et le talent d’un nouvel auteur à l’imaginaire saisissant.

 

Lauréat du Concours du premier roman

organisé par Gallimard Jeunesse, RTL, et Télérama.

Grand prix de l’imaginaire 2016

 


 

Mon avis :
Comme promis à ma fille qui y tenait énormément, j'attaque 2023 avec La passe-miroir. Et c'est Gallimard jeunesse ! Ce qui veut dire que, soit je suis complètement immature, soit j'ai gardé ma capacité de rêver et je n'ai pas tué l'enfant qui sommeille en moi. Je vais opter pour la deuxième solution !

Dès le début il est question de mariage arrangé, d'une impossibilité de dire non pour Ophélie qui doit se résigner à épouser Thorn, un homme dont elle ne sait rien. le moins qu'on puisse dire c'est que dès le premier regard, l'aversion est réciproque. Aucun des deux ne souhaite ce mariage, mais le choix ne leur appartient pas.

Ce roman est un univers de magie où, en touchant les objets Ophélie peut connaître l'histoire des propriétaires successifs, où les choses ont une vie propre et ça m'a beaucoup plu. Elle sait aussi traverser les miroirs. Ça m'a un peu évoqué Harry Potter mâtiné du Merlin l'enchanteur de Disney. Eh oui, mon âme d'enfant s'est réveillée à cette lecture. Mais La passe-miroir n'est pas une copie des deux que je viens de citer. C'est juste quelques petites choses comme ça en rapport avec mes propres références, la magie tout simplement telle l'écharpe d'Ophélie qui a sa vie propre…

Les descriptions des différentes arches, les pays, m'ont plongée dans ces mondes tant c'est visuel et immersif, ainsi que les personnages tous étonnants, parfois exubérants. Ça fourmille d'idées, d'imagination, de féerie mais aussi de suspense car le monde dans lequel Ophélie doit aller vivre avec son mari est le Pôle, glacial, extrêmement dangereux, plein de faux-semblants, de perfidie, aux antipodes du sien à tous points de vue, auxquels elle va devoir se frotter et se faire malmener. Cette société est beaucoup trop compliquée pour elle, vanités, ambitions, manipulations, complots, hypocrisies, jalousies, tout n'est que danger pour Ophélie.

En fait, je ne veux pas rentrer dans les détails de l'histoire de peur de spoiler… Il faut lire cette saga si on n'a pas tué l'enfant tapi en nous, car il n'y a pas d'âge pour se laisser aller à rêver d'un univers magique, et celui-ci est tout simplement foisonnant !
J'y ai toutefois trouvé un côté patriarcal désuet un peu pesant, mais peut-être n'est-ce qu'une impression intentionnelle de la part de l'autrice et possiblement Ophélie réussira-t-elle à s'en affranchir. Je l'espère !!!

Et, bien évidemment, SUS AU TOME 2 !!!

 

Citations :

Page 61 : Clouée sur place, Ophélie était incapable de bouger. Il était là. L’homme qui était sur le point de déstructurer sa vie était là.

 

Page 161 : Sa mère avait une personnalité envahissante qui ne laissait de place à rien d’autre qu’elle-même ; elle parlait, elle exigeait, elle gesticulait, elle n’écoutait pas. Quant à son père, il n’était que l’écho faiblard de sa femme, toujours à l’approuver du bout des lèvres sans lever le nez de ses souliers.

 

Page 312 : Dans ce monde, les domestiques avaient bien peu de valeur. Ils n’appartenaient pas à la descendance de Farouk et venaient du peuple des sans-pouvoirs, ils devaient donc compenser avec leurs mains ce qu’ils ne pouvaient apporter avec leurs dons. Il y avait effectivement de quoi rester pensif. Un Mirage qui tricote des illusions vaut donc mieux que ceux qui nettoient son linge et préparent ses repas ?

 

 

 

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Mon avis : Dans la peau du bourreau – Keraval - Monnerais

Publié le par Fanfan Do

Éditions Locus Solus

 

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Résumé :

Cet épais roman graphique est inspiré des carnets d’exécutions écrits de la main d’Anatole Deibler, bourreau français le plus célèbre aux 395 exécutions, de septembre 1885 à janvier 1939.
Il y compilait scrupuleusement les motifs des condamnations, les lieux, dates d’exécutions, entretien de la « Veuve » (surnom de la guillotine), météo et infos multiples sur l’attitude du condamné… Les auteurs en tirent avec brio un récit à la première personne où chaque épisode s’inscrit dans un moment remarquable de cette époque charnière : de la révolution industrielle symbolisée par les grandes expositions universelles de la fin du XIXe siècle jusqu’aux affrontements internationaux du début du XXe siècle, en passant par les assassinats politiques, les attentats anarchistes, les faits divers médiatiques. Anatole Deibler est le témoin privilégié qui nous donne accès aux remous de son temps. On y retrouve de grandes affaires comme le procès Landru ou les 4 de Béthune passés le même jour sous sa guillotine !
Le bourreau Deibler, héritier d’une dynastie de bourreaux (et qui pratique en famille !) se raconte dans les méandres de ses sentiments contrastés, complexes, effrayants parfois, ses passions, ses angoisses, sa vie intime, justifiant ou questionnant son « métier », son enfance à Rennes, ses déplacements partout en France, en Belgique et en Afrique du Nord.
Une réflexion aussi sur les débats déjà vifs contre la peine de mort en France, qu’on redécouvre ici. Ils ne datent pas de 1981 avec Robert Badinter ; l’abolition était un sujet d’actualité majeur en politique à l’époque même de Deibler…

