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Mon avis : 4321 - Paul Auster

Publié le par Fanfan Do

Ma chronique sur Insta c'est ici

 

Traduit par Gérard Meudal – 1019 pages - Actes sud

 

 

 

Le point de vue des éditeurs :

 

À en croire la légende familiale, le grand-père nommé Isaac Reznikoff quitta un jour à pied sa ville natale de Minsk avec cent roubles cousus dans la doublure de sa veste, passa Varsovie puis Berlin, atteignit Ham- bourg et s’embarqua sur l’Impératrice de Chine qui franchit l’Atlantique en essuyant plusieurs tempêtes, puis jeta l’ancre dans le port de New York au tout premier jour du XXe siècle. À Ellis Island, par une de ces bifurcations du destin chères à l’auteur, le nouvel arrivant fut rebaptisé Ferguson. Dès lors, en quatre variations biographiques qui se conjuguent, Paul Auster décline les parcours des quatre possibilités du petit-fils de l’immigrant. Quatre trajectoires pour un seul personnage, quatre répliques de Ferguson qui traversent d’un même mouvement l’histoire américaine des fifties et des sixties. Quatre contemporains de Paul Auster lui-même, dont le “maître de Brooklyn” arpente les existences avec l’irrésistible plaisir de raconter qui fait de lui l’un des plus fameux romanciers de notre temps.
 

 

 

 

Pourquoi j'ai voulu lire ce livre :

 

J'ai lu il y a des années Le livre des illusions et je l'avais trouvé passionnant.

Dans ce roman ci, il y a un paramètre qui m'attirait énormément, c'est la déclinaison de quatre destins possibles pour une même personne.

 

 

 

Mon avis :

 

Il y a un sortilège caché dans les premières lignes de ce roman de plus de mille pages, il vous tombe dessus dès le début de la lecture pour ne plus vous lâcher. On se fait avaler tout cru dans l'histoire de la famille Ferguson.

La façon dont les personnages sont racontés est passionnante. Ce roman est un véritable page-turner.

 

Mais alors, c'est un roman très étrange ; la chronologie est étonnante et il faut un certain temps pour comprendre comment ça fonctionne.

Les phrases sont extrêmement longues, parfois une page entière, et pourtant ça ne gêne absolument pas.

 

Il y a ce que j'aime dans ce roman, un "Et si"... la possibilité d'un autre destin, plusieurs fois, plusieurs alternatives pour une même vie.

Il y a un socle, une base de départ toujours la même : le grand-père arrivé à Ellis Island au début du XXème siècle, puis un de ses fils, Stanley, qui épouse Rose Adler avec qui il aura Archibald (Archie) Ferguson, le héros de l'histoire. Ensuite, quatre déclinaisons de ce qu'aurait pu être leur vie, mais essentiellement axées sur celle d'Archie, nommé Ferguson par l'auteur.

 

J'ai adoré l'idée du roman, j'ai toujours aimé ce genre d'histoire, que ce soit au cinéma ou en littérature, parce que moi-même je me demande souvent ce que serait ma vie si d'autres choix avaient été faits. Si mon père avait choisi d'aller travailler au Zaïre (comme je l'espérais) plutôt qu'au Havre. Je n'aurais jamais rencontré le père de mes enfants, qui donc n'existeraient pas et ça aurait une incidence sur une multitude de vies. Des amitiés jamais nouées, des histoires d'amour jamais vécues.

Je trouve ce genre d'extrapolation absolument fascinante.

Et c'est construit d'une façon totalement inattendue, avec maestria.

 

Au fil des chapitres on parcourt l'histoire de l'Amérique de façon très diversifiée en fonction des différentes vies, des choix et des centres d'intérêt du héros, et ça aussi c'est passionnant. C'est dense et foisonnant.

Il est par ailleurs énormément question de littérature tout au long du roman, un vrai bonheur... qui donne envie de découvrir nombre d'auteurs cités.

 

Ce livre m'a tenue pendant 18 jours ... j'aurais bien aimé en venir à bout plus vite que ça !

Mais quel talent Paul Auster !

Sans aller jusqu'au coup de cœur, je suis admirative de l'œuvre qui m'apparaît comme une véritable prouesse littéraire.



 

 

Citations :

 

Page 40 : Ainsi Ferguson était né, et pendant les quelques secondes qui suivirent son expulsion du ventre maternel, il fut le plus jeune être humain à la surface de la terre.

 

Page 80 : Dieu est cruel, Archie. Il devrait protéger les braves gens dans ce monde mais il ne le fait pas. Il les fait souffrir tout autant que les méchants.

 

Page 119 : Quel drôle de couple ils formaient tous les deux, un garçon blessé hurlant son amour dans chaque acte d'hostilité envers son père et un père blessé exprimant son amour en refusant de le gifler, en se laissant bourrer de coups.

 

Page 184 : L'attrait des journaux était radicalement différent de celui des livres. Les livres étaient solides et durables alors que les journaux étaient des prospectus fragiles et éphémères que l'on jetait dès qu'on les avait lus, en attendant qu'ils soient remplacés le lendemain par le numéro suivant, tous les matins une édition nouvelle pour un nouveau jour.

 

Page 216 : Je ne crois plus en Dieu, écrivait-il dans l'une d'elles. Du moins pas dans le Dieu du judaïsme, des chrétiens ou des autres religions. La Bible dit que Dieu a créé l'homme à son image. Mais ce sont des hommes qui ont écrit la Bible, non ? Ce qui veut dire que l'homme a créé Dieu à son image. Ce qui veut également dire que Dieu ne s'occupe pas de nous, et qu'il se moque très certainement de ce que les hommes peuvent penser ou éprouver. S'il se souciait un tant soit peu de nous il n'aurait pas créé un monde empli de réalités si terribles. Les hommes ne se feraient pas la guerre, ne s'entretueraient pas, ne construiraient pas de camps de concentration. Ils ne mentiraient pas, ne tricheraient pas, ne voleraient pas.

 

Page 284 : Angie entra dans la salle à manger en apportant le dessert et Ferguson contempla sa part de pudding au chocolat en se demandant pourquoi il n'existait pas une loi qui permettrait aux enfants de divorcer de leurs parents.

 

Page «312 : Mais ce que Hank et Frank n'ont pas compris c'est que le mariage change tout. Il ,n'est pas seulement question de deux personnes qui décident de vivre ensemble, c'est le début d'une longue lutte qui oppose la volonté d'un partenaire à celle de l'autre, et même si le mari semble souvent avoir le dessus, c'est la femme qui choisit à la fin.

 

Page 721 : Depuis qu'il était petit, depuis que son moi de petit garçon avait compris qu'il était une créature de transition, destinée à grandir et à devenir un homme, il s'était dit qu'il deviendrait père un jour, qu'il finirait par engendrer des petits Ferguson qui grandiraient et deviendraient à leur tour des hommes ou des femmes, c'était un rêve éveillé qu'il avait toujours tenu pour acquis comme un avenir certain parce que c'était ainsi que marchait le monde, les petits devenaient grands puis à leur tour mettaient au monde d'autres petits et quand on avait l'âge de le faire c'est ce qu'on faisait. Même aujourd'hui pour ce philosophe de dix-neuf ans désabusé et partisan de livres obscurs, c'était une chose qu'il continuait à attendre avec un grand plaisir.

 

 

 

 

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