Mon avis - Karoo - Steve Tesich
Quatrième de couverture :
Égoïste et cynique, Saul Karoo ment comme il respire et noie ses névroses familiales dans la vodka. Son métier, script doctor, consiste à dénaturer des chefs-d’œuvre pour les aligner sur les canons hollywoodiens. Quand sa carrière croise celle de Leila Millar, une jeune actrice médiocre, il décide contre toute attente de la prendre sous son aile. Car ils sont liés par un secret inavouable...
Mon avis :
Le groupe facebook À l'assaut des pavés et ses lectures communes me donnent l'occasion de lire des romans que j'ai depuis un certain temps, ET-ÇA-FAIT-DU-BIEN de découvrir qu'on peut avoir des super bonheurs littéraires dans ses étagères !!!
Saul Karoo est script doctor, son métier consiste à dénaturer des chefs-d'oeuvre, ou des scénarios problématiques, pour les aligner sur les canons hollywoodiens.
Et bien évidemment il évolue au milieu des amitiés factices du cinéma.
J'ai adoré ce mec, ses raisonnements à la noix et son côté tête à claques qui le rendent attachant et drôle. C'est un loser magnifique !
Ce mec est dingue et c'est drôle ! Sa tournure d'esprit est complètement délirante...
Mais j'avoue que peu à peu il m'est apparu comme une larve immonde, un pauvre mec qui un jour sera vieux sans jamais avoir été adulte. le comble du pathétique de mon point de vue, parce qu'il est lâche, égoïste, menteur et immature.
Mais bon, il reste attachant malgré tout, du moins parce qu'il est un personnage de fiction.
De A à Z c'est que du bonheur, une écriture qui coule toute seule, des réflexions sur la vie, le monde, la connerie aussi ainsi que la superficialité de certains milieux.
Des travers tels que l'hypocrisie et le cynisme y sont très bien décortiqués, sans complaisance, du moins tant que ça concerne les autres. Quand il est questions de lui-même, Saul se trouve une multitude d'excuses toutes plus convaincantes les unes que les autres.
Il sait pourtant qu'il fait du mal à tout le monde par couardise. Et puis un jour il croit trouver une occasion de se racheter auprès de quelqu'un à qui il pense devoir beaucoup.
Alors que la première partie m'a donné l'impression d'un voyage intérieur dans la tête de Saul, sa vie, sa personnalité, la deuxième partie m'a paru plus vivante avec l'arrivée de Leila et donc plus agréable.
La construction de ce roman, l'histoire de Saul, m'a évoqué le travail d'un maçon qui monte un édifice brique par brique.
J'ai énormément aimé !
L'auteur sait terriblement bien disséquer les non-dits, les pensées, les événements de la vie.
Il semble que Steve Tesich n'ait écrit que deux romans et ça c'est bien dommage parce que c'est un véritable coup de coeur pour moi !
Citations :
Page 24 : L'amnésie était l'un des vrais plaisirs de l'ivresse. Lorsque j'étais encore moi-même, en bonne santé et saoul chaque soir, quand je m'éveillais le lendemain matin, je me sentais frais comme un gardon, ayant complètement oublié la soirée de la veille. Chaque journée était une journée toute neuve sans aucun lien avec le passé. Chaque matin était un nouveau commencement. J'étais synchrone avec la nature. La mort le soir, la naissance et le renouveau au matin.
Page 56 : Le metteur en scène était un « mac ». Le producteur, Jay Cromwell, était un « putain de monstre ». Les huiles du studio étaient des « piranhas castrés ». J'étais moi-même « un vrai salopard doublé d'une merde ».
Page 198 : Quand une femme me ment, comme Dianah est en train de le faire, c'est à ce moment-là que je me sens aimé. Chaque fois qu'une femme impliquée dans une de mes aventures éphémères simulait un orgasme, j'étais toujours profondément ému par un tel acte d'abnégation et de générosité, réellement ému à la pensée qu'elle avait suffisamment de sentiments pour moi pour se donner la peine de simuler.
Page 315 : La voir complètement habillée est encore plus provocateur et érotique que le spectacle de sa chair nue un peu plus tôt. On dirait un paquet cadeau.
Page 372 : Tu as devant toi un homme qui regrette d'être né. Mais étant né et sachant d'autorité que je mourrai un jour, tout ce que j'ai fait, c'était rechercher un peu de bonheur. Entre les deux points, celui de ma naissance et celui de ma mort. Un peu de bonheur, juste un peu.
Page 442 : Je maintiens par ailleurs le flot régulier d'un bavardage superficiel. Ce bavardage coule de moi comme un vin blanc bon marché de sa bouteille. J'ai un accès à des millions de fragments d'informations stockées dans ma mémoire. N'importe quoi, de l'école primaire au troisième cycle de la fac et au-delà.
Page 472 : L'idée même de se tourner vers Dieu lui sembla absurde. S'il y avait bien un Dieu, alors il vous entourait de toutes parts, et vous ne pouviez pas ne pas être tourné vers lui, même si vous ne le vouliez pas. S'il n'y avait pas de Dieu, alors le fait de se tourner dans une direction convenue pour le trouver était un geste si futile qu'il se porterait tout aussi bien en ne le faisant pas.
Page 537 : Aucune assurance contre la folie et la tragédie, contre les destinations jamais atteintes et les désirs jamais assouvis.