 

 

Mon avis :
Donner la mort est mon métier. C'est ce qu'écrivait dans ses carnets 
Anatole Deibler (1863-1939), bourreau, qu'on nommait aussi "exécuteur des hautes oeuvres". Car il a tout consigné le bonhomme ! Toutes les exécutions mais aussi sa vie, son parcours, laissant ainsi à la postérité des chroniques de son époque et de son métier mais aussi des criminels qu'il a guillotinés et les actes qui les ont amenés à l'échafaud.

Chaque chapitre commence par des faits historiques relatés par l'auteur, puis vient l'histoire d'
Anatole Deibler par lui-même, depuis son enfance, harcelé à l'école car fils de bourreau, jusqu'à sa fonction de bourreau.
On traverse l'époque avec entre autre le Paris de l'exposition Universelle de 1878.

L'hypocrisie de l'époque est insupportable, mais c'est comme ça de tous temps... le fils du bourreau se faisait insulter et tabasser à l'école, pourtant les gens allaient assister aux exécutions publiques.

Adolescent, Deibler rêvait de voyages lointains, de s'embarquer sur un navire, de voir le monde. Son cheminement, alors qu'il trouvait le métier de bourreau ignoble, jusqu'à la succession de son père comme exécuteur est surprenant, comme s'il était victime d'un destin dynastique.

Tout m'a plu dans ce beau livre ; les descriptions des lieux entre Rennes, Paris et Alger, l'époque, l'histoire des familles de bourreaux, les illustrations. J'étais dans l'ambiance, bien souvent les cheveux dressés sur la tête.

Anatole Deibler trouvait abject le voyeurisme du peuple qui venait assister aux exécutions publiques. Et puis… un bourreau qui doute des vertus dissuasives de la peine de mort, c'est surprenant !

J'ai trouvé l'histoire passionnante et très instructive, et j'ai adoré la mise en page et les dessins sublimes qui mettent dans l'ambiance de cette fin de XIXÈME siècle et début de XXÉME où je me suis vraiment trouvée en immersion.

Merci aux 
Editions Locus Solus et à Babelio Masse Critique.

 

Citations :

Page 36 : Je suis un citoyen comme les autres. Fils de bourreau, certes, mais j’observe qu’un fils de criminel est normalement appelé sous les drapeaux. Il n’y a pas de raison qu’il n’en soit pas de même pour moi.

 

Page 36 : Le 1er juin 1885, nous assistons aux funérailles nationales de Victor Hugo. La France est en deuil. Les Deibler le sont aussi, bien qu’il nous ait réduits à la condition de serviteurs de la barbarie. Je m’accorde sur un point avec lui : « On peut avoir une certaine indifférence sur la peine de mort, ne point se prononcer, dire oui et non, tant qu’on n’a pas vu de ses yeux une guillotine. » écrit-il. J’ajoute volontiers : « une guillotine fonctionner ! »

 

Page 46 : La tour Eiffel, produit exubérant de l’orgueil national, se dresse sur le Champs-de-Mars depuis le printemps 1889.

 

Page 53 : L’abolition de la peine de mort est un sujet récurent au sein de l’Assemblée nationale depuis quelques années. La guillotine est jugée barbare par certains quand d’autres y voient un outil nécessaire de répression, voire d’éducation. Mon père se présente comme le dernier maillon d’une chaîne. Il se dit « main ouvrière » d’une justice rendue par les hommes. Nous, les bourreaux, sommes haïs mais aussi, parfois, adulés, au gré des circonstances et des besoins.

 

Page 56 : Il a également étudié les tatouages et affirmé, à partir de comparaisons, que cet usage, réminiscence des pratiques « sauvages », se rencontre souvent chez les « classes inférieures » de la société ainsi que chez les prostituées, les « pédérastes » et les « criminels ». Les dessins portent l’empreinte typique de la criminalité.

 

Page 75 : Je rédige mes carnets le soir, dans le calme apaisant de mon bureau, à la lueur vacillante d’une lampe à huile. Personne n’y pénètre jamais. Il est mon refuge. Ne croyez pas que je me réjouisse de couper des têtes. Aucun homme plus que moi ne se pose la question de la légitimité de la peine de mort.. Dans cet antre silencieux, je cherche dans les mots un peu de réconfort. Oui, je tue des hommes. Chaque soir, le dos voûté sur mon bureau, je revis leurs derniers instants. Histoire ignobles qui se répètent à l’infini. La République éduque le peuple en infligeant la peine de mort. Est-ce bien ? Ce n’est pas à moi d’en décider mais il y a quelque chose d’abject dans ces cérémonies macabres.

