Mon avis : Nickel Boys – Colson Withehead
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Quatrième de couverture :
Dans la Floride ségrégationniste des années 1960, le jeune Elwood Curtis prend très à cœur le message de paix de Martin Luther King. Prêt à intégrer l'université pour y faire de brillantes études, il voit s'évanouir ses rêves d'avenir lorsque, à la suite d'une erreur judiciaire, on l'envoie à la Nickel Academy, une maison de correction qui s'engage à faire des délinquants des « hommes honnêtes et honorables ». Sauf qu'il s'agit en réalité d'un endroit cauchemardesque, où les pensionnaires sont soumis aux pires sévices. Elwood trouve toutefois un allié précieux en la personne de Turner, avec qui il se lie d'amitié. Mais l'idéalisme de l'un et le scepticisme de l'autre auront des conséquences déchirantes.
Couronné en 2017 par le prix Pulitzer pour Underdground Railroad puis en 2020 pour Nickel Boys, Colson Whitehead s'inscrit dans la lignée des rares romanciers distingués à deux reprises par cette prestigieuse récompense, à l'instar de William Faulkner et John Updike. S'inspirant de faits réels, il continue d'explorer l'inguérissable blessure raciale de l'Amérique et donne avec ce nouveau roman saisissant une sépulture littéraire à des centaines d'innocents, victimes de l'injustice du fait de leur couleur de peau.

Pourquoi j'ai voulu lire ce livre :
Le destin tragique des afro-américains, tout comme des amérindiens, m'a toujours passionnée et révoltée. Donc en toute logique j'aime lire les romans qui traitent ces sujets, qui mettent en évidence les injustices faites à ces peuples tout en les dénonçant.
Je savais qu'un nouveau roman de Colson Withehead allait sortir en août et je le voulais.
J'ai eu la chance d'être tirée au sort sur le Picabo River Book Club pour recevoir ce livre.
Mon avis :
Tout d'abord, un grand merci à LéaTouchBook et son Picabo River Book Club ainsi qu'aux Éditions Albin Michel - Terres d'Amérique pour m'avoir permis de recevoir ce livre.
J'avais beaucoup aimé le précédent roman de Colson Withehead, Underground Railroad et j'avais donc une furieuse envie de lire cet autre roman !
Dès le prologue on pressent qu'on va avoir le cœur en miettes pour nos frères Noirs du temps de la ségrégation.
Vu d'ici ça paraît aberrant, pourtant c'est pas si loin que ça... les années soixante !
C'est un sujet qui me passionne et me révolte à la fois.
Elwood Curtis, jeune noir passionné par les discours de Martin Luther King, se prépare à entrer à l'université. Il est victime d'une "erreur judiciaire" et se retrouve envoyé en maison de correction appelée pompeusement Nickel Academy.
Dans cette Amérique là, partout à cette époque le racisme est omniprésent et irréfléchi. Ici les gens sont racistes parce qu'ils sont racistes. Ils n'aiment pas les noirs parce qu'ils n'aiment pas les noirs, c'est atavique, haineux, débile et cruel, sans aucun fondement, évidemment.
À la Nickel Academy, être un délinquant blanc c'est dur, être délinquant et noir c'est l'enfer.
Elwood qui pensait purger sa peine tranquillement sans faire de bruit et rentrer chez lui va découvrir ce qu'est l'horreur de la détention ; un monde de violence et d'injustice, bien caché derrière les murs.
C'est terrifiant ce destin de descendants d'esclaves, supposés hommes libres mais pris dans le carcan du racisme des blancs ou tout peut devenir faux-pas, où tout peut déraper sans raison valable, et les priver de leur liberté.
Il y a quelques allers-retours entre passé et présent qui nous laissent entrevoir ce qu'il est advenu, et ça j'ai vraiment aimé. Ça nous laisse dans une sorte d'expectative curieuse.
J'ai beaucoup aimé ce nouveau roman, même si une espèce de froideur m'a gardée à distance des émotions que je pensais ressentir avec intensité. Il m'a manqué ce petit quelque chose qui m'aurait fait souffrir avec les protagonistes, les victimes de cette histoire. Je suppose que c'est voulu par l'auteur.
Et puis finalement, le dénouement m'a stupéfiée et beaucoup émue.
Citations :
Page 27 : Avec l'arrêt Brown vs Board of Education, la Cour Suprême avait imposé aux écoles de mettre fin à la ségrégation : ce n'était qu'une question de temps avant que tous les murs invisibles ne s'écroulent.
Page 38 : Il y a dans le monde de grandes forces, les lois Jim Crow notamment, qui visent à rabaisser les Noirs, et de plus petites forces, les autres personnes par exemple, qui cherchent à vous rabaisser, et face à toutes ces choses, les grandes comme les petites, il faut garder la tête haute et ne jamais perdre de vue qui l'on est.
Page 65 : Loomis leur dit de chercher ce qui leur allait et orienta Elwood vers la section réservée aux Noirs, où atterrissaient les vêtements les plus usés.
Page 106 : Il n'existait pas de système supérieur régissant la brutalité de Nickel, rien qu'un mépris aveugle sans rapport avec les individus.
Page 134 : Les garçons blancs n'avaient pas la vie aussi dure que les noirs, mais s'ils étaient à Nickel cela signifiait quand-même que le monde ne se souciait pas trop d'eux.
Page 176 : Souvent, des écarts plus graves et des institutions plus dures les attendaient. Que ce soit avant, pendant ou après, s'il fallait définir leur trajectoire générale, les garçons de Nickel étaient baisés.
Page 177 : Certaines morts étaient plus infâmes que d'autres.
Page 177 : En regardant ce qui s'étendait à l'extérieur de l'école, en voyant ce monde libre et vivant, comment ne pas songer à courir vers la liberté ?
Page 199 : Voilà ce que cette école vous faisait. Et ça ne s'arrêtait pas le jour où vous en partiez. Elle vous brisait, vous déformait, vous rendait inapte à une vie normale.
Page 216 : Ils l'avaient appris très jeunes, à l'école, dans les rues et sur les routes de leurs villes poussiéreuses. Nickel le leur avait bien fait entrer dans le crâne : Vous êtes des Noirs dans un monde de Blancs.
Page 231 : Leurs pères leur avaient appris à mettre un esclave au pas, leur avaient transmis cet héritage de brutalité. Arrachez-le à sa famille, fouettez-le jusqu'à ce qu'il oublie tout sauf le fouet, enchaînez-le pour qu'il ne connaisse plus rien d'autre que les chaînes.