Mon avis : Lorsque le dernier arbre – Michael Christie
Édition Albin Michel
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Quatrième de couverture :
« Le temps ne va pas dans une direction donnée. Il s'accumule, c'est tout - dans le corps, dans le monde -, comme le bois. Couche après couche. Claire, puis sombre. Chacune reposant sur la précédente, impossible sans celle d'avant. Chaque triomphe, chaque désastre inscrit pour toujours dans sa structure. »
D'un futur proche aux années 1930, Michael Christie bâtit, à la manière d'un architecte, la généalogie d'une famille au destin assombri par les secrets et intimement lié à celui des forêts.
20382038. Les vagues épidémiques du Grand Dépérissement ont décimé tous les arbres et transformé la planète en désert de poussière. L'un des derniers refuges est une île boisée au large de la Colombie-Britannique, qui accueille des touristes fortunés venus admirer l'ultime forêt primaire. Jacinda y travaille comme de guide, sans véritable espoir d'un avenir meilleur. Jusqu'au jour où un ami lui apprend qu'elle serait la descendante de Harris Greenwood, un magnat du bois à la réputation sulfureuse. Commence alors un récit foisonnant et protéiforme dont les ramifications insoupçonnées font écho aux événements, aux drames et aux bouleversements qui ont façonné notre monde. Que nous restera-t-il lorsque le dernier arbre aura été abattu ?
Fresque familiale, roman social et écologique, ce livre aussi impressionnant qu'original fait de son auteur l'un des écrivains canadiens les plus talentueux de sa génération.
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Pourquoi j’ai voulu lire ce livre :
J'ai eu la chance de recevoir ce roman grâce à un partenariat Éditions Albin Michel - Picabo River Book Club, merci à eux et à LeaTouchBook la super admin de ce super groupe
Mon avis :
Dès l'entrée en matière, en 2038, ça sent la tristesse d'un monde en train de s'effriter inexorablement sans le moindre espoir, laissant la majorité de l'humanité terriblement précaire. On a un sentiment de perte irréparable, que plus jamais on ne pourra jouir en toute simplicité d'une brise légère au milieu des arbres, que plus jamais on ne rêvassera en regardant les feuilles des cimes se découper dans un ciel azur, que plus jamais on n'envisagera l'avenir avec espoir.
Sauf sur Greenwood Island, sanctuaire partiellement préservé, lieu de pèlerinage pour privilégiés.
Jake Greenwood, botaniste et guide dans une des dernières forêt primaire au monde, est la fille de Liam Grenwood, ébéniste, lui-même fils de Willow Greenwood, écolo, idéaliste et activiste, fille en révolte de Harris Greenwood, homme d'affaires cupide, charognard de la Terre et des forêts.
On remonte le temps dans ce monde qui se meurt, à travers la saga familiale des Greenwood, famille complexe dont le destin est lié avec le bois, dont les descendants ne connaissent pas forcément leurs ascendants et réciproquement.
Au fil de l'histoire on s'attache aux membres de cette famille.
Ce roman est un chant d'amour à la nature et plus précisément aux forêts et aux arbres qui vivent en osmose, un cri d'alarme à l'humanité.
Au fil des chapitres on voyage dans les époques, à rebrousse-temps, 2038, 2008, 1974, 1934, 1908, à travers l'histoire et la genèse de la famille Greenwood, les frères Harris et Everett, puis on remonte jusqu'au futur. C'est un périple fascinant qui nous raconte en même temps une page d'Histoire du Canada et du monde.
C'est typiquement le genre de roman qui fait office de piqure de rappel. On a tendance à oublier, vu d'ici dans notre petit confort du monde moderne, que les pays riches aux XIXème et XXème siècle se sont construit sur beaucoup de misère humaine, des catastrophes économiques et des guerres et que le rêve américain tenait autrefois plutôt du cauchemar pour beaucoup. Car avant même la grande dépression, les conditions de vie étaient terribles pour certains qui vivaient dans le dénuement le plus absolu.
Il y a de tout dans ce roman : une part de dystopie, de l'écologie, une traque acharnée, du suspense, une quête de rédemption, une histoire de famille, une plongée dans l'histoire du monde. C'est une fresque passionnante de bout en bout. Ce roman nous rappelle à quel point la cupidité se moque de la beauté, petits hommes, petits grains de poussières dans l'univers qui se permettent de mutiler notre mère la Terre.
J'ai dévoré passionnément cette histoire qui m'a donné le triste sentiment que le temps qui passe nous vole beaucoup, à moins que nous n'en soyons les seuls responsables. C'est aussi une ode à la nature et aux forêts millénaires qui hélas tient du requiem, telle la chronique d'une catastrophe annoncée.
Citations :
Page 47 : Certes, elle préférerait une relation sur le long terme à une histoire forcément sans lendemain avec Corbyn, mais comment quoi que ce soit pourrait-il durer dans un monde aussi abîmé ? Un monde où, chaque nuit, des milliers d’enfants toussent à en mourir et où même les arbres les plus majestueux ne peuvent espérer survivre ?
Page 179 : Au cours de sa carrière, Harris Greenwood a présidé à l’abattage de plus de deux cent cinquante millions d’hectares de forêt primaire. Certains arbres parmi les plus larges, les plus hauts, les plus beaux que la planète ait jamais portés sont tombés sur son ordre.
Page 463 : Ce que l’expérience lui a appris, c’est que plus les temps sont durs, plus nous nous comportons mal les uns envers les autres. Et ce que nous avons de pire à offrir, nous le réservons à notre famille.
Page 498 : Mais pourquoi attendons-nous de nos enfants qu’ils mettent un terme à la déforestation et à l ‘extinction des espèces, qu’ils sauvent la planète demain, quand c’est nous qui, aujourd’hui, en orchestrons la destruction ?