 

Page 102 : La violence engendre la violence. Je me demande parfois s’il n’en est pas de même avec les exécutions publiques. J’ai souvent ressenti autour des lieux d’exécution une forme d’excitation paradoxale, un mélange effrayant de terreur et d’extase. Elles sont un condensé de la veulerie et du sadisme humains. Il y a dans ces représentations macabres une théâtralité qui sied mal à la gravité du moment. Elles offrent un ultime moment de gloire à des êtres méprisables tout en procurant au peuple un exutoire jubilatoire. Je doute de leurs vertus éducatives.

 

 

 

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Mon avis : Sens – Revue Psychédélittéraire – N°1 - Collectif

Publié le par Fanfan Do

Éditions Les Doigts Bleus

Clαrα Mαrcнeттι - llυѕтrαтιoɴ 🔹️ Floreɴce Nαυd - Fιcтιoɴ 🔹️ Gαëlle Mαнe - Fιcтιoɴ 🔹️ Keyvαɴ ѕαyαr - Co-rédαc' cнeғ 🔹️ Klιмeɴт Neмeт- Pнoтoɢrαpнιe 🔹️ Mαrcαĸe - Illυѕтrαтιoɴ 🔹️Mαrιe Lαѕѕoɴ - Fιcтιoɴ 🔹️ Myrιαм OH - Poéѕιe 🔹️ Nellιɴe Zιlвerɢ - Co-rédαc' cнeғ 🔹️ Pαѕcαle Doυdeαυ - Fιcтιoɴ 🔹️ Rαpнαël Roѕeɴвerɢ - Cнroɴιqυe 🔹️ Séвαѕтιeɴ Meυɴιer - Co-rédαc' cнeғ 🔹️ Sylvαιɴ Arɴαυd - Fιcтιoɴ 🔹️ Vιvιαɴe coмpoмαr - Fιcтιoɴ 🔹️ Wαнιd Zιɴαoυι - Pнoтoɢrαpнιe

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Résumé :

Revue psychédélittéraire, Sens invite ses lecteurs à explorer une thématique sous toutes ses coutures à travers des articles, des nouvelles, des poèmes et des œuvres graphiques. Intitulé "Seuls ensemble ?" son premier numéro s'intéresse aux facettes de la solitude, avec notamment un dossier consacré aux ermites.

 


 

Mon avis :
Il y a quelques mois j'avais lu un recueil de poésie de 
Keyvan Sayar que j'avais beaucoup aimé. Donc quand il m'a proposé de lire cette revue à laquelle il avait contribué j'ai tout de suite accepté. Ce premier numéro à été imaginé en confinement.

Le tout premier article est consacré à Eva, New-Yorkaise et ermite et j'ai vraiment entendu la voix de la sagesse, car se reconnecter avec soi dans une vie trépidante et stressante paraît soudain une évidence élémentaire. de là à s'exiler au milieu des bois pour se ressourcer... Encore faut-il ne pas être une trouillarde dans mon genre ! Suit tout un dossier vraiment passionnant sur de nombreux ermites, entre ceux qui se coupent du monde pendant des décennies et ceux où celles qui vont en ermitage par périodes. Car oui, il y a quelques femmes. Et que dire de ceux qui le font dans le cadre d'une performance artistique dans des conditions extrêmes ?

On trouve dans cette revue des extraits de livres de 
Henry David ThoreauSarah MaitlandBernard Moitessier mais aussi des créations originales, des nouvelles, alternées avec des textes classiques pour nous aider à comprendre l'érémitisme, ou du moins tenter de l'appréhender.
J'ai adoré ces histoires imaginative et glaçantes, tant la solitude peut parfois être terrifiante, mais aussi touchantes quelquefois ou bien poétiques, qui m'ont donné envie de découvrir d'autres écrits de ces autrices et auteurs.

 

Citations :

Page 17 : Quand j’ai commencé à envisager de devenir ermite, une des questions qui m’intéressait était : pourquoi la société est-elle tellement nocive à l’individu ? Et dans quelle mesure est-ce un problème qui relève surtout de contraintes biologiques, qui se traduisent après en contraintes sociales ? L’image que j’avais en tête à l’époque était d’une usine de mise en conserve de tomates. Au début on a un beau fruit, éclatant de fraîcheur et de goût, puis on le presse, on le broie, on le bourre de conservateurs, on le fourre dans une boîte au format standardisé. C’est toujours un peu une tomate, elle est même encore comestible, mais elle a perdu sa forme, sa saveur et la plu grande partie de son jus. J’ai l’impression que, quel que soit notre statut social, on passe tous par là.

 

Page 18 : Un aspect important de l’ermitage spécifique aux femmes est qu’une femme est beaucoup plus chosifiée qu’un homme dans nos sociétés. La société nous maintient sous pression en permanence pour être de jolis objets. On nous encourage à nous grimer chaque fois qu’on sort de chez soi : se maquiller, se teindre les cheveux, se peser, chausser des talons et toutes sortes d’autres contraintes dont le but n’est pas notre confort.

 

 

 

 

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